Si loin, si proche… le client, éternel eldorado de l’entreprise
Partenaire essentiel, le client doit être plus que jamais au centre de l’entreprise pour que s’établisse avec lui une relation de longue durée. Exigence inévitable : l’entreprise doit en permanence adapter ses produits et services, son organisation, ses modes de relations et sa culture pour donner toujours un plus à son client.
REPÈRES
» Il n’y a qu’un patron : le client. Et il peut licencier tout le personnel, depuis le directeur jusqu’à l’employé, tout simplement en allant dépenser son argent ailleurs. » Qui mieux que Sam Walton, fondateur de Walmart, pouvait résumer aussi simplement l’importance du client pour l’entreprise ? Pour réussir, il faut l’observer, l’étudier, le comprendre pour mieux le séduire, le conquérir, le servir, le satisfaire et enfin le conserver.
Quelle est aujourd’hui la véritable place du client par rapport à l’entreprise ? Comment développer l’orientation client ? Comment associer toutes les forces vives à la conquête de cet » eldorado » ?
Un banquier exigeant
Le client présente de nombreux avantages. Tout d’abord, le client paie et constitue le premier « banquier » de l’entreprise. Par son acte d’achat, il juge et reconnaît la notoriété de la marque, la qualité des produits et services, la qualité de la relation client.
Un client satisfait devient le premier vendeur de l’entreprise
Et surtout, il finance au jour le jour les opérations. Comprendre et répondre aux besoins des clients pour mieux conquérir et fidéliser une base de clients récurrente et fiable est donc essentiel. Cette évidence économique est parfois oubliée par certaines entreprises qui se focalisent alors sur la concurrence, sur la technologie au mépris des attentes des clients, et rognent sur les coûts au détriment de leur satisfaction.
Un commercial d’exception
Le client, souvent rationnel dans son approche, peut être tout à fait surprenant, source d’innovation sans cesse renouvelée, parce qu’il crée l’usage. Un marketeur conçoit le produit avec une promesse en tête, le client en fait souvent tout autre chose. L’utilisation de la Wii dans les maisons de retraite est un détournement utile, ludique et social de la console de jeu. Celle-ci proposait certes une nouvelle approche plus familiale mais le concept n’avait pas été poussé aussi loin. La mention » de 7 à 77 ans » a finalement été appliquée à la lettre.
Et l’engouement a provoqué l’émergence d’un véritable marché de jeux » senior » pour la plus grande joie de ces nouveaux joueurs. Car un client satisfait devient aussi le premier vendeur de l’entreprise : c’est un formidable » évangéliste « , qui harangue ses proches, transmet son enthousiasme à ses réseaux sociaux ou professionnels et défend la marque au quotidien.
Placer le client au centre
L’évangéliste d’Apple
Guy Kawasaki rejoint Apple au tout début de l’aventure Macintosh et est subjugué par le potentiel de l’ordinateur. Il se concentre sur la promotion, défendant et expliquant sans relâche aux communautés de développeurs les potentialités de la machine et l’intérêt de créer des logiciels sur cette base. Il crée un réseau d’évangélistes avec les utilisateurs-clients pour propager le phénomène.
Satisfaire le client n’est pas simple. L’entreprise doit d’abord offrir des produits et services qui répondent aux besoins réels des clients, que ces produits soient des denrées alimentaires ou des services comme les réseaux sociaux.
Par exemple, les processus de conception et développement de produits et services doivent garantir que le client sera intégré à toutes les étapes-clés de la conception et du développement : les études de marché se transforment en focus groups, les études d’opportunité en prototypes, les cahiers des charges en Proofs of Concept, les premiers développements en produits bêta destinés à tester le marché au plus tôt dans le cadre de Friendly User Tests.
Une démarche d’échange permanent
Ensuite, il faut en permanence adapter ces produits et services aux attentes des clients. Les lancements de nouveaux produits doivent alors s’appuyer sur des démarches progressives, itératives et apprenantes, qui permettent d’améliorer les produits au contact des clients. Ces démarches sont particulièrement nécessaires sur des marchés hétérogènes comme celui des petits professionnels, ou bien sur des marchés en devenir comme celui du Cloud Computing aujourd’hui dans les Télécoms.
Elles permettent en effet d’associer des clients-tests qui apprennent avec l’entreprise, donnent un feed-back temps réel et suggèrent les pistes d’évolutions. L’offre gagne alors en fonctionnalités, s’étend progressivement sur une base clients plus large et rode ses processus au quotidien.
Cette démarche de coconstruction requiert un dialogue permanent, constructif et dynamique, très apprécié tant des concepteurs d’offres que des clients. Elle nécessite en revanche des chefs de projets et des équipes aguerris, car les échanges clients sont moins encadrés, les responsabilités sont plus partagées pour permettre souplesse et réactivité face au feed-back client.
Une nécessaire différenciation
Il faut créer une expérience distinctive pour « son » client
Enfin, il faut créer une expérience distinctive pour « son » client, en gérant activement ses attentes et en l’accompagnant sans faille, de la prise d’informations à la décision, de l’acte d’achat jusqu’à l’utilisation ou la consommation du produit ou du service. C’est la désormais célèbre Customer Experience, cet ensemble d’émotions ressenties tout au long du parcours client, qu’il s’agit de définir, maîtriser et améliorer.
La qualité de cette expérience client constitue en effet un facteur majeur de différenciation, notamment dans les marchés où l’innovation produit ne permet plus de se différencier durablement.
Une organisation repensée
Le management de l’expérience client suppose toujours une transformation profonde de l’entreprise, caractérisée par un design produit intégrant des exigences clients tangibles et intangibles, des processus clients transverses de bout en bout, et une approche clients faite d’écoute, d’empathie et de qualité de service. Pour ce faire, au-delà des fonctions naturellement au contact direct, le client doit être rapproché, au plus profond de l’organisation, des fonctions qui ne sont pas à son contact : production, SI, back-office, logistique…
Ces fonctions doivent pouvoir se nourrir de la proximité clients et mesurer leur valeur ajoutée à l’aune de leurs besoins. C’est par exemple ce qui guide certaines entreprises à intégrer leur back-office de gestion administrative clients dans des directions de la relation clients.
Une culture client
Nespresso
Comment transformer trois grains de café en produit de luxe ? Nespresso est l’exemple même de l’importance de l’expérience client, puisqu’elle a fait tout son succès. Avec des boutiques, rares mais avec un personnel au petit soin, une carte de membre, une documentation sélective sur papier glacé, des appels personnalisés et proactifs du service client, Nespresso fait de son client, devenu unique à ses yeux, l’élite des dégustateurs de café.
Cette transformation, pour être aboutie, nécessite enfin d’adapter la culture d’entreprise. Ce changement culturel commence par un changement de vocabulaire : on passe de l’utilisateur, à l’usager, puis au client. Ce changement s’est opéré, plus ou moins bien, dans nombre de grandes entreprises : GDF-Suez, EDF, La Poste… sont autant d’exemples qui témoignent de la puissance du verbe.
Cette évolution vient encore d’être soulignée dans le plan à cinq ans d’Orange « Conquête 2015 ». Du PDG à l’agent, nul n’ignore aujourd’hui être au service du client.
Ce changement culturel doit irriguer les modes d’échange avec les clients. Les relations clients doivent, en capitalisant sur les opportunités offertes par les nouvelles technologies de l’information, passer d’une forme institutionnelle, structurée, contrôlée, et souvent insipide, à une forme ouverte, plus humaine, qui met en prise directe collaborateurs et clients. La SNCF comme la RATP ont, pour dynamiser la proximité clients, lancé des sites mettant en relation directe les clients (et leurs questions) et les personnels. Ces sites constituent l’une des facettes d’une nouvelle communication client, au même titre que les blogs d’employés, utilisés de manière intensive par Microsoft notamment, ou les tweets, les pages Facebook officielles ou moins officielles. L’ouverture et le partage, comme toujours, sont bien les ciments d’une relation pérenne.
Un levier de mobilisation du personnel
debats.sncf.com sous Feed.back2 |
L’orientation clients peut influencer durablement l’entreprise. Le client peut ainsi se révéler la pierre angulaire de la mobilisation des employés. En particulier, les grandes structures sont trop souvent en proie à des conflits internes qui naissent de la complexité même de l’organisation et d’un mode de fonctionnement en silos.
L’ouverture et le partage sont les ciments d’une relation pérenne
La meilleure solution pour dépasser ces conflits consiste à aligner l’ensemble des fonctions sur les besoins du client et à engager les collaborateurs pour la satisfaction clients. Le client constitue en effet, pour tous, une référence externe impartiale, non sujette aux luttes politiques internes, et un formidable levier de mobilisation.
La conquête de l’eldorado
Ces différentes approches du client, ces nouveaux modes d’échange ne traduisent qu’une seule et même évidence : le client est aujourd’hui le partenaire indispensable au succès de l’entreprise, loin du juge redouté ou de l’utilisateur asservi.
Les plus belles expériences s’inscrivent désormais dans une relation de proximité, ouverte, partagée et pérenne : c’est là le nouvel eldorado. Car au final, le succès (l’amour ?), n’est-ce pas ne plus faire qu’un ?