Réaffirmer la contribution de l’expérience client dans l’économie française
Faire de l’expérience client une discipline instituée, vectrice de valeur, de sens et de performance pour les entreprises, et promouvoir des standards d’excellence et d’éthique relationnelle, voilà les missions que s’est assignée l’Association Française de la Relation Client (AFRC). Entretien avec Éric Dadian, Membre Fondateur & Président.
À quels objectifs initiaux entendait répondre la création de l’AFRC ?
Créée en 1998, initialement pour restructurer le secteur émergent des centres de contacts, alors peu connu et décrié, l’AFRC est devenue au fur et à mesure des innovations technologiques, un lieu d’échange et de partage sur les bonnes pratiques en matière de relation client et le principal think tank de l’expérience client. C’est ainsi qu’aujourd’hui, sur les 4 « p » qui fondent le mix marketing (prix, produit, promotion, placement), l’expérience client est jugée par bien des dirigeants d’entreprises plus différenciante encore que le prix et le produit. À ce titre, veiller à ce que l’expérience client soit reconnue comme une discipline et une valeur d’entreprise, est au cœur de notre action. Cette conviction est désormais partagée par les grandes marques. Coca-Cola a ainsi créé une direction client et Club Med a invité des clients (« Gentils membres ») à participer à son comité de direction.
Qui fédérez-vous ?
Nous sommes forts de 3500 membres qui représentent environ 300 entreprises adhérentes, à la fois grandes marques, PME, start-ups, offreurs de solutions technologiques où organisationnelles.
Nous représentons 300 000 emplois, quand l’Allemagne en compte 800 000 et l’Angleterre 1,2 million, un différentiel qui s’explique notamment par la rigidité du code du travail français et l’interdiction maintenue de travailler le dimanche alors même que les téléconseillers y seraient plutôt favorables.
Observez-vous une montée en gamme des savoir-faire des téléconseillers ?
Les canaux d’interaction entre les marques et les clients se sont multipliés complexifiant de fait le travail des téléconseillers. Téléphone, courriel, SMS, chat, réseaux sociaux, forum, chatbot, visioconférence, assistants vocaux, metaverse…
Cette diversité d’outils les pousse à être bien plus polyvalents et dotés de compétences et d’expertises plus étendues face à des clients toujours plus informés.
Toutefois, là où auparavant le téléconseiller devait ouvrir en parallèle de nombreuses bases de données, utiliser des ERP, des outils de gestion de la relation client (CRM) et d’historisation des contacts, les machines et logiciels sont désormais bien plus simples à utiliser et permettent par exemple au téléconseiller de pousser automatiquement, quand il en a besoin, une expertise ou une notice technique avant de l’envoyer par SMS ou par mail.
Comment les technologies ont-elles fait évoluer vos métiers ?
Les mutations ont commencé avec l’Automatic Call Distribution (ACD), un outil d’automatisation des flux téléphoniques et de routage intelligent qui permettait de distribuer les appels en fonction des volumes. La naissance d’internet, en 1995, et le couplage téléphonie-informatique (CTI), en 2000, ont accéléré les évolutions. Mais c’est avec l’arrivée du smartphone, en 2007, que notre secteur a connu sa véritable révolution. En effet, dès lors qu’il a pu donner directement son avis sur un bien ou un service et influer sur sa communauté, le client a pris le pouvoir sur la marque. Influenceur ou détracteur, il est devenu un média et a pu, via son smartphone, nuire à une marque ou la plébisciter.
“Veiller à ce que l’expérience client soit reconnue comme une discipline et une valeur d’entreprise, est au cœur de notre action. Cette conviction est désormais partagée par les grandes marques.”
Enfin, 2017 a vu le développement de l’intelligence artificielle dans notre secteur. Elle permet d’interagir en self-service avec un consommateur à l’aide de nombreux outils et algorithmes (bots, assistants vocaux, robots physiques…). Mais ces outils, une fois leur part de tâche achevée, sont appelés à laisser la place à l’humain. Certains téléconseillers, véritables superviseurs de bots, reprennent d’ailleurs la main dès lors que l’outil ne sait plus répondre. Ces possibilités ne cessent d’enrichir le parcours client. En effet, même si les bots, « agents robots » apprenant dotés d’une capacité élevée à mémoriser les comportements, vont s’améliorer au fil du temps et apporter à l’utilisateur des réponses toujours plus adaptées, rien ne remplacera un téléconseiller. Capable de se concentrer sur des requêtes complexes qui nécessitent une capacité d’analyse importante, son intelligence, son empathie, sa faculté d’écoute lui permettent une compréhension fine et la capacité de répondre en faisant passer de l’émotion et de la réassurance. Ces besoins se sont fortement exacerbés avec la crise Covid qui a aussi renforcé l’hybridation de l’humain avec du digital et l’intérêt pour les circuits courts et la préférence pour choisir la proximité, plus respectueux de la planète.
Pour permettre davantage de souplesse, les emplois du secteur ont été fortement délocalisés. Les clients le déplorent-ils ?
Les équilibres économiques et les contraintes réglementaires obligent les entreprises à trouver des solutions, mais certains clients aspirent à plus de proximité, à une parfaite compréhension intellectuelle de leur demande et sont de plus en plus sensibles aux arguments de patriotisme économique.
La notion de provenance d’un service au client est donc devenue un critère de décision de consommation important et un outil de différenciation non négligeable pour les entreprises. C’est pourquoi, nous avons développé une certification qui valorise les entreprises s’engageant dans les territoires avec un service client 100% en France. Baptisée « Relation Client France », elle atteste que 100% de la main d’œuvre concourant à la réalisation de la prestation de contact client, qu’elle soit internalisée ou sous-traitée, est soumise à des contrats de travail de droit français.
Avec cette certification, nous avons fait mouche car bien des marques ont fait le choix de s’implanter dans des territoires et des zones rurales pour y développer ou maintenir l’emploi, valoriser des métiers, et créer de la valeur par la proximité avec les consommateurs.
En 2021, 12 marques se sont fait certifier par un audit réalisé par l’AFNOR (EDF, Edenred, MAIF, MACIF, Gaz Européen, Homeserve, Leroy Merlin, Boulanger, Sanofi, Leocare, O2, UNEO…). En 2022, une trentaine souhaitent déjà postuler.
Nous nous sommes associés à Pro France, association qui promeut la marque France, pour faire du label Origine France Garantie une référence de qualité et de confiance pour le consommateur. C’est pour nous un engagement fort que nous voulons valoriser, et pour les clients une vraie marque de garantie. Elle se décline en deux logos : AFRC 100 % Relation client et Service France garantie que les marques utilisent pour leur communication.
Que récompensent vos Palmes de la Relation Client ?
Elles distinguent les entreprises les plus exemplaires dans différentes catégories :
- La Palme Expérience Client récompense une entreprise qui a fait évoluer sa stratégie afin de placer le client au cœur de sa vision (en termes de simplification, fluidité, posture, etc.).
- La Palme Expérience Citoyen distingue des services publics dans leur capacité à innover et à apporter aux citoyens le même niveau de service et d’expérience citoyen que les entreprises privées.
- La Palme Engagement vise à récompenser les initiatives exemplaires en matière d’engagement des équipes (management, symétrie des attentions et satisfaction collaborateur).
- La Palme Transformation par l’Expérience Client distingue les entreprises qui ont su se transformer en mettant le client au cœur de leur stratégie.
- La Palme Jeune Pousse récompense une start-up innovante dont l’approche disruptive génère de la création de valeur en matière de technologie sur l’expérience client.
- Enfin, la Palme du Directeur Client de l’année récompense une excellence managériale, une force d’innovation et une capacité à conduire et fédérer les équipes dans la transformation de l’organisation.