S’engager résolument dans la transition énergétique
Le diagnostic scientifique synthétisé par le GIEC affirme que l’humanité a mis en route un changement à grande échelle de notre système climatique, dont les effets commencent à être visibles.
« Je partage tout à fait ce diagnostic », affirme Gérard Mestrallet (68), président-directeur général d’Engie. « Je suis absolument convaincu que le réchauffement de la planète peut conduire à une catastrophe et endommager durablement l’équilibre à la surface du globe. La lutte contre le réchauffement climatique est un des défis majeurs qui s’imposent aujourd’hui à l’humanité.
« Ces convictions, je les porte à titre personnel, mais également en tant que P‑DG d’un groupe qui place la préservation de l’environnement au cœur de sa stratégie.
« Nous suivons activement les négociations climatiques internationales et soutenons la nécessité d’un accord mondial équitable pour limiter le réchauffement climatique à 2 °C à l’horizon 2050. »
Une boussole du climat
« J’ai porté au niveau international l’idée d’une généralisation du prix du carbone en m’exprimant au sommet des chefs d’État à New York lors de la Climate Week de septembre, puis au niveau européen dans le cadre du Groupe Magritte, qui réunit les dirigeants des onze principaux énergéticiens européens.
“ Il est plus que temps d’assumer nos responsabilités envers les générations futures ”
Je soutiens maintenant l’instauration de cette “boussole du climat”, que serait un prix carbone mondial, au sein du Business Dialogue, une instance nouvelle qui réunit représentants de gouvernement et chefs d’entreprise, en amont de la COP 21, et que j’ai l’honneur de coanimer.
« Dans un monde qui souffre chaque jour un peu plus des conséquences de l’accélération des perturbations climatiques, il est plus que temps d’assumer nos responsabilités envers les générations futures et de nous engager avec audace dans la lutte contre le réchauffement climatique. »
Un mix énergétique diversifié
« Dans un scénario de rupture de type 2 °C maximum, les émissions de gaz à effet de serre devraient être drastiquement réduites au niveau mondial, ce qui nécessiterait des changements radicaux de la part de tous les acteurs.
C’est une évolution contraignante et ambitieuse que nous appelons de nos vœux et à laquelle, de ce fait, nous nous préparons activement depuis de nombreuses années.
Ainsi, pour maîtriser notre influence sur le climat, tout en répondant à la croissance constante des besoins mondiaux en énergie, nous développons un mix énergétique diversifié, favorisant la croissance des énergies renouvelables et donnant une place importante au gaz, qui est une carte maîtresse de la décarbonisation de nos économies.
Le groupe conçoit aussi des solutions d’efficacité énergétique déployées en interne et auprès de ses clients. « Nous sommes donc mobilisés pour anticiper la concrétisation du scénario 2 °C maximum et avons pour ambition d’être le leader de la transition énergétique en Europe et l’énergéticien de référence dans les pays à forte croissance. »
DES OBJECTIFS AMBITIEUX
Engie, leader de l’éolien terrestre et du solaire en France et premier fournisseur d’efficacité énergétique dans le monde, est mobilisé pour apporter à tous ses clients une énergie moins carbonée, plus fiable, plus flexible et plus intelligente.
Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, nous nous sommes fixé des objectifs ambitieux, à savoir un doublement de notre capacité en énergies renouvelables d’ici 2025 en Europe, une réduction de 10 % des émissions spécifiques de CO2, dues à l’activité de production d’électricité, entre 2012 et 2020, et un accroissement de 40 % de la part de notre chiffre d’affaires issu des activités d’efficacité énergétique entre 2013 et 2018.
En 2014, nous avons également émis 2,5 milliards d’euros de green bonds pour financer des investissements dans les renouvelables et l’efficacité énergétique.
Désastre écologique et catastrophe économique
« Les entreprises ont compris qu’un désastre écologique entraînerait une catastrophe économique ; c’est pour cela qu’elles s’engagent pour limiter leurs effets sur l’environnement et qu’elles réclament un accord de long terme.
Le climat est déjà une donnée importante pour notre activité. La demande d’énergie, et en particulier celle de gaz pour le chauffage des bâtiments, est directement liée au climat et aux températures.
La production d’énergie est aussi extrêmement sensible aux conditions météorologiques : ainsi, la disponibilité en eau est un élément clef de la production hydroélectrique ou du refroidissement de nos centrales thermiques. Il est donc essentiel pour nous d’évaluer les effets du changement climatique sur nos activités pour améliorer leur résilience face aux risques climatiques.
Pour illustration, le groupe a mené récemment une évaluation du stress hydrique pour ses installations “énergie” complétée d’une analyse locale du risque. »
Un défi international, local et sectoriel
« L’adaptation au changement climatique est un vrai défi international, local et sectoriel. Tous les secteurs seront en effet touchés par les conséquences du réchauffement climatique, plus ou moins dramatiquement et rapidement selon leur localisation et la nature de leurs activités.
“ Nous avons enclenché une profonde transformation de notre modèle d’entreprise ”
Pleinement conscient de cette réalité protéiforme, Engie renforce son ancrage auprès des territoires pour mieux appréhender leurs spécificités locales et apporter à chacun de ses clients des solutions performantes et innovantes qui répondent à leurs enjeux, tout en respectant l’environnement. »
Choisir le meilleur chemin
« Pour devenir un véritable architecte énergétique des territoires, nous avons enclenché une profonde transformation de notre modèle d’entreprise, qui bascule le centre de gravité du groupe vers des entités opérationnelles géographiques.
Cela nous permettra de devenir un groupe multilocal, plus réactif et innovant, qui aide chacun de ses clients à choisir le meilleur chemin vers un système énergétique décarboné, digitalisé et décentralisé. »
Un marché mondial du carbone
LUTTER CONTRE LES ÎLOTS DE CHALEUR
Notre filiale Climespace est leader international dans les réseaux de froid urbain, qui constituent l’un des moyens les plus innovants de répondre aux enjeux de la concentration urbaine et de la lutte contre les îlots de chaleur.
Par rapport à une solution individuelle de climatisation, ils permettent d’atteindre des améliorations significatives en matière d’efficacité énergétique (+ 50 %), de diminution des émissions de gaz à effet de serre (– 90 %), tout en réduisant la consommation d’eau (– 65 %).
Le réseau de froid parisien fait ainsi bénéficier la ville de Paris d’un véritable outil de lutte contre le dérèglement climatique et d’une solution énergétique à la fois écologique, innovante et cohérente avec les enjeux d’aménagement durable d’une capitale mondiale.
Qu’est-ce qu’il sortira de la COP 21 ? « Nous travaillons, reprend Gérard Mestrallet, pour que cette rencontre permette la mise en place d’un accord mondial pour limiter le réchauffement climatique, qui doit s’articuler autour d’une généralisation des prix du carbone, en privilégiant le recours à un marché mondial.
« Cet accord doit permettre aux pays de poursuivre leur développement économique, tout en les encourageant à prendre part équitablement à l’effort global de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les entreprises ont impérativement besoin de visibilité et d’un accord cohérent de long terme pour définir leurs priorités et orienter massivement et durablement leurs choix en faveur des solutions peu émettrices de CO2.
« Pour répondre aux besoins d’une économie bas carbone, il est impératif d’accroître le volume des financements privés ciblés vers des investissements respectueux du climat et donc de réorienter une partie de l’investissement mondial. Les investisseurs ont pour cela besoin d’un cadre réglementaire stable et le financement constitue un élément central des négociations climatiques en cours.
« Il serait souhaitable que l’accord de Paris intègre la mise en place de mécanismes de financement adaptés, et le rôle du Green Climate Fund et des banques multilatérales de développement est à cet égard primordial. »
Le risque de la balkanisation
« Si les gouvernements ne s’entendent pas pour construire un cadre général pour le long terme, comme ce fut le cas en 2009 à la conférence de Copenhague, nous assisterons à une balkanisation des politiques climatiques, et ce sera un très mauvais signal envoyé aux entreprises.
“ Les entreprises semblent aller plus vite que les gouvernements ”
« Néanmoins, comme celles-ci contribuent à plus de 70 % des investissements mondiaux de prévention et de limitation du changement climatique, il sera important que l’initiative privée poursuive ses engagements financiers, technologiques et humains.
« « De nombreuses entreprises se sont déjà mobilisées pour agir à leur échelle et proposer des solutions concrètes de lutte contre le dérèglement climatique et ses effets. À l’occasion de la COP 21, toutes les solutions audacieuses et durables développées pour relever les défis énergétiques et environnementaux pourront être partagées entre les différents acteurs.
« Dans cet objectif, Engie s’est allié au Comité 21 et au Club France Développement durable dans le cadre du programme d’actions Solutions COP 21. »
Responsabilités communes
« La transition énergétique est visible partout mais l’ampleur et le rythme de sa mise en œuvre varient fortement d’un territoire à l’autre. La plupart des États sont en effet convaincus de la nécessité de consommer moins et mieux, mais leurs enjeux de compétitivité, leurs ambitions, leurs ressources, leurs moyens et le chemin qu’ils ont à parcourir pour y parvenir diffèrent fortement.
« La répartition des efforts et l’application du principe des responsabilités communes mais différenciées sont de réels points d’achoppement dans les négociations climatiques internationales.
« Les différentes régions du monde peinent à se mettre d’accord sur des objectifs communs, des modalités de mise en œuvre et la définition des contributions précises de chaque pays. »
Exemplarité
« Un prix mondial unique pour le carbone encouragerait la mise en place de politiques climatiques ambitieuses et celle de mécanismes de solidarité envers les pays en développement.
Proposer des solutions concrètes de lutte contre le dérèglement climatique
Si les gouvernements ne sont pas tous mûrs pour cela à l’heure actuelle, l’urgence d’agir contre les effets du changement climatique est bien réelle.
« Il faut souligner que nous vivons une situation rarissime où les entreprises demandent à payer pour les conséquences de leurs activités sur l’environnement, où elles semblent avancer plus vite que les gouvernements.
« Nous attendons maintenant des États une réciprocité d’exemplarité. Ces progrès à l’échelle des entreprises et des États, même s’ils sont circonscrits dans le temps et l’espace, seront des messages forts qui encourageront les autres régions du monde à rejoindre notre dynamique vertueuse. »
Et le rôle de l’X ? « Dans un monde de plus en plus complexe, il faut saluer la pertinence et la qualité de la formation pluridisciplinaire de l’X, qui est sa principale différence avec les autres écoles d’ingénieurs », conclut Gérard Mestrallet.
« Via ses enseignements et ses laboratoires de recherche, notre École a depuis longtemps acquis une expertise internationale sur un grand nombre de problématiques environnementales.
« L’approche spécifique des polytechniciens, permise par leur large assise scientifique, leur ouverture d’esprit et leur adaptabilité, sera de plus en plus nécessaire pour répondre aux défis actuels et à venir de la société. »
Centrale photovoltaïque de Curbans – Alpes de Haute-Provence.
Centrale de production de froid (Société Climespace) au Palais de Tokyo