Proust et le chat de Schrödinger
Jean-Noël Contensou (61) a fait une carrière d’informaticien logicien à partir de sa sortie de l’École, et ainsi contribué au développement, dans notre pays, de l’industrie des logiciels, qui est une de nos forces dans la compétition mondiale. Il se présente comme un autodidacte, disciple inconditionnel de Bernard d’Espagnat.
Il rappelle que la recherche d’une réalité du monde, le monde des gens et des paysages, au-delà des apparences mouvantes et provisoires, n’est pas réservée aux physiciens : elle a suscité des aspirations religieuses et artistiques à la recherche de quelque chose de vrai, mais hors d’atteinte.
Son idée est qu’il existe une filiation entre le réel voilé, perçu au niveau microscopique et une notion de réel tout aussi voilé, de niveau macroscopique : une sorte de résurgence, dans notre monde familier, de l’énigme quantique.
S’engageant dans une analyse détaillée de texte, et utilisant largement des citations, il montre que Marcel Proust décrit comment une réalité lui échappe dans une expérience artistique de même niveau d’exemplarité qu’une expérience scientifique. Une réalité d’arbres au bord d’une route, éternelle et fuyante, au-delà de leur apparence, est révélée à une part de Proust tout aussi éternelle et fuyante.
Le fonds voilé de la physique microscopique s’étend à un tréfonds universel dont on ne peut rien dire tant qu’il ne se révèle pas à un artiste : ce que Jean-Noël Contensou appelle le réel natif.
Pour sa démonstration, il n’hésite pas à utiliser plusieurs méthodes de réflexion. Celle, socratique, de « Marcellus » descendu de l’Olympe, et engageant une conversation avec (Pl)aton, (Dé)mocrite et un berger ; celle voltairienne des lettres à Candide ; celle du blog d’ Internet ; celle enfin du résumé auquel un lecteur désorienté pourra en permanence se référer, en annexe finale.
Dans la préface du livre, Bernard d’Espagnat affirme avoir trouvé dans cet ouvrage « le mérite de rendre plausible un rapprochement entre nos deux grandes cultures : la littéraire et la scientifique, dont le divorce est, on le sait bien, une grande déficience de l’Occident ».