Produire des hydrocarbures en mer
La production offshore est cruciale pour le monde : elle correspond à 30 % de la production mondiale de pétrole et 27 % de la production de gaz, ce pourcentage étant plus important pour les pays non OPEP.
La production pétrolière est surtout rencontrée au Moyen- Orient, en Afrique de l’Ouest et en mer du Nord, avec la part de l’Amérique du Sud en forte croissance (75 % de la production offshore pour l’ensemble de ces 4 zones).
La production de gaz est surtout rencontrée en mer du Nord, au Moyen-Orient avec de nouveaux développements en Méditerranée orientale.
La production provient de 17 000 plateformes en opération, à 50 % constituées de plateformes fixes. On observe la construction de plus de 400 nouveaux supports par an, pour un montant annuel de plus de 50 milliards de dollars, et environ 3 400 forages en mer par an, répartis sur toutes les zones géographiques.
REPÈRES
La production d’hydrocarbures est l’une des activités dominantes de nombreux secteurs de l’économie maritime. Dans le transport maritime, un tiers du tonnage mondial est constitué de pétrole brut, de gaz et de produits raffinés : cela concerne 25 % des navires et 3 milliards de tonnes transportées en 2012. Cette activité est en croissance pour ce qui concerne le gaz naturel liquéfié (GNL) et les produits raffinés. La totalité des plus grandes raffineries sont installées dans des zones portuaires ou proches de la côte.
Les exploitations pétrolières et gazières offshore sont les plus importantes ressources marines actuellement exploitées, et sont devenues une composante majeure de la production mondiale.
Plus d’un demi siècle d’histoire
L’exploitation offshore a commencé dès les années 1950 avec l’installation de puits par faible profondeur d’eau. Mais son développement a surtout démarré lors de la crise de 1973, qui a conduit à la mise en exploitation de la mer du Nord.
“ L’offshore représente 30 % de la production mondiale de pétrole ”
Beaucoup d’entre nous ont en mémoire les annonces du premier grand développement, qui a été celui de Frigg en Norvège en 1978, par Elf – et qui reste le plus grand gisement de gaz jamais découvert en mer du Nord. Son exploitation a duré jusqu’en 2004.
La deuxième grande étape a été celle du développement de l’offshore profond dans les années 1990, avec notamment la mise en production de Girassol en 2001 dans le golfe de Guinée, par 1 400 mètres de profondeur d’eau. Des profondeurs d’exploration et de production de plus de 3 000 mètres d’eau ont été réalisées ; il faut y ajouter plusieurs milliers de mètres d’épaisseur de sédiments pour atteindre les réservoirs les plus enfouis.
L’offshore profond est en développement rapide : sa part pour le pétrole est passée de 3 % à environ 6 % de la production mondiale depuis 2008.
Une activité très technologique
Cette exploitation a été rendue possible, du triple point de vue de la sécurité, du respect des contraintes environnementales et de la rentabilité, par les progrès substantiels des connaissances et de la technologie.
LES LEÇONS DES ACCIDENTS
L’industrie s’est continuellement améliorée, et tout particulièrement à partir des accidents successifs comme celui de Macondo dans le golfe du Mexique. Des révisions systématiques des installations existantes, des évolutions de la conception des installations fond de mer, ou un renforcement des bonnes pratiques en opération sont mis en œuvre. Un renforcement très considérable des outils de surveillance et d’intervention dans les principales zones de production, notamment le golfe du Mexique et le golfe de Guinée, est mis en place. Toute l’industrie sait bien que l’attention à ces risques ne doit pas se relâcher.
Le développement des connaissances en matière de géologie des réservoirs pétroliers profonds a débuté dès les années 1980, notamment en ce qui concerne l’enfouissement des sédiments continentaux dans les canyons profonds. Un exemple en est le programme ZaïAngo, mené dans le golfe de Guinée par Elf puis par Total, avec l’Ifremer, à la fin des années 1990.
Le développement des technologies d’exploration a été un élément déterminant, et notamment celui de la sismique sous-marine de plus haute résolution par observations multitraces et multizénithales.
Les technologies de forage et de production pour les grandes profondeurs d’eau ont fait l’objet d’innovations continues : pour la période la plus récente, on peut citer les risers tenant en pression et température, le pompage multiphasique sous-marin, les installations de séparation fond de mer, les architectures et les installations de traitement des plateformes flottantes, etc.
La maîtrise de la gestion des très grands projets a permis par exemple de développer CLOV (Cravo, Lirio, Orquidea et Violeta), un projet de 7 milliards de dollars, en quatre ans. CLOV, au large de l’Angola, produit et traite 160 000 barils par jour à partir de 34 puits de production par 1 100 à 1 400 m d’eau, répartis sur un gisement de 380 km2.
Une activité d’avenir
Au cours des prochaines années, l’activité pétrolière offshore va sans doute continuer à croître. Environ 28 milliards de barils équivalents de réserves d’huile et de gaz sont en cours de développement, pour un investissement de l’ordre de 210 milliards de dollars. Des zones à fort potentiel font l’objet de permis d’exploration et de nouveaux développements, tout particulièrement dans le golfe du Mexique, le long des côtes du Brésil, mais aussi dans le canal du Mozambique.
“ 28 milliards de barils sont en cours de développement ”
Des zones géographiques nouvelles, et en particulier des mers de haute latitude, au nord de l’Écosse ou au sud de l’Afrique, ont donné lieu à des découvertes importantes.
Il existe des ressources dans des thèmes géologiques encore peu explorés, comme les marges abruptes ou l’offshore très profond. Des possibilités technologiques permettent de concevoir de nouvelles installations, comme les installations de production fond de mer, les engins d’intervention intelligents, les liaisons terre-mer (énergie et production) sur de longues distances, ou l’EOR (enhanced oil recovery) en mer, qui permet d’améliorer considérablement la performance d’extraction des champs pétroliers exploités.
Réduire les coûts
CLOV produit et traite 160 000 barils par jour.
La crise pétrolière actuelle peut être un vecteur de ralentissement de cette croissance, mais ne devrait pas l’arrêter. D’une part, les développements en cours ne devraient pas être interrompus. D’autre part, la part prise par la production offshore est nettement plus importante que l’excès actuel de production par rapport à la demande, c’est-à-dire telle qu’il n’est pas possible de s’en passer.
Enfin, les productions offshore ne sont pas les plus coûteuses parmi la panoplie des productions. Cependant, la fourchette des coûts des différentes installations ou des projets est très étendue ; il est donc aujourd’hui nécessaire de prêter une grande attention à ces coûts, et de les réduire.
La France a le vent en poupe
L’industrie pétrolière et parapétrolière et la R & D françaises ont beaucoup contribué au développement de l’exploitation pétrolière offshore depuis les années 80.
Du côté de la production, Total a un savoir-faire et des projets d’investissements majeurs ; le groupe est parmi les plus réputés dans le monde sur ce sujet, avec Petrobras (Brésil). La majeure partie de ses projets actuellement en développement sont de type offshore.
“ Impossible de se passer de la production offshore ”
L’industrie parapétrolière est très active, offrant des solutions d’exploration et d’installation de production de pointe. Des compagnies comme CGG ou Technip sont des acteurs majeurs dans leurs activités. Des compagnies de services comme Bourbon sont présentes partout dans le monde.
L’activité de R & D a été relancée ces dernières années, avec notamment le programme PaMELa pour l’étude des phénomènes géologiques, géophysiques et géochimiques des marges actives, construit par Total avec l’Ifremer, le CNRS et des universités, essentiellement dans le canal du Mozambique ; ou le développement de nouvelles méthodes de traitement des données sismiques, tirant parti des très grandes puissances de calcul pour atteindre une meilleure résolution dans des zones complexes, comme sous les couches de sel.
Enfin, un potentiel de ressources existe dans les 11 millions de km2 de la ZEE (Zone économique exclusive) de la France, en Guyane, à Saint-Pierre-et- Miquelon, dans le golfe du Lion et peut-être d’autres zones. La réalité et la rentabilité de l’exploitation de ces ressources restent cependant à confirmer, en analysant cas par cas dans la perspective de la compétitivité économique mondiale de chaque projet.