Quoi de neuf, docteurs ?
Dominique Grésillon, directeur de l’École doctorale, défend la recherche institutionnelle publique (dont un pays ne peut pas se passer) mais incite les étudiants à élargir leur horizon au monde de l’entreprise, qu’ils connaissent pour le moment assez peu.
© X‑AUDIOVISUEL-PHILIPPE LAVIALLE
Depuis 1985, Polytechnique est habilitée à délivrer des diplômes de doctorat. Auparavant, il y avait, dans les laboratoires de l’École, des étudiants en thèse qui dépendaient d’Orsay, de Paris VI, de Paris VII, etc. Depuis, l’École attire un nombre croissant de doctorants qui s’inscrivent en thèse à l’X.
Ces doctorants se sont trouvés sous la responsabilité d’un service qui s’est appelé “ études doctorales ”, puis d’une direction, “ la direction du troisième cycle ”, qui s’intitule aujourd’hui “direction de l’École doctorale de l’X ”.
Pour l’année 2001–2002, 32 DEA existent sous la cotutelle de l’X et d’une université ou grande école partenaire. 117 étudiants sont inscrits dans ces DEA et 281 sont en première, deuxième ou troisième année de thèse. Ces étudiants sont, pour 40 % d’entre eux, d’anciens élèves ingénieurs de l’X et viennent, pour les autres, d’établissements différents. Quelles sont les opportunités qui s’ouvrent à eux une fois obtenu leur diplôme de thèse ?
Post-doc or not post-doc ?
Dominique Grésillon, qui dirige l’École doctorale, aborde la question du “ post-doc ”, ce complément de formation dans lequel s’engagent plusieurs d’entre eux : “ On sait que les jeunes docteurs qui se destinent à une carrière dans la recherche publique doivent faire la preuve de leur qualité non seulement par des publications mais aussi par une mobilité dans plusieurs instituts de recherche, si possible internationaux.
C’est le but des stages “post-doc”. Cette phase de la carrière est particulièrement riche, par l’expérience qu’elle donne au chercheur et par sa productivité. C’est sans doute l’une des phases où la productivité du chercheur est maximale.
Mais cette richesse a aussi un coût. Les conditions financières ou statutaires sont irrégulières. C’est pourquoi un certain nombre de docteurs ne prennent pas cette voie et se voient offrir une situation stable dès la thèse. ”
Anna Fontcuberta, présidente pendant l’année 2000 d’X’Doc, l’association des doctorants de l’X, est aujourd’hui en post-doc à Caltech, aux États-Unis.
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L’École doctorale a réalisé une enquête sur la situation des docteurs de l’X aussitôt après leur soutenance. Cette enquête a été menée auprès des 267 étudiants ayant soutenu leurs thèses de l’année scolaire 1996–1997 à l’année scolaire 1999–2000. L’analyse des réponses que les 3⁄4 d’entre eux ont bien voulu fournir permet de ranger ces docteurs de l’X dans deux grandes catégories : les 60 % qui ont eu une situation statutaire stable au lendemain de leur thèse et les 40% qui ont opté pour un stage post-doc ou assimilé.
Parmi ceux figurant en situation stable, certains sont dans l’enseignement ou la recherche publique : l’approfondissement du post-doc n’est pas indispensable pour intégrer ces emplois. Mais d’autres doivent la stabilité de leur situation à un emploi dans le monde de l’entreprise.
L’École doctorale mène depuis plusieurs années une campagne d’information sur ces débouchés existant dans le privé. Il y a cinq ans, l’équipe de l’École doctorale et Claude Weisbuch du labo PMC ont mis sur pied, avec plusieurs formateurs extérieurs, des sessions de préparation à l’insertion professionnelle et d’initiation au monde de l’entreprise : les “ Doctoriales ”. Leur succès va croissant.
Dominique Grésillon explique cette démarche : “L’idée communément associée à l’industrie était peut-être autrefois celle du travail à la chaîne. Mais aujourd’hui les entreprises qui marchent sont celles qui savent innover. Les doctorants ont donc un rôle déterminant à jouer dans la réussite d’une économie. Mais ils n’ont pas toujours conscience de ce potentiel. Depuis cinq ans, les Doctoriales les sensibilisent à la valeur qu’ils peuvent apporter à un projet d’équipe. Ils s’en rendent compte lors des activités qui y sont organisées : visites d’entreprises, simulations de création de start-up, discussions avec d’anciens doctorants venus témoigner de leur expérience en entreprise.
En ce moment, les industriels, qui ont embauché un certain nombre de docteurs pendant la période de croissance récente, s’aperçoivent que ces diplômés sont très appréciables. ”
Est-ce à dire que le monde de la recherche publique est en train d’abdiquer en faveur du privé ? “La recherche institutionnelle publique, c’est une chance extraordinaire de la France, répond Dominique Grésillon. Il faut encourager les doctorants qui veulent faire leur carrière dans la recherche fondamentale.
Mais il y a des opportunités à saisir autre part. Je pense d’ailleurs qu’aucun chercheur, ni dans le public ni dans le privé, ne peut faire son métier sans être concerné par le retentissement économique et social de son travail : l’échéance est plus rapide dans l’industrie mais le CNRS ne mise pas sur les secteurs qui ne seront pas porteurs dans les dizaines d’années qui viennent. ”
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