Réaffirmer la contribution de l’expérience client dans l’économie française

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°776 Juin 2022
Par Éric DADIAN

Faire de l’expérience client une dis­ci­pline ins­ti­tuée, vec­trice de valeur, de sens et de per­for­mance pour les entre­prises, et pro­mou­voir des stan­dards d’excellence et d’éthique rela­tion­nelle, voi­là les mis­sions que s’est assi­gnée l’Asso­cia­tion Fran­çaise de la Rela­tion Client (AFRC). Entre­tien avec Éric Dadian, Membre Fon­da­teur & Président.

À quels objectifs initiaux entendait répondre la création de l’AFRC ?

Créée en 1998, ini­tia­le­ment pour restruc­tu­rer le sec­teur émergent des centres de contacts, alors peu connu et décrié, l’AFRC est deve­nue au fur et à mesure des inno­va­tions tech­no­lo­giques, un lieu d’échange et de par­tage sur les bonnes pra­tiques en matière de rela­tion client et le prin­ci­pal think tank de l’expérience client. C’est ain­si qu’aujourd’hui, sur les 4 « p » qui fondent le mix mar­ke­ting (prix, pro­duit, pro­mo­tion, pla­ce­ment), l’expérience client est jugée par bien des diri­geants d’entreprises plus dif­fé­ren­ciante encore que le prix et le pro­duit. À ce titre, veiller à ce que l’expérience client soit recon­nue comme une dis­ci­pline et une valeur d’entreprise, est au cœur de notre action. Cette convic­tion est désor­mais par­ta­gée par les grandes marques. Coca-Cola a ain­si créé une direc­tion client et Club Med a invi­té des clients (« Gen­tils membres ») à par­ti­ci­per à son comi­té de direction. 

Qui fédérez-vous ?

Nous sommes forts de 3500 membres qui repré­sentent envi­ron 300 entre­prises adhé­rentes, à la fois grandes marques, PME, start-ups, offreurs de solu­tions tech­no­lo­giques où organisationnelles. 

Nous repré­sen­tons 300 000 emplois, quand l’Allemagne en compte 800 000 et l’Angleterre 1,2 mil­lion, un dif­fé­ren­tiel qui s’explique notam­ment par la rigi­di­té du code du tra­vail fran­çais et l’interdiction main­te­nue de tra­vailler le dimanche alors même que les télé­con­seillers y seraient plu­tôt favorables.

Observez-vous une montée en gamme des savoir-faire des téléconseillers ?

Les canaux d’interaction entre les marques et les clients se sont mul­ti­pliés com­plexi­fiant de fait le tra­vail des télé­con­seillers. Télé­phone, cour­riel, SMS, chat, réseaux sociaux, forum, chat­bot, visio­con­fé­rence, assis­tants vocaux, metaverse… 

Cette diver­si­té d’outils les pousse à être bien plus poly­va­lents et dotés de com­pé­tences et d’expertises plus éten­dues face à des clients tou­jours plus informés. 

Tou­te­fois, là où aupa­ra­vant le télé­con­seiller devait ouvrir en paral­lèle de nom­breuses bases de don­nées, uti­li­ser des ERP, des outils de ges­tion de la rela­tion client (CRM) et d’historisation des contacts, les machines et logi­ciels sont désor­mais bien plus simples à uti­li­ser et per­mettent par exemple au télé­con­seiller de pous­ser auto­ma­ti­que­ment, quand il en a besoin, une exper­tise ou une notice tech­nique avant de l’envoyer par SMS ou par mail. 

Comment les technologies ont-elles fait évoluer vos métiers ?

Les muta­tions ont com­men­cé avec l’Automatic Call Dis­tri­bu­tion (ACD), un outil d’automatisation des flux télé­pho­niques et de rou­tage intel­li­gent qui per­met­tait de dis­tri­buer les appels en fonc­tion des volumes. La nais­sance d’internet, en 1995, et le cou­plage télé­pho­nie-infor­ma­tique (CTI), en 2000, ont accé­lé­ré les évo­lu­tions. Mais c’est avec l’arrivée du smart­phone, en 2007, que notre sec­teur a connu sa véri­table révo­lu­tion. En effet, dès lors qu’il a pu don­ner direc­te­ment son avis sur un bien ou un ser­vice et influer sur sa com­mu­nau­té, le client a pris le pou­voir sur la marque. Influen­ceur ou détrac­teur, il est deve­nu un média et a pu, via son smart­phone, nuire à une marque ou la plébisciter.

“Veiller à ce que l’expérience client soit reconnue comme une discipline et une valeur d’entreprise, est au cœur de notre action. Cette conviction est désormais partagée par les grandes marques.”

Enfin, 2017 a vu le déve­lop­pe­ment de l’intelligence arti­fi­cielle dans notre sec­teur. Elle per­met d’interagir en self-ser­vice avec un consom­ma­teur à l’aide de nom­breux outils et algo­rithmes (bots, assis­tants vocaux, robots phy­siques…). Mais ces outils, une fois leur part de tâche ache­vée, sont appe­lés à lais­ser la place à l’humain. Cer­tains télé­con­seillers, véri­tables super­vi­seurs de bots, reprennent d’ailleurs la main dès lors que l’outil ne sait plus répondre. Ces pos­si­bi­li­tés ne cessent d’enrichir le par­cours client. En effet, même si les bots, « agents robots » appre­nant dotés d’une capa­ci­té éle­vée à mémo­ri­ser les com­por­te­ments, vont s’améliorer au fil du temps et appor­ter à l’utilisateur des réponses tou­jours plus adap­tées, rien ne rem­pla­ce­ra un télé­con­seiller. Capable de se concen­trer sur des requêtes com­plexes qui néces­sitent une capa­ci­té d’analyse impor­tante, son intel­li­gence, son empa­thie, sa facul­té d’écoute lui per­mettent une com­pré­hen­sion fine et la capa­ci­té de répondre en fai­sant pas­ser de l’émotion et de la réas­su­rance. Ces besoins se sont for­te­ment exa­cer­bés avec la crise Covid qui a aus­si ren­for­cé l’hybridation de l’humain avec du digi­tal et l’intérêt pour les cir­cuits courts et la pré­fé­rence pour choi­sir la proxi­mi­té, plus res­pec­tueux de la planète.

Pour permettre davantage de souplesse, les emplois du secteur ont été fortement délocalisés. Les clients le déplorent-ils ?

Les équi­libres éco­no­miques et les contraintes régle­men­taires obligent les entre­prises à trou­ver des solu­tions, mais cer­tains clients aspirent à plus de proxi­mi­té, à une par­faite com­pré­hen­sion intel­lec­tuelle de leur demande et sont de plus en plus sen­sibles aux argu­ments de patrio­tisme économique. 

La notion de pro­ve­nance d’un ser­vice au client est donc deve­nue un cri­tère de déci­sion de consom­ma­tion impor­tant et un outil de dif­fé­ren­cia­tion non négli­geable pour les entre­prises. C’est pour­quoi, nous avons déve­lop­pé une cer­ti­fi­ca­tion qui valo­rise les entre­prises s’engageant dans les ter­ri­toires avec un ser­vice client 100% en France. Bap­ti­sée « Rela­tion Client France », elle atteste que 100% de la main d’œuvre concou­rant à la réa­li­sa­tion de la pres­ta­tion de contact client, qu’elle soit inter­na­li­sée ou sous-trai­tée, est sou­mise à des contrats de tra­vail de droit français.

Avec cette cer­ti­fi­ca­tion, nous avons fait mouche car bien des marques ont fait le choix de s’implanter dans des ter­ri­toires et des zones rurales pour y déve­lop­per ou main­te­nir l’emploi, valo­ri­ser des métiers, et créer de la valeur par la proxi­mi­té avec les consommateurs.

En 2021, 12 marques se sont fait cer­ti­fier par un audit réa­li­sé par l’AFNOR (EDF, Eden­red, MAIF, MACIF, Gaz Euro­péen, Home­serve, Leroy Mer­lin, Bou­lan­ger, Sano­fi, Leo­care, O2, UNEO…). En 2022, une tren­taine sou­haitent déjà postuler. 

Nous nous sommes asso­ciés à Pro France, asso­cia­tion qui pro­meut la marque France, pour faire du label Ori­gine France Garan­tie une réfé­rence de qua­li­té et de confiance pour le consom­ma­teur. C’est pour nous un enga­ge­ment fort que nous vou­lons valo­ri­ser, et pour les clients une vraie marque de garan­tie. Elle se décline en deux logos : AFRC 100 % Rela­tion client et Ser­vice France garan­tie que les marques uti­lisent pour leur communication.

Que récompensent vos Palmes de la Relation Client ?

Elles dis­tinguent les entre­prises les plus exem­plaires dans dif­fé­rentes catégories : 

  • La Palme Expé­rience Client récom­pense une entre­prise qui a fait évo­luer sa stra­té­gie afin de pla­cer le client au cœur de sa vision (en termes de sim­pli­fi­ca­tion, flui­di­té, pos­ture, etc.).
  • La Palme Expé­rience Citoyen dis­tingue des ser­vices publics dans leur capa­ci­té à inno­ver et à appor­ter aux citoyens le même niveau de ser­vice et d’expérience citoyen que les entre­prises privées.
  • La Palme Enga­ge­ment vise à récom­pen­ser les ini­tia­tives exem­plaires en matière d’engagement des équipes (mana­ge­ment, symé­trie des atten­tions et satis­fac­tion collaborateur).
  • La Palme Trans­for­ma­tion par l’Expérience Client dis­tingue les entre­prises qui ont su se trans­for­mer en met­tant le client au cœur de leur stratégie. 
  • La Palme Jeune Pousse récom­pense une start-up inno­vante dont l’approche dis­rup­tive génère de la créa­tion de valeur en matière de tech­no­lo­gie sur l’expérience client. 
  • Enfin, la Palme du Direc­teur Client de l’année récom­pense une excel­lence mana­gé­riale, une force d’innovation et une capa­ci­té à conduire et fédé­rer les équipes dans la trans­for­ma­tion de l’organisation. 

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