Renaissance mondiale du nucléaire : quelles places pour la Russie ? Première partie
La Russie a annoncé vouloir développer la production d’électricité nucléaire pour passer de 23 GW actuellement à un niveau au moins égal en 2030 à 45 GW, voire 60 GW. Cela implique la mise en service de 2 à 3 GW/an en moyenne sur une quinzaine d’années. Ce rythme est encore plus élevé, si l’on y ajoute les objectifs ambitieux affichés à l’exportation.
Ces objectifs sont replacés dans un contexte mondial de « renaissance du nucléaire » estimé à + 300 GW en 2030 (+ 150 GW d’accroissement de capacité et + 150 GW pour les centrales mises à l’arrêt), ce qui conduirait à un parc total installé passant de 370 à 520 GW.
Ce montant pourra paraître élevé, mais il reste en réalité modeste face aux besoins croissants en électricité à cet horizon : il correspond au scénario de référence 2005 des études prospectives WNA (World Nuclear Association).
Dans la deuxième partie, on décrira la situation russe, son organisation actuelle et les mesures prises ou envisagées par ses dirigeants pour atteindre les objectifs retenus et surmonter le défi industriel qu’ils représentent.
Une réflexion sur l’état et les perspectives de l’industrie nucléaire civile russe a été lancée par EDF il y a environ deux ans. L’achèvement de ce travail au printemps 2005 a coïncidé avec ce qu’il faut bien appeler un « retournement » du contexte du nucléaire, même si certains précurseurs étaient déjà notables, principalement en Chine et aux États-Unis.
Cet article sur le nucléaire civil russe comporte cinq parties : après un rappel de la démarche suivie, on tracera un scénario « plausible » clairement situé dans un contexte de renaissance du nucléaire. La troisième partie commence par quelques rappels sur la Russie, suivis par les caractéristiques du système électrique, la quatrième partie est relative à l’organisation de l’industrie nucléaire civile russe. La cinquième et dernière partie est consacrée aux programmes de développement décidés ou envisageables.
L’organisation et les objectifs de la démarche
Il y a deux ans, la Revue générale nucléaire (RGN) avait bien voulu publier un article cosigné de notre part intitulé « Les performances comparées des parcs nucléaires en exploitation des États-Unis et d’Électricité de France » (année 2004, n° 5, octobre-novembre, pages 12 à 20).
Nous indiquions, en conclusion générale de cette comparaison, que des enseignements pouvaient être tirés de l’expérience accumulée aux États-Unis depuis dix ans, à la fois de manière pragmatique, mais également pour une réflexion dénommée Initiative nucléaire 2015 (IN15) visant, pour EDF, à préparer et mettre en œuvre les évolutions dans le domaine nucléaire permettant de faire face aux enjeux de demain.
Parallèlement, afin de compléter les travaux ci-dessus centrés sur l’amélioration de la performance du parc français, il est apparu utile de faire le point sur l’état et les perspectives de l’industrie nucléaire civile de quelques autres grands pays, au premier rang desquels la Russie, qui, il y a dix-huit mois à peine, était moins sous les projecteurs que la Chine ou les États-Unis par exemple.
Ce projet d’une durée d’une année a été conduit par une équipe comportant des représentants des diverses directions concernées, la coordination étant assurée par JAL Consulting.
Il a donné lieu à de nombreux contacts avec plusieurs responsables du Commissariat à l’énergie atomique et d’Areva ainsi qu’à deux missions d’une semaine chacune (octobre 2004 et février 2005), conduites par Jalco en liaison avec MHB SA (Mme Marie-Hélène Berard) spécialiste des questions économiques et financières pour les pays de l’Est. Ces missions ont permis de rencontrer, à Moscou et à Saint-Pétersbourg, les dirigeants et des responsables de niveau élevé, de pratiquement toutes les organisations et entreprises engagées dans la production d’électricité nucléaire (une vingtaine au total) ainsi que les représentants des entreprises françaises et, bien sûr, de l’ambassade de France.
Ces travaux ont permis en premier lieu d’actualiser et de compléter les connaissances acquises sur l’industrie russe ; ils devraient contribuer, comme on le verra dans la suite de cet article, à la réflexion sur les évolutions de positionnement envisageables, compte tenu des impulsions vigoureuses définies et engagées par S. Kiriyenko, chef de Rosatom, l’agence chargée du nucléaire civil et militaire, depuis sa nomination en novembre 2005.
La « renaissance nucléaire »
Le retournement du contexte du nucléaire
Il y a moins de deux ans, de nombreuses interrogations sur la pertinence de la production d’électricité d’origine nucléaire étaient largement émises en France, en Europe et dans le monde, y compris par les grandes institutions internationales en charge des questions énergétiques. Depuis cette date, le contexte énergétique a été marqué par trois évolutions majeures :
• tout d’abord, les prix des combustibles fossiles : pétrole, gaz et dans une moindre mesure charbon ont connu une hausse importante. Le niveau élevé des prix apparaît désormais durable, même avec des fluctuations significatives vraisemblables ; de nombreuses études prospectives s’accordant sur le fait que l’énergie est devenue structurellement un bien rare, mettant au premier plan la question de la sécurité d’approvisionnement ;
• ensuite, les enjeux du réchauffement climatique et la nécessité de la lutte contre l’effet de serre se sont encore affirmés au travers des discussions inter-États sur la suite du protocole de Kyoto et par le démarrage en Europe, depuis début 2005, d’un marché de Permis d’émissions négociables, qui conduit désormais les opérateurs industriels à intégrer le coût du CO2 dans leurs arbitrages économiques aux différents horizons de temps ;
• enfin, de façon assez générale y compris en Europe où on sort du suréquipement, la construction de nouvelles centrales de production d’électricité a été annoncée et engagée par plusieurs compagnies d’électricité, donnant ainsi le signal de la reprise des investissements pour faire face aux prochains déclassements de centrales obsolètes, essentiellement au charbon, et à la croissance de la demande d’électricité (au moins 80 % en moyenne au niveau mondial d’ici à 2030).
Ces trois déterminants (prix des combustibles, quotas de CO2 et besoins de nouvelles capacités de production) sont à l’origine de la forte hausse du prix de l’électricité en Europe.
On peut donc parler, du fait de perspectives apparaissant durablement favorables aux kWh nucléaires, d’un véritable retournement vis-à-vis de l’énergie nucléaire qui s’est traduit au plan mondial par de nombreuses initiatives que l’on résumera ci-dessous et que l’on replacera ensuite dans un « scénario plausible » à l’horizon 2030.
Les principales initiatives
Pour l’essentiel, si l’on excepte quelques décisions marquantes comme celles prises en France et en Finlande de construire un EPR, le réacteur franco-allemand de 3e génération d’Areva, si l’on excepte également la poursuite des constructions en cours (il y a environ trente réacteurs en construction ou en voie d’achèvement dont une vingtaine en Asie et trois en Russie), il s’agit principalement soit d’intentions favorables soit de préparer les conditions effectives d’une relance des engagements dont on verra plus loin qu’au total ils pourraient conduire à la mise en service de plus de 300 GW d’ici 2030 faisant passer la capacité nette totale de 370 GW à 520 GW (370 – 150 + 300).
Sans être exhaustif, on peut considérer que les grandes impulsions proviennent actuellement des États-Unis, de la Chine, de l’Inde et de la Russie bien sûr ; l’Europe de l’Ouest ainsi que l’Europe centrale et orientale apparaissant à ce jour moins dynamiques même si des actions positives sont engagées par certains pays, au premier plan desquels le Royaume-Uni.
Avec l’Energy Policy Act d’août 2005, les États-Unis ont clairement marqué leur volonté d’établir des conditions favorables aux investissements nucléaires tant sur la simplification des procédures et garanties que l’établissement d’incitations financières.
L’industrie de son côté, soit en direct par les utilities, soit par la construction de groupements comme NuStart (9 électriciens US, EDF, General Electric et Westinghouse) ou de joint ventures comme Unistar (Constellation et Areva), met au point d’assez nombreux projets (12 compagnies ont déclaré des projets AP 1000, ESBWR et EPR pour une puissance de l’ordre de 30 GW). La mise en service de 45 GW à l’horizon 2030 permettrait de maintenir la proportion de 20 % d’électricité d’origine nucléaire.
L’annonce, début 2006, par l’administration US de GNEP (Global Nuclear Energy Partnership) complète le dispositif en définissant une stratégie nucléaire à objectifs multiples dont l’objet est la mise en place d’un système international permettant le déploiement, dans des conditions politiquement acceptables (notamment vis-à-vis de la non-prolifération), d’un parc nucléaire important au niveau mondial ; en pratique, GNEP marque une inflexion majeure de la politique US qui envisage dorénavant de mettre en œuvre une politique de retraitement des combustibles usés en sus du stockage de longue durée.
Depuis plusieurs années, la Chine a affiché de grandes ambitions et s’organise pour maîtriser totalement la filière nucléaire ; les puissances actuelles (installées et en cours de construction) sont relativement modestes (moins de 2 % du parc électrique total égal à 508 GW), mais compte tenu de la croissance de l’économie et de celle de la demande d’électricité, l’ensemble des mises en service pourrait atteindre 60 GW d’ici à 2030.
La place importante que pourrait prendre l’Inde est apparue plus récemment avec les discussions en cours au plus haut niveau entre les autorités indiennes et américaines qui pourraient déboucher sur des coopérations internationales sans entraves.
Là aussi, les besoins en énergie électrique sont considérables et l’Inde envisage au moins 30 GW de nucléaire dans son mix électrique à l’horizon 2030, ce qui est très important au regard des 3,4 GW de capacités installées.
Depuis l’arrivée de S. Kiriyenko à la tête de Rosatom, l’agence fédérale russe en charge des activités nucléaires civile et militaire, la Russie montre clairement qu’elle entend développer la production d’électricité nucléaire en Russie même et jouer un rôle important à l’exportation. Dans le même temps, la Russie lançait une initiative sur la création de centres internationaux de fourniture, de services du cycle du combustible nucléaire.
Les ordres de grandeur indiqués à l’horizon 2030 (de 30 à 45 GW) doivent être mis en regard de la puissance installée de 23 GW. Cet article a pour objet de rappeler, vu par des observateurs extérieurs, le contexte et l’organisation fondant de telles prises de position et discussions qui, à notre sens, seront déterminantes pour les années futures.
Un « scénario plausible » de + 300 GW au niveau mondial à l’horizon 2030
Les développements suivants ont pour objet de préciser les ordres de grandeur et de les mettre en perspective dans des domaines d’investissement où les temps nécessaires pour la décision et l’exécution sont souvent supérieurs à dix ans. Ils ont également pour objet de mettre en évidence les enjeux auxquels les pays de l’Europe géographique (zone incluant l’Ukraine et la Turquie) auront à faire face d’ici à 2030.
Capacités nucléaires de l’Europe et de la Russie (carte 1)
Rappelons tout d’abord que les chiffres de puissance nucléaire se situent dans des contextes largement éclairés par de nombreux documents de référence sur les perspectives énergétiques à l’horizon 2030 émis par des organisations reconnues ; sans être exhaustif, citons les travaux de l’AIE (World Energy Outlook), de la Commission européenne (Livre vert), du DOE des USA (Annual Energy Outlook) ou encore les études faites par des organisations professionnelles reconnues comme le WNA (World Nuclear Association).
En synthèse, une projection moyenne fait apparaître que les besoins mondiaux en capacités de production électrique pourraient s’élever à + 4 800 GW (deux tiers de nouvelles capacités, un tiers de renouvellement) faisant passer la puissance totale mondiale installée de 3 400 GW en 1999 à 6 600 GW en 2030. Le scénario envisagé de + 300 GW pour le nucléaire recouvre un accroissement de capacité de + 150 GW et le renouvellement des déclassements estimé à + 150 GW même en tenant compte des augmentations de durée de vie décidées ou envisageables.
Un tel scénario ferait passer le nucléaire de + 370 GW soit 11 % de la puissance installée à 520 GW, donc avec une part relative réduite à 7 %. Dans le nouveau contexte décrit précédemment, ce scénario à + 300 GW en 2030 paraît plausible et devrait permettre de préparer les décisions industrielles appropriées.
Zone géographique par zone géographique, le total des principales initiatives rappelées ci-dessus s’élève à + 165 GW (États-Unis 45 GW ; Chine 60 GW ; Inde 30 GW ; Russie 30 GW de manière prudente). D’autres décisions seront prises que l’on peut estimer vraisemblables à hauteur de 30 GW pour le Japon et la Corée du Sud et 15 GW pour le reste du Monde (hors les pays de l’Europe « géographique » ce qui conduit à un total de 210 GW).
S’agissant des pays de l’Europe « géographique » (cf. carte n° 1), couvrant essentiellement l’Union européenne, l’Ukraine et la Turquie, avec une puissance installée de 150 GW, peut-on estimer que 90 GW seront mis en service d’ici 2030 ?
Ce point est loin d’être acquis, même au niveau des principes dans plusieurs pays de l’Europe des Quinze ; cela dit, si l’on considère les déclassements inévitables à cet horizon et estimés à près de 700 GW et les capacités nouvelles de l’ordre de 570 GW pour faire face à une demande croissante d’électricité de plus de 50 %, un tel volume qui représente moins de 10 % des puissances à mettre en œuvre sera probablement décidé tôt ou tard qu’on peut répartir également entre l’Europe des Quinze (45 GW) et le Grand Est (45 GW), dénomination proposée pour les autres pays de l’Europe géographique qui utilisent à l’heure actuelle essentiellement des réacteurs de conception russe (ou seraient susceptibles d’en utiliser).
Au total, 300 GW sur la période, cela représente en moyenne 23 GW par an entre 2012 et 2025 ; 2012 est la date à laquelle les constructions auront pu démarrer à un rythme soutenu et 2025 représente la dernière année d’engagement de travaux pour des mises en service en 2030 (durée de réalisation estimée à cinq ans).
C’est environ ce qui a été mis en service entre 1970 et 1985 : il s’agit donc, pour cette « seconde vague », d’un ensemble de programmes ambitieux, mais réalisables (une vingtaine de tranches par an), auxquels de nombreux acteurs industriels, dont la Russie, commencent à se préparer activement.
Quelques rappels sur la Russie et les caractéristiques du système électrique
La Fédération de Russie est un « très grand pays » au double sens des dimensions et des capacités économiques et politiques. Cette quasi-évidence n’exclut pas de grandes disparités, ni même des points faibles, mais dans le domaine du nucléaire, elle fonde la volonté des dirigeants à maintenir, développer et garder le contrôle de l’ensemble du « complexe nucléaire » avec ses composantes civile et militaire, base incontestable de la reconnaissance de la Russie en tant que grande puissance. Nous reviendrons ultérieurement sur les conséquences pratiques de cette attitude.
Parc nucléaire russe
Au plan des dimensions, rappelons que la Fédération de Russie est le plus grand pays du monde : 17 millions de km2 (32 fois la France) soit 1⁄8 de la surface terrestre de la planète ; 11 fuseaux horaires ; une population totale de 143 millions d’habitants.
C’est un pays très hétérogène où toute donnée présente de considérables écarts ; ainsi, on peut noter un facteur 4 entre les coûts de production électrique, de l’ordre de 11,5 USD/MWh pour Kostroma à l’Ouest, environ 45 USD/MWh sur la côte Est. Ces aspects doivent être relativisés pour l’électricité nucléaire dont les réacteurs sont surtout à l’ouest de l’Oural, même si les ressources minières et les installations du cycle du combustible se trouvent essentiellement en Sibérie.
Au plan économique, les indicateurs doivent être utilisés avec prudence : en parité de pouvoir d’achat (ppa) qui permet des comparaisons au niveau mondial sur une même base, le PIB de la Russie s’élève, pour 2005, en dollars 2002 à 1 427 milliards de dollars (source Rexecode), un peu moins que la France avec 1 799 milliards de dollars (pour une population de 61 millions d’habitants).
Les taux de croissance sont toujours élevés : estimation de 6,4 % pour l’année 2005. Le niveau de production d’avant la crise de 1998 a été dépassé et d’une manière générale tous les indicateurs sont revenus à des niveaux supérieurs à ceux des dernières meilleures années du régime soviétique. Terminons ce bref rappel indiquant que la dette extérieure publique a été récemment effacée et que le budget est en excédent.
Ainsi, la Russie continue de bien se porter et les importants excédents de la balance commerciale, essentiellement dus aux activités pétrolières et gazières (le nucléaire est également un contributeur positif pour plus de 3 milliards de dollars) y contribuent largement. De nombreuses réformes ont été engagées notamment dans le domaine de la fiscalité, domaine où les changements ont été les plus profonds ; d’autres réformes sont engagées au plan desquelles on mentionnera le secteur bancaire (trop nombreuses petites banques), le système judiciaire et la réduction des procédures bureaucratiques.
Deux points noirs sont fréquemment relevés. En premier lieu la démographie, plus que préoccupante : l’espérance de vie continue de diminuer et s’établit à 58,9 ans pour les hommes. Avec des taux de natalité bas et un taux de mortalité élevé, la population de la Fédération de Russie pourrait décroître à 125 millions d’habitants en 2030 et, selon un rapport de l’ONU, à 112 millions en 2050, le même niveau que le Japon.
En second lieu, il faut souligner qu’une grande partie de la population est encore en dessous du seuil de pauvreté, là aussi avec de grandes disparités entre les régions, les villes et les campagnes, les salaires mensuels moyens étant compris entre 30 et 400 dollars.
Les caractéristiques du secteur électrique
Les deux acteurs principaux du secteur électrique sont le système électrique unifié RAO EES (dite RAO) et l’exploitant nucléaire, Rosenergatom (REA) qui dépend de Rosatom. RAO dans sa structure actuelle est un holding d’État qui en contrôle majoritairement le capital et gère l’ensemble des activités non nucléaires, du transport et de la distribution. Des réformes de structures significatives sont en projet qui concernent à la fois RAO et la structuration du marché.
Mix électrique (Russie)
La consommation électrique en 2005 a atteint 945 TWh au-delà des prévisions et la consommation pour les huit premiers mois de 2006 s’est établie à + 5,5 %. On observera que le ratio de consommation par habitant pour le secteur industriel du fait de ses activités d’industrie lourde avec 4 150 kWh/hab. se situe à des niveaux très élevés (supérieurs à celui des USA) alors qu’il est encore à des niveaux très bas pour le secteur résidentiel et tertiaire (Exposé de S. Kiriyenko au WNA du 7 septembre 2006 à Londres).
La croissance attendue des activités industrielles combinée avec un « rattrapage » des secteurs non industriels conduit à prévoir pour les années à venir un développement important des consommations électriques (doublement au moins d’ici 2030 selon les autorités russes, objectif qui pourra paraître élevé à des observateurs occidentaux).
En ce qui concerne le mix électrique, comme on peut le voir sur le graphique n° 1, il est très différent du mix français où la part du nucléaire atteint 78 % et celle de l’hydraulique 12 %.
En 2005, le nucléaire russe avec 23,2 GW de puissance installée pour un total de 227 GW représente 16 % de la production, soit environ 150 TWh (cf. carte n° 2). La part du gaz (le pétrole ne représente que 3 %) est très élevée ; en valeur absolue cette part ne peut qu’augmenter au détriment d’autres usages, comme l’exportation sauf à recourir à des CCG (cycles combinés gaz) de bien meilleur rendement et, bien sûr, à accroître la part du nucléaire.
Pour le futur, la Russie a donc à faire face à un des challenges importants conduisant à faire évoluer son mix et à mettre en service d’ici 2030 des puissances estimées (280 GW) pour répondre tant à l’accroissement de consommation (220 GW) qu’aux déclassements, estimés à + 60 GW (c’est sans doute un minimum).
Sur ces bases, si l’on retient une production nucléaire de 25 %, soit 400 TWh, cela conduit à une capacité totale installée d’environ 60 GW (7 TWh/GW) et donc, compte tenu des déclassements inévitables à cet horizon, à la mise en service d’au moins 45 GW. Une hypothèse basse avec + 50 % d’augmentation de la consommation et 22 % de part nucléaire conduit à une production de 330 TWh et un parc installé d’environ 45 GW. Cela suppose qu’au moins 30 GW soient mis en service d’ici 2030, correspondant à des engagements de travaux de 2 GW/an entre 2010 et 2025. C’est l’hypothèse retenue dans le scénario dit plausible qui représente déjà un formidable challenge.