Stravinsky par Riccardo Chailly
Stravinsky nous stupéfie sans cesse avec son imagination et ses incroyables sonorités. Il suffit d’écouter trois mesures de sa musique pour deviner aussitôt qui les a composées. C’était un génie.
Riccardo Chailly
Un génie est une personne qui se démarque de façon exceptionnelle de ses contemporains par un talent hors du commun et/ou une habileté intellectuelle remarquable, voire une aptitude créatrice extraordinaire, notamment dans le domaine artistique.
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Si l’on accepte cette définition, Stravinsky est sans aucun doute le compositeur le plus « génial » du XXe siècle, comme on peut le dire en peinture de son ami Picasso auquel il peut être comparé à bien des égards. Talent hors du commun, décelé dès le début par son maître Rimski-Korsakov ; habileté intellectuelle remarquable, comme le montre son adaptation fusionnelle aux ukases chorégraphiques de Diaghilev. Enfin, aptitude créatrice exceptionnelle qui va lui faire explorer plusieurs manières, de la musique russe à la musique sérielle en passant par le style néoclassique, au cours d’une carrière de compositeur qui s’étale sur près de 70 ans, des années 1900 à 1970.
Et, par-dessus tout, à travers les styles et les manières, la « patte » de Stravinsky qui vous fait l’identifier quelle que soit l’œuvre au bout de quelques mesures, comme l’écrit Riccardo Chailly. Cette unité est particulièrement évidente dans l’intégrale des enregistrements de Chailly pour Decca, à la tête de plusieurs orchestres dont celui de Cleveland, le Gewandhaus de Leipzig, l’Orchestre du Festival de Lucerne, le Concertgebouw, etc. Cette anthologie parcourt toute l’œuvre de Stravinsky en 32 œuvres :
- les blue chips : L’Oiseau de feu, Petrouchka, Pulcinella (version intégrale du ballet en vingt tableaux, avec voix, que l’on ne joue pratiquement jamais), Le Sacre du printemps (qui déclencha un scandale, comme on le sait, lors de la première en 1913 sous la baguette de Pierre Monteux, et qui a influencé toute la musique du XXe siècle), L’Histoire du soldat, Le Chant du rossignol, Divertimento, plus connu sous le nom du Baiser de la fée, parodie exquise de Tchaïkovski ;
- les œuvres importantes moins connues : Le Roi des étoiles, -Dumbarton Oaks, la Symphonie des Psaumes, Jeu de cartes, le Concerto pour violon en ré majeur, Œdipus rex, Apollon musagète, et l’intégrale de l’opéra The Rake’s Progress ;
- enfin des pièces rarement jouées : Le Faune et la Bergère, Feu d’artifice, Scherzo fantastique, Renard, l’Octuor, les deux Suites, Tango, Ragtime, Danses concertantes, Norwegian Moods, Agon de sa période sérielle, et le Chant funèbre récemment découvert, composé à la mémoire de Rimski-Korsakov.
Cette somme par l’un des très grands chefs vivants est plus large que celle de Boulez pour DGG publiée en 2010 (22 œuvres). Chailly dirige avec enthousiasme et précision, un peu comme Svetlanov, ces œuvres superbement orchestrées. Immergez-vous avec délices dans cette musique unique et foisonnante, en prenant votre temps. Vous en éprouverez in fine un sentiment rare et gratifiant qui parcourt toute l’œuvre de Stravinsky : la joie.
11 CD DECCA