Seniors et bénévoles, une vie après la vie
La vie professionnelle s’achève, une autre vie commence. En France, plusieurs associations de » seniors bénévoles » permettent aux anciens d’utiliser au mieux leurs compétences et de partager leur expérience, tout en enrichissant leurs propres connaissances et en continuant à participer à la vie active.
Brigitte rentre du Viêt Nam où elle a passé six mois à l’école Hoa Sua située dans la banlieue sud de Hanoi. Cette école des arts ménagers a été fondée en 1994 par une Française et six Vietnamiennes pour la formation professionnelle de jeunes défavorisés. Brigitte, professeur de couture retraitée, a effectué dans le département » couture et broderie » une mission d’appui à l’administration du département, de formation des professeurs et de marketing-publicité pour la boutique de vente des productions. La section » couture » où s’est déroulée sa mission comportait 49 élèves (handicapés moteurs ou malentendants) accompagnés par huit professeurs dont deux malentendants et une handicapée moteur.
REPÈRES
Des programmes originaux comme Agiroute ont pour objectif de lutter contre l’exclusion en facilitant l’accès des jeunes en difficulté au permis de conduire et en aidant les seniors à rester en bonne forme de conduite.
Alain L. et Alain M. sont docteurs en médecine. Ils ont exercé la chirurgie générale et digestive. Ils reviennent de Madagascar où ils ont assuré une formation des chirurgiens de l’hôpital Andranomadio d’Antsirabé à la pratique de la coelioscopie, pendant trois semaines.
Un retraité ne peut pas se présenter en concurrent d’un actif
Jean-Pierre revient de Mauritanie. Il a participé à la réception des travaux du barrage de N’Dieo dans le sud-est de ce pays. Ce barrage, financé par l’Association des migrants de Mauritanie, l’Union européenne et d’autres donateurs et le périmètre d’irrigation associé ont permis aux villageois de passer d’une situation de pénurie alimentaire chronique à des préoccupations commerciales de vente des excédents (fruits, légumes, céréales…). Ancien ingénieur, il a participé à la conception du projet, la recherche des financements, l’exécution avec le concours de bureaux d’études et d’entreprises locales. Qu’est-ce qui réunit Brigitte, Jean-Pierre et les deux Alain ? Ils sont tous les quatre membres de l’Association générale des intervenants retraités, une des associations françaises agissant de façon bénévole pour la coopération et le développement.
Aider les pays en voie de développement
Une concurrence cordiale
Les diverses associations de retraités bénévoles se concurrencent théoriquement. En pratique, chacune dispose de terrains d’activité de prédilection ou s’adresse à des profils plus ou moins spécialisés.
Il n’est d’ailleurs pas rare qu’un même expert bénévole soit adhérent de plusieurs associations, ou qu’un même » client » fasse appel à des experts de plusieurs associations qui travaillent ensuite en équipe.
Les quatre associations françaises les plus connues dans les milieux d’ingénieurs (AGIRabcd, ECTI, EGEE, OTECI) se concertent régulièrement au sein de :
» Seniors experts français « , 15, avenue de Ségur 75007 Paris
tél. : 01 47 05 57 71
seniors.experts.francais@libertysurf.fr
Au niveau européen, les principales associations sont membres de CESES, » Confederation of European Senior Expert Services » qui regroupe 25 organisations de 17 pays, soit 25 000 experts bénévoles.
info@ceses.net
Les diverses associations de retraités bénévoles ont été créées il y a quelques dizaines d’années au moment où se développait le régime de préretraite auquel se résignaient difficilement nombre de professionnels et alors que les pays en développement rencontraient d’immenses difficultés pour améliorer le niveau de vie de leur population. À l’aide aux pays du tiers-monde est venue s’ajouter au fil des ans une aide à d’autres pays des divers continents, puis à ceux d’Europe centrale et orientale. Tout en demeurant prioritaires, ces actions ont été progressivement complétées par une aide au tissu national, notamment de petites et de moyennes entreprises.
Quelques noms connus
Les associations les plus connues dans le milieu des anciens élèves de grandes écoles ou d’universités sont AGIRabcd, ECTI et EGEE. On peut citer également OTECI, de création plus récente. Elles comptent au total environ dix mille » experts » retraités (voir encadrés). Elles se distinguent plus particulièrement par l’origine des adhérents, la cooptation étant une forme répandue de » recrutement « . Par exemple, chez AGIRabcd, un tiers est issu de l’enseignement, un peu plus d’une moitié de l’entreprise. Chez ECTI, on compte plus de la moitié d’anciens élèves d’écoles d’ingénieurs. L’activité est aussi orientée plus particulièrement vers certains secteurs, par exemple études et recherche, production, chez ECTI ; aide à la personne ou support des petites et moyennes entreprises chez EGEE ; soutien scolaire et lutte contre l’illettrisme pour AGIR.
Une déontologie très stricte
AGIRabcd
Association générale des intervenants retraités – Action de bénévoles pour la coopération et le développement
8, rue Ambroise Thomas, 75009 Paris
01 47 70 18 90
agirabcd@agirabcd.org |
ECTI
101–109, avenue Jean Jaurès
92300 Levallois-Perret
Professionnels seniors bénévoles
01 41 40 36 00
accueil@ecti.vsf.org |
EGEE
Entente des générations pour l’emploi et l’entreprise
15, avenue de Ségur, 75007 Paris
01 47 05 57 71
contact@egee.asso.fr |
OTECI Office technique d’études et de coopérations internationales 10, rue du Havre, 75009 Paris 01 56 02 63 02 oteci@oteci.asso.fr 500 experts. |
Comme leur qualificatif de bénévole l’indique, les retraités ne sont pas rémunérés, mais seulement défrayés par le « client » de leurs frais de transport ou d’hébergement. La prestation n’est donc pas gratuite. Elle est payée, soit par le montant global de l’adhésion à l’association (modulé généralement en fonction de la taille de l’adhérent), soit par une participation aux frais de la « mission » considérée.
Il n’en demeure pas moins que l’appel à des retraités bénévoles est sensiblement moins coûteux que l’appel à des prestataires employant des collaborateurs en activité. Se pose donc le problème déontologique de savoir quelles missions accepter. Un retraité ne peut évidemment pas se présenter en concurrent d’un actif. En général, les associations de retraités bénévoles réservent les prestations de leurs membres à des missions ponctuelles, de courte durée et faisant appel à une compétence très spécifique. Sont également aidées les organisations dont les moyens sont très faibles (associations, par exemple) et qui ne pourraient s’offrir le luxe d’une société de conseil. En conclusion, deux constatations d’évidence. Il y a beaucoup à faire en France et pas assez d’adhérents pour s’y atteler. Partout, les délé- gués départementaux recherchent de nouveaux adhérents. L’activité à l’international pourrait être aisément développée si la Coopération française prenait en considération les possibilités d’intervention des seniors, comme savent le faire les Pays-Bas, l’Allemagne et le Royaume-Uni pour ne citer que ceux-là.