Siméon-Denis Poisson
Bonne idée qu’a eue Mme Kosmann- Schwarzbach, professeure honoraire de l’École polytechnique, de rendre hommage au mathématicien Siméon-Denis Poisson (1781−1840, X 1798) en rééditant un travail collectif que lui avaient consacré, à l’occasion du bicentenaire de sa naissance en 1981, trois scientifiques prestigieux aujourd’hui disparus (Michel Métivier, Pierre Costabel, Pierre Dugac) – et en le complétant par des articles de chercheurs actuels.
La vingtaine d’articles ainsi réunis constitue un ensemble… dense, accessible à un lecteur féru d’histoire des sciences et de mise en perspective avec les connaissances mathématiques et physiques les plus récentes (ce qui est plus rarement fait, et l’est avec bonheur dans cet ouvrage).
Car, s’il a pu être reproché sans vergogne à Poisson, de son vivant puis plus tard, par Maximilien Marie (X 1838) dans son Histoire des mathématiques, d’être touche-à- tout et par surcroît de compliquer les sujets qu’il touchait – un comble ! – il est clair, avec cent soixante-dix ans de recul à présent, que Poisson a laissé une marque indélébile dans de nombreux domaines :
- la loi de Poisson en probabilités,
- la notation dite crochet de Poisson (un hameçon ?) ou le coefficient d’élasticité transverse de Poisson en mécanique,
- la tache de Poisson en optique (qui donna du fil à retordre à Fresnel !)
- et bien sûr l’équation de Poisson (équation aux dérivées partielles de type ΔΦ = f, où Φ peut être un flux, un potentiel, et f est une fonction) en physique mathématique, indispensable en électrostatique et en théorie de la gravitation.
L’ouvrage comporte à la fois des articles de haut niveau mathématique (pour amateurs de groupes de Lie et de géométrie symplectique) et des articles mêlant histoire, politique et science qui nous replongent dans cet âge d’or de la science en France – coïncidence, il correspond à peu près aux dates de la carrière de Poisson.
Comme l’écrit Costabel avec élégance, l’œuvre de Poisson « s’étendit sur une trop longue durée pour ne pas présenter autre chose que des éléments positifs » : cet ouvrage complet et équilibré nous permet de faire la part des choses, d’y trouver un bilan positif et enfin de saisir comment des idées et notations arrivent à maturité bien après la mort de leur concepteur, pour être couramment utilisées dans la science contemporaine.