Scores environnementaux : une consommation et une production informées
Les scores environnementaux sont à la mode. Et de fait ils ont de grandes vertus, à condition d’être élaborés avec méthode et surtout dans la concertation. Ils sont intéressants pour les consommateurs, qui en ont besoin pour orienter leurs choix de manière responsable au regard de la protection de l’environnement. Ils sont intéressants pour les producteurs et pour leur image de marque. La France est en la matière en avance au sein de l’Europe.
Les scores environnementaux découlent de la convergence de deux domaines en plein essor : la demande grandissante des consommateurs pour une consommation plus informée et la montée en puissance de la transparence environnementale.
Présentation des éco-scores
Un score environnemental prend la forme d’un indicateur simple (note A‑B-C-D‑E, note sur 100, etc.) et répond généralement à deux objectifs majeurs : informer le consommateur sur l’impact environnemental d’un produit, l’incitant ainsi à des choix plus responsables, ce qui permet de comparer les produits entre eux ; favoriser également des démarches d’écoconception en visibilisant les processus de fabrication vertueux. En théorie, un score environnemental cherche à couvrir tous les aspects liés aux impacts sur le cycle de vie des produits, en offrant une évaluation complète. Les scores actuellement en place peuvent cependant présenter des variations significatives en termes de méthodologie et de périmètre. Nous examinerons donc à la fois les indices visant à qualifier l’impact environnemental du produit, comme l’éco-score, et les notes spécifiques ayant pour objectif de qualifier une face du produit, comme sa réparabilité.
Un écosystème dynamique d’acteurs impliqués
De nombreux acteurs sont impliqués dans le développement des scores environnementaux. Cette mosaïque comprend la société civile, les fabricants, les distributeurs, ainsi que les régulateurs et les agences gouvernementales.
À cet écosystème s’ajoutent des indicateurs indépendants comme Yuka (application qui vise à évaluer l’impact des produits alimentaires et cosmétiques sur la santé des consommateurs) ou Open Food Facts (projet collaboratif de base de données libre et ouverte sur les produits alimentaires), ainsi que des outils d’aides au scoring comme Eco-meuble. Ces indicateurs indépendants portent des initiatives qui peuvent être à destination du consommateur final, des entreprises ou des gouvernements.
Certaines parties prenantes se positionnent dans le développement de scores environnementaux dans des rôles d’incitateur, de conseil, de mise à disposition d’outils ou de critique. Ces parties prenantes exercent une influence directe sur la réussite d’une initiative de score environnemental. Il est donc essentiel de les considérer et parfois de les impliquer lors de la planification et de la mise en œuvre du projet.
De plus, les ONG jouent un rôle actif dans le développement des scores environnementaux et participent vivement aux débats publics. Parmi elles, des ONG telles que le WWF, UFC-Que Choisir et CIWF (Compassion in World Farming) ont contribué à façonner ces scores. Elles conseillent leur élaboration et critiquent les scores jugés peu rigoureux ou inefficaces, à des fins d’amélioration. Elles apportent leur expertise et leurs critiques influentes. À titre d’exemple, dix-huit ONG ont soutenu le Planet Score, une alternative avec Nutri-Score, visant à évaluer plus précisément l’impact des produits alimentaires sur la santé, l’environnement et le bien-être animal.
Le régulateur français, précurseur dans l’Union européenne
Tandis que l’Union européenne établit des méthodologies et des recommandations (méthode Product Environmental Footprint, PEF, publiée en 2013 pour mesurer la performance environnementale, recommandations sur la manière de mesurer la performance environnementale sur l’ensemble du cycle de vie publiées en 2021), la France en est déjà à l’heure des expérimentations.
Le régulateur français a commencé à faire bouger les lignes dans de multiples secteurs : le Grenelle de l’environnement oblige déjà depuis 2011 l’affichage d’un diagnostic de performance énergétique dans l’immobilier à la vente et à la location, la loi Agec a introduit en 2021 le déploiement de l’affichage d’un indice de réparabilité sur les produits électriques et électroniques, la loi climat et résilience en 2021 impose aux enseignes et fabricants de dévoiler l’impact environnemental d’un vêtement pour janvier 2024… Les expérimentations d’affichage visant à mieux informer le consommateur et à aider les distributeurs dans la sélection de leurs fabricants fleurissent, et devraient se généraliser dans plusieurs secteurs déjà estampillés comme prioritaires.
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Le rôle de l’Ademe
De plus, les agences publiques comme l’Ademe, opérateur technique du ministère de l’Écologie dans la gestion du dispositif français d’affichage environnemental, mettent à la disposition des entreprises des ressources et un accompagnement pour les aider à s’engager dans la démarche. Ainsi, la base empreinte de l’Ademe fournit des données de facteurs d’émission des produits et services de grande consommation, l’outil Ecobalyse développé par l’État et le bilan produit de l’Ademe permettent le calcul d’analyses de cycles de vie simplifiées, l’Ademe propose des subventions aux PME et TPE via le programme Tremplin… La France se distingue ainsi par son volontarisme en la matière.
“Un véritable impact sur l’ensemble du cycle de vie des produits.”
Les indicateurs environnementaux ont un véritable impact sur l’ensemble du cycle de vie des produits. Ce processus peut être schématiquement décomposé en quatre étapes : conception & fabrication, distribution, usage par le consommateur et fin de vie.
Mettre en place des démarches d’écoconception
Le score environnemental est un outil permettant aux fabricants d’objectiver la performance environnementale de leurs produits. Il incite donc les fabricants à écoconcevoir et améliorer leurs produits, notamment grâce à la possibilité de comparer deux projets avant même la mise en production, afin de maximiser certains critères préétablis tels que la réparabilité et la recyclabilité, la faible consommation en eau, etc. Cet effet incitatif est dû au fort impact de l’affichage environnemental sur l’image de marque des fabricants. Il constitue un critère de sélection pour les consommateurs, mais aussi potentiellement pour les distributeurs désireux d’améliorer l’impact de leur catalogue.
Mieux contrôler les approvisionnements
Les indicateurs environnementaux aident les distributeurs à identifier les produits ayant un impact environnemental important et à mieux orienter leur chaîne d’approvisionnement. Ils représentent pour eux un outil opérationnel pour optimiser leur sélection de produits, influencer leurs fournisseurs et renforcer leur engagement en faveur de pratiques écoresponsables avec un score objectif et fiable. Via une sélection des produits plus vertueux, le distributeur joue ainsi un véritable rôle de tiers de confiance, en choisissant de manière indépendante et objective des produits avec un impact environnemental plus faible.
Des choix de consommation responsables et durables
Le score environnemental sert d’indicateur simple pour sensibiliser le consommateur à l’impact environnemental des produits évalués et permet une comparaison facile de produits similaires, afin de le guider dans son choix.
Quatre facilitateurs phares
La mise en place d’un éco-score repose sur quatre facilitateurs phares. D’abord assurer un sponsorship fort en interne, pour traiter ce sujet qui est transverse à plusieurs métiers dans la même entreprise. En effet, un projet d’éco-score implique de nombreuses équipes (équipes produit, IT, légales) dont la coopération nécessite une impulsion venant du plus haut niveau (CEO, comex). Le comex doit donc définir une vision claire, allouer un budget, une équipe à plein temps, et nommer un responsable. Ensuite définir la gouvernance en mode projet pour en assurer la pérennité.
Un système de gouvernance doit être formulé dès le début du projet, afin de définir les modalités du passage à l’échelle et clarifier le rôle de chacun lors du run. Et voir une organisation IT flexible pour intégrer les données nécessaires au score. L’affichage environnemental fera circuler de nouveaux types de données et mettra en place des flux entre des systèmes qui ne communiquaient pas entre eux auparavant.
Il est donc nécessaire d’identifier les systèmes concernés, de les adapter aux nouveaux flux et de les rendre interopérables. Enfin coconstruire la démarche avec les fournisseurs et parties prenantes, pour s’assurer de leur adhésion. Le calcul des scores implique de récolter des informations sur les produits tout au long du cycle de vie et donc de contacter tous les fournisseurs pour récolter leurs données. Il est ainsi nécessaire de faire adhérer les fournisseurs au projet, afin de fluidifier les échanges et d’assurer la qualité des données transmises.
Construire progressivement
La mise en place d’un projet de scores environnementaux suit une approche progressive, débutant par un Proof of Concept (POC) sur un périmètre restreint pour automatiser et autonomiser le processus avant de l’étendre à grande échelle. Plusieurs étapes clés guident cette expansion graduelle, incluant la définition des objectifs du score, la délimitation du périmètre du POC en considérant les canaux de diffusion et les gammes de produits, et la collaboration avec les fournisseurs pour auditer les données. Pour une mise en œuvre réussie, on vous recommande donc un modèle de projet modulaire, amorcé par un POC pour tester la faisabilité et la méthodologie avant le déploiement à grande échelle.
Vous voilà prêt à déployer votre propre score environnemental avec toutes les cartes en main. Tout d’abord, bâtissez une base solide grâce à une organisation bien structurée et une gouvernance claire. Ensuite, assurez une collaboration fructueuse avec vos fournisseurs et adaptez votre infrastructure IT pour une intégration fluide des données. Puis progressez graduellement en amorçant par un Proof of Concept avant d’aller à grande échelle. De la définition des objectifs à l’automatisation des processus, en passant par la coopération avec les fournisseurs, ces étapes majeures vous guideront vers un déploiement réussi. Alors, à vous de jouer, et bonne aventure de score environnemental !