Un stage d’enseignement au Bénin
Plus d’un an après, il n’est pas aisé de raconter son stage de formation humaine. Tant de souvenirs, d’impressions qui restent ou s’effacent. Ce n’est finalement pas ce à quoi on s’attendait qui marque le plus.
DEUX SOUVENIRS MARQUANTS
Le premier est le moment le plus gratifiant de ces six mois d’enseignement. En effet, un maître était déjà là pour donner des cours, mais il lui était difficile de s’adapter à ses élèves lorsqu’ils sont une vingtaine et que leur niveau va de l’apprentissage de l’alphabet à la conjugaison au passé, avec un programme en français quand la plupart ne le parlent pas ou peu avant d’arriver à l’école. Celui-ci m’avait donc confié la charge d’apprendre les additions à un groupe d’enfants.
Une petite fille ne comprenait absolument pas, et après une après-midi à faire des tas de Duplo de couleurs, à les assembler et à les compter, j’ai vu son regard littéralement s’illuminer quand elle a compris ce que signifiait le signe +.
Le deuxième est nettement moins agréable. Après une après-midi de foot, je vois un garçon dont le débardeur troué laisse entr’apercevoir de grosses marques d’éraflures au niveau des côtes. Quand je lui demande ce qu’il lui est arrivé, celui-ci répond : « C’est maman » avant de partir en courant.
Parler d’enfants battus est devenu sujet de conversation malheureusement commun entre expatriés travaillant dans les départements de droits de l’homme, mais voir la trace des coups est une expérience qui marque.
Pour moi, le Bénin, c’est la sensation d’être à l’arrière d’un taximoto, mon casque sur la tête, le soleil me réchauffant les avant-bras, à regarder la vie qui se déroule dans la rue : les marchandes de fruits et légumes, les vendeurs d’essence, la saleté, la poussière, les enfants qui y jouent et les gens qui y dorment.
Viennent ensuite les images des cours que j’y donnais, des gens que j’y ai rencontrés, des paysages que j’ai pu y admirer.
L’Afrique dans le texte
J’ai vécu au Bénin, petit pays côtier d’Afrique de l’Ouest, durant six mois, dans le cadre de mon stage de formation humaine de première année de l’École, avec un de mes camarades de promotion, Adrien Barbry.
Ce stage consistait à donner des cours dans différents lycées de Cotonou, la capitale économique du pays.
Ainsi, nous avons pu voir énormément d’aspects de la vie scolaire béninoise : nous avons assuré des cours de mathématiques en terminale scientifique, mené des séances d’exercices de physique pour des élèves de ce niveau, et donné des cours en classe préparatoire intégrée d’une école française, délocalisée à Cotonou.
Nous avons de plus travaillé au lycée français, en collaboration avec des professeurs de mathématiques et de physique.
Toutes ces missions différente établissements, nous ont permis d’avoir un large aperçu du métier de professeur, et des problématiques de l’enseignement dans un pays en développement.
Une séance de TP de chimie a gravé ma mémoire, car j’ai pu apprendre au préparateur que de l’acide à plusieurs moles par litre ne se versait pas dans la cour de récréation où des enfants couraient pieds nus, mais plutôt dilué dans des canalisations.
Donner de son temps
Durant nos loisirs, nous avions décidé avec mon colocataire de donner de notre temps pour une association locale, tenue par des sœurs salésiennes.
“ Ce n’est finalement pas ce à quoi on s’attendait qui marque le plus ”
Celles-ci avaient énormément de projets qui nous attiraient tous, notamment un projet de réinsertion des vidomégons, filles-esclaves qui ne sont malheureusement pas rares au Bénin. Cependant, nous avons finalement choisi de nous investir dans des projets plus adaptés au temps dont nous disposions : nous avons ainsi donné des cours de niveau primaire pour aider à scolariser des enfants de quartiers défavorisés, et fait de l’animation dans un quartier voisin le mercredi après-midi.
Ces après-midis furent particulièrement riches en souvenirs et émotions.
Diplomatie et faux frais
Durant ces quelques mois à Cotonou, j’ai pu découvrir non seulement la chancellerie politique en charge des relations diplomatiques entre la France et le Bénin, mais aussi les différents services de coopération.
En effet, j’ai eu la chance de rencontrer, outre l’ambassadeur, les responsables de tous les moyens de la présence française, me permettant d’avoir un vaste aperçu de la coopération bilatérale sur plusieurs fronts : géopolitique, défense, éducation et promotion des droits de l’homme entre autres.
Toutes ces rencontres m’ont passionnée et ont nourri mon intérêt pour l’aide internationale et l’économie des pays en voie de développement.
On peut toujours s’arranger
De plus, à Cotonou, j’ai pu passer mon permis de conduire, avec l’auto-école Superman. Au moment de payer les frais d’inscription, je demande ce que sont les « faux frais ». Après une petite discussion, je comprends que c’est le tarif normal pour l’inspecteur. Si on ne sait pas conduire, c’est plus cher.
“ Je reçois un appel à 23 h 45 : le lendemain, à 6 heures du matin, je passe mon permis ”
Pour le code, nous sommes 3 000 ou 4 000 à être appelés, un par un, avant de passer le test dans un chantier abandonné, où selon sa place on peut ou pas voir l’écran sur lequel sont projetées les questions.
Un mois après, je reçois un coup de téléphone de mon moniteur, à 23 h 45 : le lendemain, à 6 heures du matin, je passe mon permis. L’examen est simple : un demi-tour, un créneau, une marche arrière, et j’ai passé le permis ! Un autre élève n’a pas réussi, mais, comme dit le moniteur, « on peut toujours s’arranger ».
Cependant, ce n’est pas fini : il n’y a plus de papier vierge pour permis en stock dans le pays, et je dois passer ma dernière semaine au Bénin au ministère des Transports pour finalement récupérer le papier officiel, où diverses personnes me réclament de l’argent pour « accélérer les démarches ».
À la limite de la zone interdite
Une classe de l’internat militaire d’excellence
Sur la fin de notre séjour, nous avons passé un mois dans le nord du pays, où se situaient les deux meilleurs lycées du Bénin : deux internats militaires d’excellence, l’un pour les garçons et l’autre pour les filles, auxquels les élèves accèdent par concours en fin de CM2.
Ce mois fut vraiment extraordinaire : nous étions en permanence avec les élèves, des cours au sport en passant par l’étude, et c’est avec ces élèves que nous avons le plus échangé et débattu durant l’ensemble de notre stage.
De plus, nous étions vraiment dans l’arrière-pays, où il y avait de l’eau deux heures par jour, où l’on peut amener ses propres ingrédients au restaurant pour que le cuisinier les prépare, à la limite de la zone rouge interdite aux expatriés depuis le déclenchement de la guerre au Mali dans laquelle le Bénin jouait un rôle important.
À la piscine avec les Peace Corps
C’est là que nous avons rencontré le plus de Peace Corps américains, qui passent deux ans dans des villages en immersion complète pour mener des projets de développement.
Pour les rencontrer, c’est simple : il suffit d’aller dans la seule piscine (verdâtre) de la grande ville à quelques heures de taxi-brousse, serrés à 30 dans un véhicule 16 places, et si l’on entend parler anglais, il suffit de dire « je connais Machin, c’est un Peace Corps à Cotonou » et on se fait inviter partout.
Les relations entre expatriés sont d’une facilité déconcertante, et les Peace Corps ne sont pas le seul exemple : au début du séjour, nous avions rencontré un Vénézuélien qui, après une conversation, nous a emmenés dans un village béninois où il filmait un documentaire sur les relations bénino-vénézuéliennes et où nous avons pu voir des fêtes traditionnelles et goûter l’alcool local.
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C’est bizarre je suis tombé
C’est bizarre je suis tombé sur cet article par hasard et je me vois au 1er rang sur la photo. J’aurai bien aimé la téléchargé mais elle n’est pas de bonne qualité (sûrement à cause du site web).