Un bâtiment à énergie positive
Selon le calendrier prévu par le Grenelle de l’Environnement, la totalité des immeubles mis en chantier devra avoir un bilan énergétique positif à l’horizon 2020. Ce défi technique se double d’un défi économique. Un nouveau concept de bureau ouvre la voie à un futur standard de l’immobilier.
Les promoteurs doivent inventer aujourd’hui les immeubles » vertueux » de demain, très faiblement consommateurs d’énergie, capables de produire leur propre énergie, et proches de la neutralité en carbone, sans sacrifier pour autant le confort de ses utilisateurs. Selon le calendrier prévu par le Grenelle de l’Environnement, la totalité des immeubles mis en chantier devra avoir un bilan énergétique positif à l’horizon 2020. Ce défi technique se double d’un défi économique car il faut que ces immeubles vertueux aient un coût acceptable pour le marché.
Le secteur du bâtiment est responsable de 40 % de la consommation des énergies non renouvelables en France et de 25 % des émissions de gaz à effet de serre.
C’est la démarche dans laquelle s’est, par exemple, engagé Bouygues Immobilier en lançant un concept d’immeuble de bureaux à énergie positive appelé Green Office (marque déposée). La première version de ce programme sera réalisée à Meudon (92), pour une livraison en 2011.
Consommer moins
C’est avant tout un immeuble basse consommation (BBC), conçu pour consommer le moins d’énergie possible. Cette conception a pour but de réduire les pertes de chaleur et d’optimiser la lumière naturelle. L’orientation nord-sud est ainsi privilégiée et les orientations ouest sont limitées au minimum.
Les plateaux favorisent un éclairage naturel, ce qui rend possible l’aménagement des bureaux en premier jour. L’orientation de l’immeuble et la dimension des volumes limitent ainsi les surfaces intérieures éclairées en second jour et évitent les éclairages artificiels prolongés. Dans les bureaux, une lampe individuelle fonctionnant à la fois pour l’éclairage d’ambiance et l’éclairage individuel du poste de travail fonctionne avec un détecteur de présence et permet de limiter la consommation.
Chaque collaborateur devient acteur de son confort et agit sur son environnement
Chaque collaborateur devient acteur de son confort et agit sur son environnement via son poste de travail : gestion de l’éclairage individuel, de la consigne de chauffage et des brasseurs d’air, des stores d’occultation sur les parties vitrées…
Les façades jouent un rôle prépondérant dans la régulation thermique. L’isolation, d’une épaisseur de 20 cm, est réalisée par l’extérieur de façon à assurer un haut rendement et à supprimer les ponts thermiques. Les surfaces vitrées ont été elles aussi optimisées et représentent 5/12e du bâtiment. La protection solaire est assurée par des stores extérieurs motorisés.
L’immeuble est conçu sans faux planchers et sans faux plafonds et fonctionne sans climatisation sur le principe de la ventilation naturelle. Pendant la nuit, en période de fortes chaleurs, les stores motorisés s’ouvrent automatiquement et laissent entrer la fraîcheur de la nuit. L’inertie du béton permet de stocker les frigories de l’air ambiant et de les restituer pendant la journée. Des brasseurs d’air assurent la ventilation. En hiver, la ventilation est assurée par un système à double flux.
Produire de l’énergie
La première source d’énergie est le solaire, assuré par 4 200 m² de panneaux photovoltaïques intégrés au bâti sur les façades sud et est et disposés sur l’auvent d’accès au bâtiment, ainsi que sur les abris des parkings extérieurs. L’électricité produite sera revendue à EDF à un prix contractuel garanti de 0,55 euro le kWh. Le supplément d’électricité nécessaire pour l’obtention d’un bilan énergétique positif sera réalisé par une centrale à cogénération biomasse, c’est-à-dire produisant simultanément de l’électricité et de la chaleur (chauffage et eau chaude sanitaire), utilisant comme combustible du bois ou de l’huile végétale.
L’énergie finale consommée sera de 61 kWh/an/m2 (dont 38 kWh/m2 pour l’électricité et 23 kWh/an/m2 pour le chauffage), en incluant la bureautique, les ascenseurs et les parkings. Cette faible consommation représente 65 % de moins qu’un bâtiment conçu selon la réglementation thermique 2005.
La qualité d’exploitation de ce bâtiment sera un facteur-clé de succès pour assurer un bilan énergétique positif. La Gestion technique du bâtiment (GTB) sera particulièrement sophistiquée puisque le système d’exploitation gérera automatiquement et en temps réel les ressources et les consommations du bâtiment grâce à un logiciel performant de gestion de l’immeuble. Celui-ci s’appuiera notamment sur les prévisions météo.
À superficie égale et en comparaison d’un immeuble classique, Green Office permettra d’éviter le rejet de 400 tonnes de carbone par an. La production d’énergie électrique à partir de sources renouvelables évitera, pour sa part, le rejet de 70 tonnes supplémentaires de CO2.
Un nouveau modèle
L’investisseur sera propriétaire d’un immeuble « propre », anticipant les nouvelles réglementations
L’objectif est de faire évoluer le modèle économique traditionnel de la promotion d’immeubles de bureaux. Le surcoût de réalisation étant estimé entre 15 et 20 %, il faudra donc raisonner en coût global et répercuter ce surcoût dans le prix de vente à l’investisseur pour que le projet soit économiquement viable. Le propriétaire devra donc louer l’immeuble plus cher aux utilisateurs qui bénéficieront pour leur part d’économies de charges, permettant de financer le surcoût de loyer.
L’avantage pour l’investisseur sera d’être propriétaire d’un immeuble » propre « , anticipant les nouvelles réglementations issues du Grenelle de l’Environnement, disposant d’un bon bilan carbone et donc d’un potentiel de plus-value supérieur à la moyenne du marché. Ce nouveau modèle économique aura besoin de s’appuyer sur une certification assurant a priori les performances énergétiques du projet et les garantissant sur plusieurs années. Le promoteur ne peut en effet vendre plus cher un immeuble à un investisseur, en lui promettant des économies substantielles de charges pour son utilisateur, sans que celles-ci ne fassent l’objet d’une garantie assurée par un organisme indépendant.
Le succès des bâtiments à énergie positive reposera sur de véritables ruptures technologiques qu’il faudra améliorer constamment pour renforcer leur performance et leur attractivité. Le GIE « Enjeu énergie positive », créé à l’initiative de Bouygues Immobilier, réunit sept industriels (Philips, Siemens, Tandberg, Schneider Electric, SteelCase, Lexmark et Sodexo). Il a pour but de développer les synergies en recherche sur l’optimisation énergétique des immeubles de bureaux, notamment dans leur phase d’exploitation. Il a vocation à s’élargir et à accueillir à terme 15 partenaires.