Un atome de silicium en plus pour créer des térahertz
Entre infrarouge et microondes, les ondes térahertz ont longtemps été inexplorées. Aujourd’hui, leurs applications se multiplient, des scanners corporels à l’agroalimentaire en passant par la santé ou les ordinateurs de l’avenir.
Cependant, générer des térahertz reste complexe, coûteux, et impose de recourir parfois à des dispositifs immenses comme les synchrotrons.
En utilisant une panoplie de méthodes théoriques (simulations de dynamique moléculaire, calculs ab initio, etc.), Holger Vach, du Laboratoire de physique des interfaces et couches minces (LPICM, École polytechnique-CNRS), a montré qu’il est possible d’obtenir spontanément un rayonnement térahertz grâce aux propriétés mécaniques d’un nanocristal de silicium aromatique.
Le potentiel des ondes térahertz est important. Contrairement aux rayons X, elles sont nonionisantes, ce qui préserve les tissus vivants et la matière. Les débouchés sont nombreux : médecine, sécurité, télécommunications à haut débit, caractérisation des matériaux, observation astronomique, ordinateurs du futur, etc.
Mais le problème de la miniaturisation des dispositifs et du coût de fabrication reste un frein important à leur développement.
La simulation précède la démonstration
L’avancée majeure de son travail réside dans l’étude des propriétés de cette molécule particulière mesurant moins d’un nanomètre : son atome central de silicium oscille spontanément sur une ligne droite à une fréquence de 3 THz. Holger Vach a d’abord démontré la possibilité de créer une molécule de silicium dite aromatique, recherchée depuis plus de cent ans.
“ Ce type de nanocristal a déjà été observé par hasard ”
« Tout ceci a été rendu possible grâce aux simulations ab initio qui m’ont permis d’analyser les propriétés physiques de cette structure, explique Holger Vach. Ce type de nanocristal a déjà été observé par hasard lors d’expériences, mais les chercheurs ne s’y étaient pas intéressés, ignorant ces caractéristiques. La prochaine étape est d’en produire de façon contrôlée. »
Une révolution de la chimie
Ces nanocristaux ont de nombreuses qualités. D’un diamètre de 0,8 nm, ils peuvent être intégrés dans des systèmes nanométriques. Composés uniquement d’atomes de silicium non toxique et de faible coût, ils pourraient être utilisés comme nano-fours dans le traitement hyperthermique du cancer ou comme nano-oscillateurs dans les systèmes informatiques.
Autre exemple : ils absorbent la lumière dans les ultraviolets, le visible et l’infrarouge, c’est-à-dire dans un champ bien plus large que les nanocristaux classiques utilisés dans les cellules photovoltaïques actuelles, ce qui prédit des panneaux photovoltaïques plus efficaces.
À l’instar de la découverte du benzène et de son caractère aromatique, ce nanocristal de silicium pourrait révolutionner la chimie inorganique tant au niveau théorique qu’industriel.
Structure du nanocristal : les atomes de silicium sont représentés par des sphères grises et des atomes d’hydrogène par des sphères blanches
• Notez que l’atome de silicium central a six voisins au lieu de quatre habituels.
Courbe rouge : mouvement ordonné de l’atome de silicium intérieur,
Courbe verte : mouvement aléatoire de l’un des dix-huit autres atomes de silicium,
Courbe violette : mouvement de l’atome central de Si dans un nanocristal comparable, mais non-aromatique sous les mêmes conditions ;
Fréquence d’oscillation de l’atome de silicium interne en fonction de la température du nanocristal.