Rendre rentable la conversion de la chaleur en électricité
Pour répondre aux enjeux de transition énergétique, et plus précisément de l’efficacité énergétique dans l’industrie, HEVATECH a mis au point un nouveau procédé, Turbosol, un convertisseur innovant de chaleur en électricité, économiquement performant et aux avantages multiples. Le point avec Patrick Bouchard, Président d’HEVATECH.
Le sujet de la transition énergétique et plus précisément de l’efficacité énergétique est au cœur des enjeux actuels et des débats. Cependant, on parle assez peu du secteur industriel qui est la cible d’HEVATECH. Pouvez.vous nous en dire plus sur les enjeux ?
Il est aujourd’hui évident pour tous qu’il existe de forts enjeux climatiques et économiques surlatransition et l’efficacité énergétique.Pour fixer les ordres de grandeurs, les études faites par le Lawrence Livermore Laboratory démontrent que plus de 50 % des consommations énergétiques (énergies fossiles, renouvelables, nucléaires…) sont gaspillées sous forme de chaleur. Un impact économique et écologique considérable. Si les médias se focalisent essentiellement sur les problématiques d’efficacité énergétique dans les transports et l’habitat, l’industrie représente également un enjeu majeur de l’ordre de 30 % des pertes au niveau mondial. D’après les études de l’ADEME, l’industrie française consomme de l’ordre de 315 TWh, soit un quart de l’énergie totale consommée. L’ADEME chiffre ainsiun gisementvalorisable dans l’industrie de 51 TWh. HEVATECH se positionne précisément sur les procédés technologiques et les produits de valorisation de la chaleur perdue dans l’industrie. Après s’être intéressé au stockage de la chaleur, HEVATECH est aujourd’hui focalisée sur la conversion de cette chaleur en électricité pour une autoconsommation par le client ou une réinjection sur le réseau électrique. L’impact économique est une réduction de la facture électrique payée par le client. L’impact écologique correspond au contenu carbone de l’électricité économisée. Soit à titre d’illustration et pour un système TURBOSOL de 200 kWe pendant sa durée de vie, un gain de l’ordre de 16 000 t CO2eq ou l’équivalent de l’émission d’une flotte de véhicules sur 100 millions de km !
Dans ce contexte, comment se positionne HEVATECH et avec quels avantages concurrentiels ?
Depuis sa création, HEVATECH se positionne sur la valorisation de la chaleur, qu’il s’agisse de sa captation, de son stockage ou de sa conversion. Après avoir développé des solutions de stockage de la chaleur par matériaux à changement de phase et par thermochimie, nous sommes aujourd’hui focalisés sur la conversion de la chaleur fatale ou perdue en électricité par un procédé original. En effet, malgré l’importance de ce gisement et la nécessité économique et écologique de valoriser cette chaleur en électricité, il y a très peu de réalisations concrètes dans le monde industriel. Le frein à la mise en place des technologies existantes est essentiellement économique. Les solutions basées sur les Cycles organiques de Rankine (ORC) offrent des temps de retour sur investissement souvent trop longs par rapport aux exigences industrielles. Afin de lever cet obstacle, HEVATECH innove sur le procédé et les technologies pour proposer un système simple d’emploi, robuste et présentant des temps de retour sur investissement acceptables pour les clients, typiquement de 2 à 5 ans suivant les configurations à comparer à des temps de retour de 5 à 10 ans pour les solutions concurrentes.
Vous vous basez sur un procédé innovant pour convertir la chaleur en électricité. Qu’en est-il ? Quels sont les apports de Turbosol dans ce cadre ?
Turbosol est un procédé original qui permet de capter la chaleur perdue ou fatale dans les fumées d’usine ou dans les échappements de moteurs avec deux fluides :
- Un fluide caloporteur qui va récupérer les hautes températures (huile végétale) ;
- Un fluide thermodynamique pour les températures intermédiaires (eau) ;
Cette association de deux fluides permet d’épuiser au maximum la source de chaleur tout en respectant les contraintes du procédé du client. Les fluides vont alors être mélangés pour créer un fluide diphasique (microgouttelettes d’huile et vapeur d’eau). La détente quasi-isotherme de la vapeur d’eau dans une tuyère va provoquer une forte accélération du mélange en entraînant les gouttelettes d’huile à haute vitesse. Nous avons donc transformé l’énergie thermique et de pression en énergie cinétique portée par l’huile. Le jet diphasique va alors impacter une turbine à action de type Pelton connue pour sa robustesse et ses bonnes performances. Cela permet d’avoir une turbine qui va tourner à très basse vitesse (1 500 tr/mn) alors que les turbines des technologies concurrentes tournent au moins 10 fois plus vite. Reste à séparer la vapeur d’eau de l’huile, à condenser la vapeur d’eau et à boucler les circuits.
Les avantages sont multiples :
- Faibles coûts d’investissement et de maintenance, permettant un temps de retour sur investissement divisé par 2 comparé aux solutions directement concurrentes ;
- Machine simple, robuste, non bruyante et facile à implanter et à opérer(petit diamètre, basse vitesse de rotation) ;
- Fonctionnement sécurisant à très faible pression (capacité et turbine à pression atmosphérique, circuits à 10 bars) et respectueux de l’environnement (pas de fluide organique) ;
- Simplicité réglementaire et respect des normes environnementales (pas d’autorisation ICPE). • Flexibilité (diversité des sources de chaleurs) et modularité (plusieurs jets sur une même turbine) ;
- Optimisation de la chaleur captée grâce aux deux fluides ;
- Source « froide » permettant la condensation de la vapeur d’eau à pression atmosphérique pouvant atteindre 90 °C et permettant ainsi une valorisation complémentaire par cogénération (réseau de chaleur, ECS).
La solution TURBOSOL est adaptée aux chaleurs supérieures à 300 °C et aux puissances intermédiaires (20kWe – 500 kWe) et adresse les marchés de l’incinération de déchets, de la transformation de matière dans l’industrie (verrerie, céramiste, cimenterie, sidérurgie…) et des groupes électrogènes de puissance fonctionnant en base.
HEVATECH est une start-up qui a déjà quelques années d’expérience. Quels sont son parcours et sa réalité aujourd’hui ? Comment voyez-vous son avenir ?
À sa création en 2010, HEVATECH avait pour cible le stockage de la chaleur par des matériaux à changement de phases et par thermochimie. Malgré tout l’intérêt de cette problématique et des solutions développées, il n’y a pas de business modèle satisfaisant à ce jour. Nous avons donc été amenés en 2014 à nous focaliser sur la conversion de la chaleur en électricité qui sera autoconsommée. L’impact économique est direct sur la facture énergétique du client. Actuellement, nous sommes en phase de démonstration de l’intérêt de notre dispositif et de sa facilité de mise en œuvre sur les marchés visés et nouons des partenariats avec des acteurs structurants pour accélérer notre développement commercial, notamment à l’export.
Quels sont vos actualités, enjeux et perspectives ?
Nous sommes dans la phase passionnante de transformation d’une start-up technologique en une société industrielle rentable et en forte croissance, avec des enjeux majeurs :
- Avoir les moyens de nos ambitions grâce à une augmentation de capital partiellement réalisée et qui reste ouverte à de nouveaux investisseurs ;
- Optimiser et démontrer l’intérêt de notre procédé sur les marchés visés ;
- Industrialiser notre gamme de produits et développer notre chiffre d’affaires dès mi 2020 ;
- Nouer les partenariats techniques, de projets et commerciaux pour consolider notre écosystème de développement ;
- Et pour atteindre ces objectifs, attirer et intégrer de nouveaux talents…