RATP : des engagements ambitieux en faveur de la neutralité carbone
Mobilité électrique, transition énergétique des flottes, réduction des émissions de gaz à effet de serre, performance et sobriété énergétique, lutte contre le réchauffement climatique… sont au cœur de la stratégie du groupe RATP pour contribuer à relever les grands défis climatiques et énergétiques de demain. Le point avec Sophie Mazoué, responsable du développement durable du groupe RATP.
Comment appréhendez-vous la question de la neutralité carbone et, dans ce cadre, quelles sont les grandes lignes de votre stratégie en la matière ?
Comme le souligne le rapport du GIEC, le climat représente un enjeu crucial et il nous faut atteindre dès 2050 la neutralité carbone. Les transformations à mener sont majeures, alors que chacun doit se mobiliser à son niveau : l’État, les collectivités territoriales, les entreprises et les citoyens. C’est dans ce cadre que le groupe RATP a pris de nombreux engagements en faveur de la neutralité carbone. Nous sommes avant tout un Groupe au service de la ville, et de par notre ADN, nous sommes en première ligne dans la lutte contre le changement climatique. En effet, à l’échelle de la planète, les émissions de gaz à effet de serre des villes représentent 70 % des émissions de la planète. Et le transport est la première cause de ces émissions en France.
En 2021, le Groupe a donc réaffirmé son engagement à contribuer à la neutralité carbone et structure ainsi son action autour de deux leviers :
- participer à la décarbonation en offrant des services bas carbone : sur un même trajet, nous émettons 60 fois moins d’émissions de gaz à effet de serre en prenant le métro, le RER ou le tramway qu’en voiture individuelle. Nous aidons ainsi nos clients à réduire leur empreinte carbone en mettant à leur disposition des services de mobilité bas carbone, attractifs et accessibles à tous ;
- poursuivre nos efforts en termes de réduction de nos propres émissions en mobilisant l’ensemble de notre écosystème (nos collaborateurs, nos fournisseurs, nos partenaires industriels). Dans cette démarche, nous actionnons plusieurs leviers dont l’énergie afin de pouvoir agir sur notre sobriété et performance énergétique. En 2021, la RATP a réaffirmé sa volonté de réduire de 50 % ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2025 par rapport à 2015. Pour ce faire, nous déployons des systèmes de management de l’énergie. Nous sommes, d’ailleurs, le premier opérateur multimodal à avoir obtenu la certification ISO 50 001 sur le management de l’énergie en 2017. Nous l’avons, par ailleurs, renouvelée en 2020. En parallèle, nous travaillons sur l’efficacité et la sobriété énergetique. Au niveau des achats, nous intégrons des critères « carbone » dans nos marchés de matériels roulants notamment et envisageons d’en faire de même dans l’instruction des investissements. Enfin, au quotidien ce sont nos 69 000 collaborateurs qui sont mobilisés sur ces enjeux.
En interne et sur le terrain, comment cela se traduit-il ? Quelles actions déployez-vous en ce sens ? Pouvez-vous nous donner des exemples ?
L’ensemble de nos activités ont vocation à contribuer à nos efforts pour diminuer notre consommation énergétique et nos émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, avec Île-de-France Mobilités, nous développons un projet majeur visant à convertir notre flotte de 4 800 bus à une énergie propre d’ici 2025. Ce projet inédit et sans équivalent en Europe vise à convertir notre flotte pour moitié en bus électrique et l’autre au bioGNV. À terme, c’est 240 000 tonnes de CO2 équivalent qui vont ainsi être évitées chaque année grâce à ce programme Bus 2025.
Pour le matériel roulant ferré, nous systématisons la récupération d’énergie au freinage et les dispositifs de restitution d’énergie. Nous équipons tous nos nouveaux matériels en ce sens.
La poursuite du déploiement d’un nouveau matériel sur la ligne 14 du métro permettra ainsi de réduire de 17 % la consommation énergétique des rames (par rapport au train de dernière génération) grâce à ce système de freinage électrique avec récupération d’énergie, à une motorisation plus performante et à un éclairage intégralement assuré par LED.
Dans nos bâtiments, nous mettons en œuvre des actions de sobriété qui ont permis à fin 2021 de réduire de plus de 10 % la consommation de nos sites industriels par rapport à 2015. En outre, nous étudions systématiquement la possibilité de recourir aux énergies renouvelables. Dans cette logique, nous avons recours au Power Purchase Agreement (PPA), un contrat qui permet d’acheter directement de l’énergie auprès d’un producteur d’énergie renouvelable. En 2020, nous avons signé un premier PPA d’électricité verte avec EDF pour une durée de trois ans qui nous permet de couvrir 4 % de notre consommation annuelle d’énergie. Pour ce faire, EDF met à notre disposition cinq parcs éoliens. Nous venons de signer un PPA additionnel pour de l’énergie solaire afin de couvrir 6 % de notre consommation annuelle d’électricité.
Notre objectif est de réduire de 50 % nos émissions de gaz à effet de serre sur la prochaine décennie.
Vous travaillez également sur une politique transverse sur le climat. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Si nous déployons des actions pour cibler toutes les thématiques environnementales, nous avons toutefois souhaité faire du climat une priorité et aligner nos engagements et actions en la matière avec la Stratégie Nationale Bas Carbone qui définit les trajectoires par secteur afin d’atteindre la neutralité carbone. C’est aussi une illustration concrète de l’importance que nous accordons à ce sujet.
Notre feuille de route s’articule ainsi autour de diverses orientations dont :
- la réduction des gaz à effet de serre générés directement ou pas par notre activité via des actions ciblées avec un focus sur l’énergie, qui est notre première source d’émission directe, au travers d’un travail sur les achats et les investissements ;
- aider nos clients dans leur transition bas carbone, c’est-à-dire nos voyageurs, les autorités organisatrices des mobilités, les collectivités territoriales, en développant des services bas carbone qui vont permettre aux villes, de manière plus globale de lutter contre le changement climatique.
Nous nous préparons aussi au changement climatique en développant des solutions d’adaptation. Si notre priorité reste la neutralité carbone, il nous faut tout de même anticiper les répercussions du changement climatique : pics de forte chaleur, inondations… Et nos activités sont plus particulièrement exposées au risque d’inondation de nos réseaux souterrains. Depuis les années 2000, nous travaillons sur cet axe afin de préserver nos installations et favoriser la reprise rapide de l’exploitation après une crue, par exemple.
Nous entendons de plus en plus que l’hydrogène va jouer un rôle important. Qu’en est-il pour la RATP ?
À l’heure actuelle, le développement et le déploiement hydrogène dans les transports en commun doit relever plusieurs défis :
- la génération d’hydrogène vert/renouvelable : pour tenir les engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre et proposer une alternative plus intéressante que le bioGNV, l’hydrogène produit doit être vert. Cela permettra aussi d’apporter une solution pour absorber l’intermittence des énergies renouvelables ;
- l’approvisionnement et le stockage : aujourd’hui, on recense trop peu de points de recharge. Pour un acteur comme la RATP, il faut trouver un compromis entre la génération de l’hydrogène dans nos centres ou dans des sites avec une proximité immédiate. Cela impose des contraintes sur nos installations classiques en termes de protection de l’environnement, alors que si la production se fait hors site, il faudra garantir le transport de l’hydrogène avec des moyens décarbonés pour faire sens ;
- le coût : le surcoût pour l’acquisition d’un bus hydrogène est très important. Il faut compter 150 000 euros de plus pour un bus électrique et 400 000 euros de plus qu’un bus au gaz.
Pour relever l’ensemble de ces défis, il nous faut pouvoir mettre en place des consortiums, dépasser les clivages en associant les énergéticiens, les opérateurs de transport, les gestionnaires de déchets…
Plus particulièrement, sur la question de l’hydrogène, nous avons opté pour une démarche progressive. Nous menons actuellement des tests avec un premier bus à La Roche-sur-Yon pour mieux connaître et appréhender cette technologie et sommes impliqués dans plusieurs projets de transition énergétique de flotte de bus, dont une partie à l’hydrogène à Lorient et en Île-de-France.