L’Eurostar.

Quels transports pour la France d’ici le milieu du siècle ?

Dossier : La France en 2050Magazine N°603 Mars 2005
Par Jean-Noël HERMAN (52)

Suite à la ren­contre, le 17 novembre 2004, avec Michel Wal­rave (54), direc­teur géné­ral adjoint hono­raire de la SNCF et Chris­tian Geron­deau (57), pré­sident de la Fédé­ra­tion natio­nale des auto­mo­biles clubs, Gérard de Ligny veillant à la bonne ordon­nance de ce débat.

Situation actuelle

La route assure actuel­le­ment une part lar­ge­ment pré­pon­dé­rante des trans­ports en France : en 2002, 83 %1 des flux de trans­ports de mar­chan­dises (hors oléo­ducs) expri­més en t x km ont été assu­rés par la route et 15 % par le rail. De même, pour les dépla­ce­ments de per­sonnes expri­més en voya­geur-kilo­mètre 88,5 % ont été effec­tués par la route (dont 84,5 % en voi­ture par­ti­cu­lière), 10 % par le rail et 1,5 % par avion.

Cette situa­tion n’est pas nou­velle, mais fait suite à une longue évo­lu­tion : en 1974, la SNCF assu­rait un tra­fic de mar­chan­dises de 72 mil­lions de t x km repré­sen­tant 46 % de parts de mar­ché ; en 2002, ces chiffres étaient tom­bés à 50 mil­lions de t x km et 20 %. La pro­pen­sion des Fran­çais à se dépla­cer en voi­ture est plus ancienne encore, puis­qu’en 1980 la voi­ture repré­sen­tait déjà 81 % des déplacements.

Si on prend comme uni­té de mesure du tra­fic fret le « véhi­cule-kilo­mètre », la part du rail dans le fret des­cend à 7 %. Et si on consi­dère, tou­jours pour le fret, le chiffre d’af­faires elle des­cend à 3,5 %.

Reve­nant au tra­fic de voya­geurs, on note­ra les points suivants :

  • l’ex­pan­sion du TGV a été spec­ta­cu­laire, puisque ce mode de trans­port, qui n’exis­tait pas en 1980, atteint en 2002 73 % de l’ac­ti­vi­té « grandes lignes » en voya­geur-kilo­mètre, et plus encore en chiffre d’affaires ;
  • par contraste, l’ac­ti­vi­té des trains express régio­naux (TER) appa­raît très modeste : 16,9 % du tra­fic glo­bal des grandes lignes (dont les TER ne font pas par­tie). Or, ces TER uti­lisent, sou­vent en exclu­si­vi­té, 23 000 km de lignes (soit 70 % du réseau) et 2 660 gares ou haltes ;
  • au total le tra­fic voya­geur par rail s’est main­te­nu mais le tra­fic rou­tier, par voi­tures par­ti­cu­lières et auto­cars, est mon­té en vingt ans de plus de 60 %.

Orientations politiques et sociétales

La pré­do­mi­nance de la route, attes­tée par les don­nées ci-des­sus, sus­cite des cri­tiques sur plu­sieurs plans : conges­tion d’axes auto­rou­tiers, pol­lu­tion atmo­sphé­rique, acci­dents de la route, et dan­ger du « tout pétrole » à la veille d’une crise inéluctable.

Tout en conti­nuant à plé­bis­ci­ter la route, l’o­pi­nion publique appuie ces cri­tiques : une enquête de la Sofres réa­li­sée fin 2000 dans cinq pays euro­péens révèle que 79 % de per­sonnes inter­ro­gées (91 % en France) pen­saient que le flux des poids lourds sur les grandes voies de com­mu­ni­ca­tion devrait être réduit par une meilleure exploi­ta­tion du rail.

Quand on consi­dère le rap­port de 7 à 93 % entre le rail et la route, la gageure paraît dif­fi­cile à tenir, mais elle n’a pas décou­ra­gé les res­pon­sables fran­çais et euro­péens des trans­ports : en effet le « sché­ma de ser­vices col­lec­tifs des trans­ports fran­çais » de 2002 et le Livre blanc de la Com­mis­sion euro­péenne de 2001 rete­naient déjà l’ob­jec­tif de rééqui­li­brage rail-route en y inté­grant les pro­blèmes d’environnement.

Le pro­jec­teur est donc bran­ché sur le tra­fic rou­tier, par­ti­cu­liè­re­ment celui des mar­chan­dises. Nous allons donc exa­mi­ner prio­ri­tai­re­ment les cri­tiques émises sur la route en réser­vant les pro­blèmes d’en­gor­ge­ment à une réflexion ulté­rieure sur les infra­struc­tures, englo­bant route et rail.

Nuisances de la route et effets prévisibles

1) Les pollutions

Les émis­sions de gaz toxiques et pour les die­sels de par­ti­cules nocives ont été impor­tantes dans les années quatre-vingt, mais les modèles de véhi­cules pro­duits en 2001 garan­tissent une baisse de 80 à 90 % pour les moteurs à essence : 2,30 g au km de CO2 contre 16 en 1988, 0,20 g d’hy­dro­car­bures imbrû­lés contre 2 g en 1998, 0,15 g d’oxydes d’a­zote contre 3. Et ces teneurs rési­duelles doivent être encore divi­sées par deux dans les modèles de 2006. Certes, quelques véhi­cules de 1988 roulent encore, mais la durée de vie moyenne n’est que de sept ans. Le dom­mage est donc en voie de réduc­tion rapide.

Res­tent les émis­sions de CO2, prin­ci­pal gaz à effet de serre (GES). Chaque litre d’es­sence ou de gas-oil consom­mé pro­duit envi­ron 2,9 kg de GES et les trans­ports rou­tiers sont res­pon­sables de 26 % des émis­sions de GES en France. Le piège à CO2 à la sor­tie du pot d’é­chap­pe­ment, com­pa­tible avec les contraintes d’en­com­bre­ment n’est pas près d’être décou­vert. La seule solu­tion est de réduire la consom­ma­tion de car­bu­rant. On nous annonce en effet la voi­ture à 3 litres aux 100 km, mais pour les dix der­nières années la consom­ma­tion aux 100 km n’a bais­sé que de 8 % alors que la cir­cu­la­tion rou­tière s’ac­crois­sait de 25 %. Face aux direc­tives de Kyo­to, les rou­tiers vivent à l’a­bri de l’éner­gie nucléaire fran­çaise, laquelle est ain­si le « car­bu­rant » presque exclu­sif du trans­port fer­ro­viaire. Nous tou­chons là le talon d’A­chille du trans­port routier.

2) L’insécurité

Mal­gré cer­taines « catas­trophes fer­ro­viaires » mémo­rables le risque de la route est incom­pa­rable avec celui du fer.

Il y a encore 100 000 acci­dents cor­po­rels par an fai­sant plus de 5 000 morts et 20 000 bles­sés graves. Les deux tiers de ces acci­dents sur­viennent en milieu urbain mais ils font trois fois moins de morts qu’en rase cam­pagne. Noter aus­si qu’à kilo­mé­trage égal les poids lourds sus­citent moins d’ac­ci­dents que les véhi­cules légers (un tiers en moins) et qu’ils n’in­ter­viennent que dans 13 % des acci­dents mortels.

Mais le nombre d’ac­ci­dents mor­tels a dimi­nué de moi­tié en vingt ans, mal­gré un accrois­se­ment de cir­cu­la­tion de 60 %.Les règle­ments de sécu­ri­té et la police rou­tière se sont ren­for­cés ; néan­moins il y a encore 1,5 mil­lion de contra­ven­tions pour excès de vitesse, concer­nant majo­ri­tai­re­ment les voi­tures légères. Les poids lourds sont plus contrô­lés que les autres véhicules.

Tous les nou­veaux modèles de véhi­cules lourds sont désor­mais sou­mis, par construc­tion, à une limi­ta­tion de vitesse ; la tolé­rance zéro est appli­quée aux durées de conduite par un même chauf­feur (ce qui n’a pas tou­jours été le cas !). Seule la limite de poids par essieu est dif­fi­cile à contrôler.

Les pro­grès de sécu­ri­té sont donc très impor­tants mais le coût média­tique et poli­cier de la Sécu­ri­té rou­tière est à la charge du contribuable.

3) Crise pétrolière en perspective

Nous tirons des études récentes consa­crées à l’éner­gie une conclu­sion indis­cu­table : le pétrole ne sera pas épui­sé en 2050, mais il sera ven­du très cher par les déten­teurs des gise­ments encore pro­duc­tifs. Néan­moins + 100 % sur le prix pro­duc­teur ne fait que 10 % sur le prix à la pompe, après trans­port, raf­fi­nage, dis­tri­bu­tion et taxa­tion, toutes dépenses qui n’ont pas une rai­son majeure d’augmenter.

La situa­tion serait beau­coup plus grave s’il sur­gis­sait des conflits inter­na­tio­naux cou­pant l’ac­cès de l’Eu­rope aux pays producteurs.

De toute façon il est impé­ra­tif pour l’a­ve­nir du trans­port rou­tier qu’a­vant 2050 un car­bu­rant de rechange éco­no­mi­que­ment accep­table ait été mis au point, et qu’en cas de retard un plan de secours soit pré­pa­ré en envi­sa­geant tous les moyens de trans­port non tou­chés par la pénu­rie de pétrole.

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L’ho­ri­zon du trans­port rou­tier n’est donc pas sans nuages à long terme. Certes, la recherche tech­no­lo­gique est intense sur les prin­ci­paux points noirs, mais les pro­grès sont lents sur deux d’entre eux le CO2 et le car­bu­rant. Nous allons néan­moins sup­po­ser ces pro­blèmes en grande par­tie réso­lus dans l’exa­men des futurs réseaux, rou­tiers et ferroviaires.

Perspectives d’avenir

À moins de blo­cage insur­mon­table, soit par la pénu­rie d’éner­gie, soit par de graves troubles socioé­co­no­miques, il est vrai­sem­blable que la demande de trans­ports dans les pro­chaines décen­nies sera accom­pa­gnée, de façon plus ou moins pro­por­tion­nelle, d’un déve­lop­pe­ment éco­no­mique ralen­ti. La crois­sance à 2 % par an des der­nières décen­nies des­cen­dra vrai­sem­bla­ble­ment au-des­sous de 1,5 %.

Si cette ten­dance se main­tient pen­dant dix à vingt ans, la demande de trans­port dépas­se­ra celle d’au­jourd’­hui de 25 à 30 % (contre + 50 % dans les vingt der­nières années). Par la suite, tout dépen­dra de l’é­co­no­mie euro­péenne et de la recherche sur les carburants.

Exa­mi­nons tout de suite l’in­ci­dence de cette crois­sance à 30 % dans les vingt à vingt-cinq pro­chaines années.

Tendances propres au fret

L’Eurostar.

L’é­vo­lu­tion de notre éco­no­mie de plus en plus déma­té­ria­li­sée entraî­ne­ra une baisse rela­tive des pro­duits pon­dé­reux, aux­quels le rail est le plus adapté.

Par contre le trans­port rou­tier par camion qui a long­temps pra­ti­qué des infrac­tions fla­grantes à la régle­men­ta­tion quant à la limi­ta­tion de la charge par essieu et de la vitesse, et quant au temps de conduite auto­ri­sé, va être obli­gé de s’y sou­mettre par le per­fec­tion­ne­ment des moyens de contrôle. Cette obser­vance risque d’ac­croître son coût jus­qu’à 50 % pour cer­tains trans­por­teurs désin­voltes, qui heu­reu­se­ment sont minoritaires.

Il existe aus­si un ques­tion­ne­ment sur la par­ti­ci­pa­tion des contri­buables au finan­ce­ment des trans­ports de mar­chan­dises : d’une part le fret fer­ro­viaire n’est ven­du qu’à 80 % de son prix de revient (au mieux), d’autre part la dégra­da­tion des routes par les poids lourds est-elle payée à son prix (notam­ment sur les routes sans péage) par les trans­por­teurs rou­tiers ? Les rou­tiers pro­testent qu’ils paient déjà de gros impôts sur leur car­bu­rant et acquittent des péages éle­vés (sur les routes à péage) ; la SNCF invoque la fata­li­té du défi­cit sur le fret fer­ro­viaire dans tous les pays d’Eu­rope. On aime­rait un peu plus de trans­pa­rence sur les prix de revient réels des deux modes de transport.

Tendances propres aux voyageurs

Du côté « route », le déve­lop­pe­ment du parc des voi­tures par­ti­cu­lières (485 VP pour 1 000 habi­tants en 2002) devrait lui aus­si connaître une décé­lé­ra­tion dif­fi­cile à estimer.

Du côté « rail » l’es­sor du TGV se pour­suit et repose sur une demande incon­tes­table. Ce mode de trans­port est d’ailleurs en concur­rence beau­coup plus avec l’a­vion qu’a­vec la route. Le fac­teur essen­tiel en la matière semble être la pos­si­bi­li­té d’un aller et retour dans la jour­née pour les voyages d’af­faires, ce qui laisse la pré­do­mi­nance à l’a­vion au-delà d’une durée de tra­jet de trois heures environ.

Par contre le déclin d’une par­tie des TER fer­ro­viaires paraît irré­ver­sible face à leur coût ; l’ur­gence de rem­pla­cer les lignes défi­ci­taires par des auto­cars, en dégon­flant auprès de l’o­pi­nion publique le sym­bo­lisme sécu­laire du « che­min de fer », com­mence à s’im­po­ser à plu­sieurs Conseils régio­naux. L’in­ci­dence sur le réseau rou­tier sera faible et ne concer­ne­ra que des routes cam­pa­gnardes, géné­ra­le­ment peu chargées.

Les infrastructures

a) Transports routiers

Les engor­ge­ments ne se situent géné­ra­le­ment pas sur les par­cours de rase cam­pagne. La plu­part des auto­routes à 2 x 2 voies sont loin de la satu­ra­tion et, lorsque la néces­si­té s’en fera sen­tir, il sera pos­sible de les por­ter à 2 x 3 voies, voire 2 x 4 voies (dans des cas excep­tion­nels). Or les capa­ci­tés ain­si obte­nues sont consi­dé­rables : envi­ron 80 000 véhicules/jour à 2 x 3 voies et 110 000 à 2 x 4 voies.

À titre de com­pa­rai­son, le tra­fic jour­na­lier moyen sur l’axe Lille-Paris-Lyon-Mar­seille, un des plus char­gés de France, est actuel­le­ment de 42 000 véhicules/jour (dont 19 % de poids lourds). De plus de tels inves­tis­se­ments sont rapi­de­ment ren­ta­bi­li­sés si leur calen­drier est har­mo­ni­sé avec l’é­vo­lu­tion de la demande. Ceux qui le seront plus dif­fi­ci­le­ment seront quand même néces­saires pour désen­cla­ver les régions fran­çaises défavorisées.

La ques­tion est plus com­plexe en zone sub­ur­baine et a for­tio­ri urbaine, où tout inves­tis­se­ment de capa­ci­té est sou­mis à la triple condi­tion de ges­tion des contraintes topo­gra­phiques, de cou­ver­ture des coûts (par­ti­cu­liè­re­ment éle­vés) et d’ac­cep­ta­bi­li­té sociale, cette der­nière ten­dant d’ailleurs à deve­nir de plus en plus pré­do­mi­nante et à néces­si­ter des ouvrages très coû­teux (sou­ter­rains). Les rocades concen­triques devront se mul­ti­plier ain­si que les entre­pôts et les par­kings en tête de ligne des réseaux urbains (rou­tiers, ou ferroviaires).

Mais n’est-ce pas le gigan­tisme des villes qui est en cause ?

b) Transports ferroviaires

Le suc­cès du fer­ro­viaire – voya­geurs en milieu urbain – sou­ter­rain et aérien – est mani­feste ; son exten­sion est sou­hai­table sous réserve d’une pré­vi­sion réa­liste de la clien­tèle atten­due. Les réseaux de sur­face (tram­ways) sont plus contes­tés : ils visent sur­tout à dis­sua­der les voi­tures par­ti­cu­lières de péné­trer en ville ; à long terme c’est peut-être très effi­cace, mais au détri­ment de cer­taines acti­vi­tés urbaines.

Mais c’est avec le fret que le rail est en dif­fi­cul­té, en zone urbaine comme sur les par­cours inter­villes. De gros inves­tis­se­ments seraient néces­saires pour des­ser­vir les zones encom­brées et leur finan­ce­ment serait très pro­blé­ma­tique, compte tenu du défi­cit chro­nique de l’ac­ti­vi­té fret à la SNCF.

En outre l’im­bri­ca­tion des tra­fics « fret » et « voya­geurs » ne sim­pli­fie pas le pro­blème. C’est pour­quoi l’i­dée a été émise de créer, au moins pour cer­tains cas, des lignes dédiées au fret. Cela devien­drait néces­saire si le tra­fic rou­tier se trou­vait hors course. Ce n’est pas le cas, mais des réa­li­sa­tions du même ordre sont conce­vables par spé­cia­li­sa­tion de lignes exis­tantes telles que celles de la rive droite du Rhône.

Quant aux lignes exclu­si­ve­ment TER, il paraît évident que, à la demande des Conseils régio­naux, les moins uti­li­sées devront être trans­for­mées en lignes d’au­to­cars, ou à la limite lais­sées à la voi­ture particulière.

Enfin il n’est pas pos­sible de pas­ser sous silence les lour­deurs que la SNCF doit à son pas­sé. Il lui est par exemple dif­fi­cile d’être com­pé­ti­tive avec des conduc­teurs de train, qui coûtent, par kilo­mètre par­cou­ru, sept fois plus cher que les chauf­feurs de poids lourds en règle avec la légis­la­tion routière.

Ses rigi­di­tés lui inter­disent aus­si de s’a­dap­ter à cer­taines contraintes des char­geurs de fret comme le font des socié­tés fer­ro­viaires auto­nomes bri­tan­niques ou japonaises.

Nous allons retrou­ver ce pro­blème à pro­pos du trans­port com­bi­né rail-route.

c) Transports combinés

Il y a long­temps que l’on charge des conte­neurs sur des wagons – pla­te­formes et qu’on les décharge à la gare d’ar­ri­vée, le Ser­nam pou­vant assu­rer la navette entre gares et domi­ciles. C’est ain­si que la SNCF réa­lise le quart de son fret.

Mais le semi-remorque rou­tier assu­rant le porte à porte d’un domi­cile à l’autre est très sou­vent pré­fé­ré à ce « trans­port com­bi­né », pour des rai­sons de com­mo­di­té, de rapi­di­té et de coût.

Aus­si la SNCF a pré­vu des ins­tal­la­tions de char­ge­ment-déchar­ge­ment syn­chro­ni­sées avec les horaires de trains, qui atté­nue­ront les incon­vé­nients du sys­tème. Mais en fait celui-ci ne convien­dra qu’à des par­cours d’au moins 500 kilomètres.

Le trans­port du camion entier a éga­le­ment été évo­qué bien que le gaba­rit des che­mins de fer fran­çais ne per­mette pas de char­ger des convois rou­tiers clas­siques sur des wagons classiques.

Ce mode de trans­port sup­pose donc d’u­ti­li­ser soit une ligne nou­velle (cas de la liai­son trans-Manche) soit des wagons spé­ciaux, dont le coût grè­ve­rait encore un mode de trans­port déjà très oné­reux par lui-même. Les quelques exemples exis­tants ou en cours de réa­li­sa­tion, en Suisse et en Autriche, sont favo­ri­sés par des contraintes régle­men­taires fortes et des sub­ven­tions consi­dé­rables, pour de courts trajets.

Dans une pers­pec­tive à très long terme, on ne peut cepen­dant exclure tota­le­ment le recours à un tel scé­na­rio si les contraintes phy­siques envi­ron­ne­men­tales ou éco­no­miques pesant sur le trans­port rou­tier venaient à connaître une forte accen­tua­tion. Il ne s’a­git évi­dem­ment pas aujourd’­hui d’une priorité.

Conclusion

Il appa­raît vrai­sem­blable que notre sys­tème de trans­ports ne sera pas très dif­fé­rent de la situa­tion actuelle à échéance du milieu du siècle (ce qui n’ex­clut pas l’oc­cur­rence de ten­dances dif­fé­rentes à plus long terme).

Le trans­port rou­tier de mar­chan­dises conser­ve­ra sa pré­do­mi­nance, et il est trop tard pour rêver d’un équi­li­brage rail-route. Mais des solu­tions de secours doivent conti­nuer à être recher­chées dans le fer­ro­viaire en cas de catas­trophe nationale.

Les TGV conso­li­de­ront et péren­ni­se­ront leur suc­cès déjà bien amor­cé, en lais­sant tou­te­fois sa place à l’a­vion pour les très grandes distances.

Le réseau fer­ré se concen­tre­ra sur un kilo­mé­trage plus faible qu’à l’heure actuelle, ce qui n’im­plique pas néces­sai­re­ment une réduc­tion de son acti­vi­té globale.

Une par­tie des TER sera trans­fé­rée sur route, ce qui assu­re­ra un meilleur niveau de ser­vice et la péren­ni­té finan­cière de ces liai­sons. Le parc auto­mo­bile s’ac­croî­tra de ce fait modé­ré­ment et de même la cir­cu­la­tion des voi­tures particulières.

Les inves­tis­se­ments rou­tiers, y com­pris dans des régions à faible den­si­té de popu­la­tion, ne doivent donc pas être freinés.

Ce pro­nos­tic n’est pas une pré­co­ni­sa­tion, mais il cor­res­pond mani­fes­te­ment à la pré­fé­rence des Fran­çais en ce qui concerne leurs dépla­ce­ments per­son­nels, et à la pré­fé­rence des acteurs éco­no­miques en ce qui concerne la marche de leurs entreprises.

Le dan­ger à terme ne réside pas dans le « dés­équi­libre » rail-route, mais dans la grande consom­ma­tion de trans­ports que notre sys­tème éco­no­mique exige. Si de grosses per­tur­ba­tions socioé­co­no­miques sur­ve­naient (elles n’ont pas man­qué au XXe siècle), la popu­la­tion rési­dant sur notre ter­ri­toire serait ame­née à vivre plus loca­le­ment en rédui­sant l’am­pleur de ses échanges de pays à pays et de région à région. Il en serait de même si l’éner­gie consom­mée par les trans­ports deve­nait rare et chère. Mais même dans ce cas-là, la route serait un outil plus adap­table que le rail.

Enfin nous sommes conscients d’a­voir lais­sé de côté les pos­si­bi­li­tés de trans­ports par voie d’eau et par voie aérienne. Sur cette der­nière des inno­va­tions impor­tantes seront cer­tai­ne­ment appor­tées, sa place sur les longues dis­tances doit augmenter.

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1.
Les chiffres avan­cés dans cet article pro­viennent pour la plu­part du fas­ci­cule Sta­tis­tiques du Trans­port en France publié en octobre 2004 d’a­près les sources INSEE.

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