Smart Grids : le logiciel au cœur des systèmes électriques

Dossier : Économie numérique : Les succèsMagazine N°675 Mai 2012
Par Hervé RANNOU

Un monde de l’énergie très divers

Les éner­gé­ti­ciens doivent gérer en temps réel l’équilibre du réseau

De par la nature et les contraintes des flux élec­triques, les éner­gé­ti­ciens ont tou­jours été ame­nés à devoir gérer en temps réel l’équilibre du réseau. De la pro­duc­tion à la consom­ma­tion, ils ont mis en place des sys­tèmes tou­jours plus éla­bo­rés pour assu­rer cet équi­libre. Les équi­pe­ments infor­ma­tiques et les réseaux de com­mu­ni­ca­tion ont ain­si pris une place de plus en plus impor­tante dans les années 1980 et sur­tout lors de la décen­nie sui­vante. La France est sou­vent appa­rue comme un modèle avec une capa­ci­té à gérer les grands équi­libres à l’échelle nationale.

REPÈRES
Bien plus qu’une simple évo­lu­tion tech­no­lo­gique, les smart grids asso­cient deux mondes : l’un, l’énergie, fait d’enjeux stra­té­giques struc­tu­rants avec des cycles longs et des inves­tis­se­ments lourds ; l’autre, le numé­rique, ten­du vers un uni­vers flexible en per­pé­tuel chan­ge­ment asso­ciant infra­struc­tures concur­ren­tielles, com­po­sants logi­ciels, appli­ca­tions et ser­vices allant du fixe vers une mobi­li­té étendue.

Oligopoles européens

La plu­part des autres pays euro­péens ont des acteurs majeurs, les­quels ne sont géné­ra­le­ment domi­nants que sur une par­tie de leur ter­ri­toire. C’est le cas en Alle­magne, en Espagne, en Ita­lie, en Grande-Bre­tagne. Sou­vent dotés d’une forte culture d’investissement, ces acteurs ont, à l’instar d’EDF, moder­ni­sé leurs réseaux, mais dans les limites que leur impo­sait leur pré­sence géo­gra­phique. De sorte que les rela­tions entre ces opé­ra­teurs existent natu­rel­le­ment, mais ne sont pas tou­jours des plus fluides puisque les échanges d’énergie sont sous-ten­dus par des méca­nismes de marché.

Opérateurs locaux

Diver­si­fi­ca­tion
Plu­sieurs local uti­li­ties (opé­ra­teurs locaux) ont été en pointe, non pas néces­sai­re­ment dans le pilo­tage numé­rique de leur infra­struc­ture, mais dans les ser­vices aux usa­gers et aus­si… dans le déploie­ment du haut débit. Ce fut par exemple le cas de Rhei­nE­ner­gie avec sa filiale Net­Co­logne qui exploite le réseau haut débit de la ville de Cologne, ou encore des socié­tés locales de Flo­ride qui, au sein de la Flo­ri­da Muni­ci­pal Power Agen­cy, sont impli­quées dans le déve­lop­pe­ment des infra­struc­tures et des ser­vices haut débit.

Cer­tains pays – notam­ment l’Allemagne et les États-Unis – vont plus loin dans la décen­tra­li­sa­tion avec des socié­tés locales de dis­tri­bu­tion et de com­mer­cia­li­sa­tion dont une part signi­fi­ca­tive appar­tient aux col­lec­ti­vi­tés. Certes, cela ren­force la diver­si­té des acteurs, mais, d’un autre côté, cette situa­tion crée des petits mono­poles locaux dont la taille rend illu­soire une quel­conque seg­men­ta­tion entre dis­tri­bu­tion et com­mer­cia­li­sa­tion. Il n’en reste pas moins vrai que nombre d’entre eux ne sont pas en reste en matière de numérique.

Le poids des consommateurs

Aux États-Unis, le consom­ma­teur final est, de fait, au cœur des pré­oc­cu­pa­tions des local uti­li­ties. C’est à par­tir de ses besoins (et de ce qu’on va pou­voir lui vendre) que s’agencent les stra­té­gies d’investissement.

Réfé­ren­dum
La ville de Boul­der, pion­nière en matière de smart grids, a dû orga­ni­ser, en rai­son de dépas­se­ments bud­gé­taires, un réfé­ren­dum pour pour­suivre ou non sa poli­tique d’investissement dans les smart grids. Celle-ci n’ayant été vali­dée qu’à 52 %, une faible majo­ri­té, la ville a esti­mé qu’elle ne dis­po­sait plus de la légi­ti­mi­té suf­fi­sante et a révi­sé sa politique.

Beau­coup de public uti­li­ties ne consi­dèrent pas que les sépa­ra­tions entre ser­vices éner­gé­tiques, ser­vices de télé­coms, ser­vice de télé­vi­sion, ser­vices Inter­net sont structurantes.

Sou­mises au contrôle exer­cé par les public uti­li­ty com­mis­sions (dont les membres sont élus), les local uti­li­ties dis­posent cepen­dant d’une marge de manœuvre limi­tée en matière d’investissements lourds. Les citoyens y ont leur mot à dire. Et, dans de nom­breux cas, ces der­niers freinent les inves­tis­se­ments qui ont plus vite fait de leur faire perdre leur siège que de leur assu­rer leur réélection.

Garantir la stabilité des réseaux

L’émergence des éner­gies renou­ve­lables oblige d’ores et déjà les dif­fé­rents acteurs de la chaîne à repen­ser les réseaux. Du fait de leur carac­tère inter­mit­tent, ces nou­velles éner­gies peuvent mettre en péril la sta­bi­li­té du réseau. Un pla­fond de 30 % – défi­ni de manière plus ou moins empi­rique à par­tir de tra­vaux menés en Grèce – limite ain­si la puis­sance ins­tan­ta­née issue des éner­gies renou­ve­lables dans le réseau. Cette contrainte peut être dépas­sée dans les faits en sta­bi­li­sant loca­le­ment les sources d’énergies renou­ve­lables par des sources de pro­duc­tion stable. Une deuxième option consiste à déve­lop­per les capa­ci­tés de sto­ckage. Une troi­sième, qui peut se com­bi­ner avec la pré­cé­dente, est de gérer ce risque en mode temps réel à par­tir de sys­tèmes de contrôle-com­mande numé­riques à grande échelle.

Consommateur et acteur

À l’autre bout de la chaîne, le consom­ma­teur va aus­si prendre part à l’évolution qui se pré­pare. Il va en deve­nir de plus en plus acteur. Ce der­nier ne per­çoit pas tou­jours les ver­tus du comp­teur intel­li­gent. Les éco­no­mies d’énergie ont fina­le­ment un impact limi­té sur sa fac­ture et seuls des ser­vices véri­ta­ble­ment inno­vants pour­ront l’amener à réduire sa consommation.

Contro­verse
En Alle­magne et dans les pays nor­diques, le déve­lop­pe­ment des éner­gies renou­ve­lables amène la construc­tion de cen­trales ther­miques for­te­ment pol­luantes pour pal­lier les baisses de pro­duc­tion inhé­rentes aux éoliennes ou aux pan­neaux solaires. D’où une contro­verse en rai­son des rejets de CO2 induits.

À l’inverse, des sys­tèmes semi-auto­ma­tiques peuvent per­mettre d’assister l’usager dans cette marche vers l’efficacité éner­gé­tique. Et sur­tout, le comp­teur intel­li­gent va pro­gres­si­ve­ment deve­nir le com­po­sant du bout de chaîne de la ges­tion en temps réel de l’équilibre, per­met­tant d’anticiper des périodes à risque.

Le consom­ma­teur va prendre part à l’évolution qui se prépare

Cette évo­lu­tion des réseaux éner­gé­tiques ne concerne pas direc­te­ment les infra­struc­tures élec­triques mais la manière dont elles vont être opé­rées en temps réel au niveau de chaque com­po­sant et opti­mi­ser leur fonctionnement.

Le numé­rique va s’insérer dans les par­ties les plus tech­niques de la ges­tion de l’énergie jusqu’à tout ce qui a trait à la mise en œuvre de ser­vices pro­po­sés aux uti­li­sa­teurs. Cette réa­li­té pose imman­qua­ble­ment la ques­tion du dépla­ce­ment de la chaîne de valeur. Alors que l’électricité était un mar­ché essen­tiel­le­ment ver­ti­cal, le numé­rique et ses logiques d’interface vont conduire vers un sys­tème plus hori­zon­tal et segmenté.

Les grandes ambitions des acteurs du numérique

Les acteurs des télé­coms et des logi­ciels ne se limitent pas aux smart grids. Ces groupes entendent inves­tir le champ de la ville intelligente.

Comp­teurs intelligents
Deux exemples illus­trent les nou­veaux ser­vices qu’on peut attendre des comp­teurs intel­li­gents. L’effacement est un ser­vice de pilo­tage intel­li­gent des cou­pures d’énergie, sur des périodes pré­dé­ter­mi­nées, éven­tuel­le­ment modi­fiables. L’opérateur inter­mé­diaire qui com­mer­cia­lise ce ser­vice à un client peut alors revendre un poten­tiel d’énergie dis­po­nible à un opé­ra­teur de réseau lorsque celui-ci en a besoin en cas de surcharge.
Quant au ther­mo­stat intel­li­gent, il est déjà très pré­sent sur le mar­ché. L’un d’entre eux a été créé par le fon­da­teur de l’iPod, Tony Fad­del. Simple et ergo­no­mique, il apprend sur­tout le com­por­te­ment de l’usager et agit auto­ma­ti­que­ment en consé­quence. L’utilisateur peut contrô­ler son ther­mo­stat manuel­le­ment ou sur iPhone, et dis­po­ser de don­nées sur son his­to­rique de consom­ma­tion ou ses dépenses.

IBM a ain­si lan­cé en 2010 sa stra­té­gie « Smar­ter City » qui met la ges­tion des don­nées (trans­ports, éner­gie, cir­cu­la­tion, déchets, eau, etc.), au cœur des pilo­tages opé­ra­tion­nel et pré­vi­sion­nel de la ville de demain. Orange lui a emboî­té le pas avec une démarche ana­logue. D’autres, enfin, issus de l’électronique – ST Microe­lec­tro­nics, Texas Ins­tru­ments, Intel, Sagem­com – déve­loppent des familles de pro­duits avec des inves­tis­se­ments signi­fi­ca­tifs dans le logi­ciel. Sans oublier les coréens LG et Sam­sung, qui abordent le mar­ché en par­tant de l’habitat intelligent.

Les acteurs de l’énergie consi­dèrent avant tout les TIC comme un outil. S’ils per­çoivent très bien que cet outil affecte les aspects les plus stra­té­giques de leur métier, ils conti­nuent de les voir comme un sec­teur tech­no­lo­gique col­la­té­ral. Ce n’est pas néces­sai­re­ment la vision des acteurs du numé­rique, qui appré­hendent les smart grids comme un mar­ché très prometteur.

Le poids croissant du logiciel

Un peu comme le sec­teur des télé­com­mu­ni­ca­tions l’a connue et comme celui de la télé­vi­sion la vit actuel­le­ment, nous allons vers une « logi­cia­li­sa­tion » des sys­tèmes tech­niques inter­mé­diaires. L’Europe pour­rait être mal armée pour rele­ver ce défi, car elle souffre d’un défi­cit d’acteurs majeurs de l’industrie du logiciel.

Des mil­liards de dol­lars investis
China’s State Grid Cor­po­ra­tion, le ges­tion­naire du réseau élec­trique en Chine, va inves­tir 250 mil­liards de dol­lars dans les infra­struc­tures éner­gé­tiques dont 45 pour les smart grids. Cette somme, qui semble énorme, est rela­ti­ve­ment faible par rap­port aux 7200 mil­liards d’investissements (dont 480 mil­liards en Europe) annon­cés sur les seules infra­struc­tures élec­triques dans le monde jusqu’à 2035 (source World Ener­gy Out­look 2011).

Depuis envi­ron deux ans, les indus­triels euro­péens de l’énergie affichent leur volon­té d’acquérir une exper­tise logi­cielle. L’acquisition en juin 2011 de la socié­té de logi­ciel Telvent par Schnei­der Elec­tric et celle de la socié­té amé­ri­caine UISOL par Alstom en mars 2011 sont des exemples par­mi d’autres.

L’Europe souffre d’un défi­cit d’acteurs majeurs de l’industrie du logiciel

Outre-Atlan­tique, GE a créé une offre Smart Grid as a Ser­vice. En par­te­na­riat avec IBM, SAP et Tera­da­ta, ITRON lance Active Smart Grid Ana­ly­tics, qui met en avant la ter­mi­no­lo­gie big data, très en vogue en ce moment dans le numé­rique. La mise au point de nou­veaux outils pour navi­guer et exploi­ter les déluges de don­nées bien­tôt dis­po­nibles devient une nécessité.

Le logi­ciel va prendre une part majeure dans les archi­tec­tures des infra­struc­tures éner­gé­tiques. Cette évo­lu­tion aura des consé­quences impor­tantes sur la régu­la­tion du sec­teur (mon­tée en puis­sance des inter­faces numé­riques) et sur les modèles économiques.

Guerre des standards

Les stan­dards vont jouer un rôle essen­tiel dans la com­pé­ti­tion inter­na­tio­nale qui se met en place. L’International Elec­tro­tech­ni­cal Com­mis­sion joue un rôle incon­tes­table pour har­mo­ni­ser la nor­ma­li­sa­tion à l’échelle mon­diale. Le CEN, le CENELEC et l’ETSI semblent vou­loir de manière assez concrète y appor­ter leur pierre tout en sou­hai­tant faire exis­ter l’Europe.

1800 mil­liards de relevés
Les 35 mil­lions de comp­teurs intel­li­gents qui seront ins­tal­lés en France dans les années à venir devraient géné­rer 1800 mil­liards de rele­vés par an, soit de l’ordre de plu­sieurs péta­oc­tets (1015), et pro­ba­ble­ment bien plus à moyen ou long terme. Cette masse de don­nées inté­resse les grands noms de l’informatique, tout comme les opé­ra­teurs télé­coms qui misent, d’un côté, sur leur « box » pour déve­lop­per des ser­vices mul­ti­mé­dias chez le client – et pour­quoi pas, demain, comme pas­se­relle de ges­tion des don­nées éner­gé­tiques – et, de l’autre, sur le cloud com­pu­ting pour la ges­tion des conte­nus qui y seront liés.

Mais la nor­ma­li­sa­tion reste un domaine com­plexe où inté­rêts natio­naux, poids de gros acteurs et stra­té­gies de valo­ri­sa­tion des bre­vets se mélangent, sans oublier les vel­léi­tés de la Chine à s’imposer aujourd’hui en misant sur le poids de son mar­ché intérieur.

Un jeu d’autant plus com­plexe que les cultures en matière de stan­dar­di­sa­tion sont très dif­fé­rentes dans l’énergie et dans le numérique.

États et secteur privé

Tan­dis que le sec­teur de l’énergie reste plu­tôt dans un mar­ché mar­qué par une gou­ver­nance de la stan­dar­di­sa­tion pilo­tée par les États, celui du numé­rique a migré pro­gres­si­ve­ment vers des struc­tures non éta­tiques (ETSI, IEEE, W3C, etc.). Mais celles-ci sont débor­dées par la stan­dar­di­sa­tion de fac­to qui est au cœur de la bataille entre les grands acteurs. Le logi­ciel, et en par­ti­cu­lier l’open source, sont par leur carac­tère viral bien plus effi­caces que des tam­pons d’organismes de nor­ma­li­sa­tion qui ne sont sol­li­ci­tés qu’a pos­te­rio­ri.

Enjeux essentiels

Domi­na­tion américaine
En matière de stan­dards de fait, Micro­soft, Apple, Google, Ama­zon et d’autres pré­emptent le mar­ché au tra­vers des API (appli­ca­tion pro­gram inter­face). L’Europe est la grande per­dante de cette évo­lu­tion dans les télé­com­mu­ni­ca­tions. Alors qu’elle domi­nait la stan­dar­di­sa­tion, elle peine à trou­ver sa place dans ce mar­ché des API.

Quelques signes peuvent conduire à pen­ser que ce champ concur­ren­tiel va s’étendre aux smart grids. Pen­dant que les uns s’intéressent aux prises des véhi­cules élec­triques et aux inter­faces phy­siques des comp­teurs, d’autres pensent déjà aux API de demain dans l’énergie. Cette évo­lu­tion masque des enjeux essen­tiels aux­quels l’Europe devrait être atten­tive si elle ne veut pas voir, demain, émer­ger un Google de l’énergie.

Cybersécurité

La ques­tion de la sécu­ri­té des réseaux élec­triques face aux cybe­rat­taques est désor­mais consi­dé­rée comme l’un des sujets majeurs des smart grids.

La sécu­ri­té des réseaux élec­triques face aux cybe­rat­taques est un sujet majeur

Des rap­ports sou­lignent les risques d’ores et déjà encou­rus. Aux États-Unis, le Congrès, le Dépar­te­ment de l’Énergie, le NIST et d’autres ins­ti­tu­tions se sont empa­rés du sujet. L’Europe s’y inté­resse, mais les ini­tia­tives de l’ENISA (Euro­pean Net­work and Infor­ma­tion Secu­ri­ty Agen­cy) sont peu visibles.

Si les éner­gé­ti­ciens ne sont pas en train de décou­vrir les ques­tions de cyber­sé­cu­ri­té, le degré d’interconnexion crois­sant des com­po­sants logi­ciels, des équi­pe­ments, cou­plés à des auto­mates, crée de nou­velles vul­né­ra­bi­li­tés, comme le sou­li­gnait récem­ment un rap­port du MIT.

Ce sujet, trai­té au sein de plu­sieurs pro­jets natio­naux ou euro­péens, néces­si­te­ra des inves­tis­se­ments spé­ci­fiques encore rela­ti­ve­ment peu programmés.

Des filières amenées à coopérer

En France, les filières éner­gé­tiques et numé­riques com­mencent véri­ta­ble­ment à vou­loir col­la­bo­rer en matière de R&D. Les rap­pro­che­ments esquis­sés entre les pôles Cap Éner­gie et SCS dans le Sud, Mina­lo­gic et Tenerr­dis en Rhône-Alpes ou la créa­tion d’un groupe de tra­vail sur les smart grids dans Sys­té­ma­tic en témoignent. Une coor­di­na­tion entre filières est en train de se mettre en place. Espé­rons que les finan­ce­ments de pro­jets soient à la hau­teur des enjeux pour la France.

Notre pays, et plus glo­ba­le­ment l’Europe, doivent trou­ver leur place sur ce mar­ché de l’énergie dont les contours et les modèles éco­no­miques risquent d’être struc­tu­rel­le­ment affec­tés par le déve­lop­pe­ment actuel des smart grids.

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