Richard Bouvier (X63) grand bâtisseur et humaniste

Richard Bouvier (X63) grand bâtisseur et humaniste

Dossier : TrajectoiresMagazine N°802 Février 2025
Par Christian JEANBRAU (63)

Un père ange­vin, une mère d’origine hol­lan­daise (Maës­tricht) vont don­ner nais­sance à Tarbes, le 11 jan­vier 1943, à Richard Bou­vier, calme et robuste pyré­néen qui s’est éteint le 14 décembre 2024.

Ins­ti­tu­tion Jeanne‑d’Arc (jusqu’en pre­mière) et lycée Théo­phile-Gau­tier (Math élém) à Tarbes, puis Sup et Spé à Louis-le-Grand. Après l’X, une année « mili » à suivre à bord du Bathy­scaphe, basé à Tou­lon. Il y ren­contre Simone Straf­fo­rel­li qu’il épou­se­ra et qui lui don­ne­ra trois enfants, Vir­gi­nie, Nico­las et Charles.

Une carrière d’ingénieur

Richard entame sa car­rière d’ingénieur dans sa ville de nais­sance, après des com­plé­ments de for­ma­tion au CHEBAP et à l’ISG. Il entre chez Cas­tells Frères, socié­té tar­baise de construc­tion – en rup­ture avec ce qu’il s’était pro­mis, son père y étant ingé­nieur TP – et en devien­dra rapi­de­ment (en 1975) le DG, avant de par­tir en 1979 à la SGE et de rejoindre en 1986 le groupe SAE. Là, il dirige pen­dant quatre ans la construc­tion du World Trade Cen­ter de Pékin.

En 1991, c’est la direc­tion géné­rale de SAE Indus­tries et Eif­fel (PDG pôle construc­tion métal­lique). Jean-Fran­çois Rove­ra­to (X64, PDG d’Eiffage) lui confie en 1998 la pré­si­dence de SAE. En jan­vier 2000, il est pré­sident d’Eiffage Construc­tion, qui devient la marque BTP du groupe avec 15 000 sala­riés et 17 mil­liards de francs de chiffre d’affaires. Richard prend sa retraite en février 2003, ayant encore eu le temps de por­ter le poids de lourdes et belles res­pon­sa­bi­li­tés dans la mise en place de l’exceptionnel tablier métal­lique du via­duc de Mil­lau, le plus haut du monde.

Un catholique convaincu

Voi­là pour l’ingénieur, le grand patron, effi­cace, posé, hon­nête, juste et droit, ouvert, appré­cié de ses col­la­bo­ra­teurs à qui il laisse de larges res­pon­sa­bi­li­tés. Reste der­rière l’homme, le jeune homme d’abord, tou­ché (novembre 1963) par l’assassinat de JFK qu’il admi­rait, pas­sion­né de phi­la­té­lie (une dimen­sion impor­tante de sa vie), accro­ché par le film de Stan­ley Donen Cha­rade (où joue Audrey Hep­burn, au Pan­théon de ses actrices, et où une affaire de timbres est au res­sort du dénoue­ment) et fai­sant au prin­temps 1964, catho­lique convain­cu, le pèle­ri­nage de Chartres, avec ce clin d’œil du des­tin qu’il pos­sé­de­ra plus tard à Paris un bel appar­te­ment aux pieds de Notre-Dame et fera à la retraite l’acquisition dans le Perche d’un ancien pres­by­tère, amé­na­gé avec goût par son épouse.

Richard fut aus­si un pas­sion­né de pho­to­gra­phie, prêt à se lever l’été lors de ses séjours à la mon­tagne à trois heures du matin, pour cap­tu­rer des vues ani­ma­lières ou bien de fleurs (proxi­pho­to­gra­phie) tein­tées des lueurs de l’aurore. Ama­teur de musique, de pein­ture, cou­rant les expo­si­tions, ama­teur d’histoire et, pour y reve­nir, doté à tra­vers ses timbres et ce qu’ils honorent de connais­sances géo­graphiques et évé­ne­men­tielles extrê­me­ment pré­cises et diver­si­fiées, Richard n’a ces­sé de déployer ses curiosités.

« Richard n’a cessé de déployer ses curiosités. »

Il fut enfin, à la retraite, ce cama­rade de bien des séances de ciné­ma et de petits res­tau­rants par­ta­gés au fil de gaies conver­sa­tions pari­siennes entre Odéon et Notre-Dame. Richard aimait les cita­tions et l’ancien grand patron se plai­sait à rap­pe­ler le mot de Cle­men­ceau : « Pour prendre une déci­sion, il faut être en nombre impair, et trois, c’est déjà trop », comme le retrai­té se réfé­rait, en sou­riant et pour s’en récla­mer, face aux modes mon­tantes du sou­ci de la forme, à la devise de Chur­chill : No sport !

Diag­nos­ti­qué Par­kin­son il y a vingt ans, Richard Bou­vier a magni­fi­que­ment tenu tête à la mala­die, ne ralen­tis­sant son acti­vi­té que dans une courte et der­nière période et mani­fes­tant face au des­tin une force de carac­tère et une équa­ni­mi­té remar­quables. Son terme atteint, Richard Bou­vier peut jeter un regard en arrière et s’estimer satis­fait du che­min par­cou­ru. Il a bien méri­té le Requies­cat in Pace dont il est d’usage d’accompagner les départs définitifs. 

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