Une approche différenciante et innovante pour lutter contre le surpoids !
Pauline Chone (X11), directrice générale de Jellynov, nous présente cette jeune pousse française qui a pour ambition de proposer une solution innovante pour lutter contre le surpoids. Dans cet interview, elle revient sur la genèse de la start-up, son positionnement et son approche différenciante sur un marché où les alternatives restent limitées.
Comment Jellynov a vu le jour ?
Le projet a débuté en 2017. C’est le fruit de la rencontre de Jean-Michel Simon, le président actuel de la start-up qui a notamment occupé les fonctions de directeur de l’innovation dans une multinationale, et d’un chirurgien bariatrique, Jean-Luc Bouillot, qui a consacré sa vie professionnelle au traitement de personnes en situation d’obésité à des stades très avancés. Jellynov s’est ainsi développée autour de l’idée d’induire une satiété précoce chez les personnes qui ont besoin de perdre du poids en réduisant le volume disponible dans l’estomac. Il s’agit d’un principe largement répandu et utilisé dans le monde médical. Par exemple, la chirurgie bariatrique réduit l’estomac à un tube. Il existe aussi une procédure qui consiste à implanter un ballon gastrique sur une durée de plusieurs mois dans l’estomac.
Jellynov adresse donc l’enjeu du surpoids. Qu’en est-il ?
Le surpoids est une thématique complexe. Aujourd’hui, on estime que 60 % de la population est en surpoids, soit présentant un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 25 kg/m2. Or, pour les personnes en situation de pré-obésité (IMC compris entre 25 et 30 kg/m2) ou d’obésité de classe 1 (IMC compris entre 30 et 35 kg/m2), la perte de 5 à 10 % de leur poids peut permettre d’éviter, de réduire, voire de résorber les comorbidités existantes du type diabète, maladies cardiovasculaires comme l’hypertension, apnée du sommeil, problèmes articulaires…
Aujourd’hui, pour les personnes en situation d’obésité de classe 1, il existe sous prescription médicale deux familles de solutions :
les ballons en plastique gonflés à l’eau ou au gaz qui sont implantés et retirés par endoscopie, comme précédemment mentionné. Il s’agit d’une procédure invasive et qui coûte cher. En outre, la dilatation induite par le ballon dans l’estomac conduit à une situation physiologique de digestion toute la journée. Cela provoque des nausées et impose la prise d’inhibiteurs de pompe à protons (IPP) ;
la prise d’un traitement médicamenteux non remboursé. En France, 2 molécules existent. La première limite l’absorption des graisses, provoquant des diarrhées. La deuxième, très coûteuse, est autorisée depuis 2021 sous forme d’injection. Elle imite une hormone sécrétée par l’intestin à la suite d’une prise alimentaire et réduit la faim.
Aucune de ces 2 solutions n’est disponible pour les personnes en situation de pré-obésité sans comorbidités avérées.
Sans prescription, de nombreux compléments alimentaires existent , mais sont peu efficaces. Ceux qui se disent « rassasiant » contiennent des polysaccharides type konjac capables de gonfler à l’eau.
À cela s’ajoutent tous les régimes alimentaires qui ne conviennent pas à tout le monde et sont souvent associés à des reprises de poids par yoyo.
Concrètement, que proposez-vous ?
L’ambition de Jellynov est de rendre plus accessible et moins invasif ce principe clinique, à savoir occuper un volume de manière inerte dans l’estomac pour atteindre une satiété précoce. Nous proposons aujourd’hui de créer un ballon gastrique éphémère et sur demande à partir de produits couramment consommés. Il suffit ainsi de prendre un petit sachet de gel Jellynov une dizaine de minutes avant les principaux repas, déjeuner et dîner. Une fois ingérée, notre solution arrive dans l’estomac où elle gonfle au contact de l’acide gastrique pour créer une mousse de 400 ml. Occupant la moitié de l’estomac, cette mousse va induire une satiété précoce et limiter la prise alimentaire. Et, in fine, la mousse va se mélanger aux aliments et être éliminée par les voies naturelles.
En quoi votre technologie est-elle différente des autres alternatives présentées ? Quelle est sa valeur ajoutée ?
Contrairement aux technologies à base d’hydrogonflants qui retiennent de l’eau dans l’estomac, notre solution fonctionne à base de gaz. Les technologies à base d’eau présentent de nombreux inconvénients alors qu’elles ne permettent pas d’obtenir des gonflements suffisants au sein de l’estomac pour induire une satiété précoce. Selon les différentes études, on estime que la satiété est induite par des volumes qui vont au-delà de 300 à 400 ml, alors que ces solutions, de manière générale, permettent d’obtenir des volumes compris entre 100 et 200 ml maximum. Ces hydrogonflants doivent aussi être pris une trentaine de minutes avant le repas avec 500 ml d’eau du fait d’une cinétique contradictoire entre la vidange gastrique de l’eau (rapide) et le gonflement des hydrogonflants (lent).
Comme expliqué, notre solution permet, quant à elle, de créer rapidement une mousse ferme, gonflée au gaz dans la partie supérieure de l’estomac, soit dans la zone où la dilatation est la mieux tolérée. Ce gaz est créé et encapsulé in-situ en quelques minutes. La quantité de gaz générée équivaut à la quantité de gaz contenue dans une canette de boisson gazeuse : aucun effet indésirable ne devrait apparaitre lors de la prise ou de la digestion. En outre, notre solution est basée sur des substances inoffensives qui sont déjà couramment consommées par vous et connues pour être parfaitement tolérées sur le long terme. On les appelle des substances GRAS, Generally Recognized As Safe.
Aujourd’hui, où en êtes-vous ? Quelles sont les prochaines étapes pour Jellynov ?
Nous avons un prototype qui a été testé chez les animaux et qui est aujourd’hui suffisamment abouti pour être testé chez l’homme. Actuellement, nous travaillons avec les agences réglementaires pour valider un passage en phase clinique. Dans ce cadre, l’objectif de cette première étude chez l’homme est de valider les performances cliniques de notre produit autour de plusieurs indicateurs : volume occupé dans l’estomac, comportement du produit dans l’estomac, facilité de prise en main par les utilisateurs, élimination naturelle du produit…
En parallèle, nous continuons d’avancer sur la stabilité de la composition, le packaging et réfléchissons, d’ores et déjà, à l’étape de l’industrialisation et du passage à l’échelle avec un premier pilote.
Nous sommes aussi en pleine phase de levée de fonds afin de financer ces étapes majeures (premiers essais chez l’homme et industrialisation).
Dans cette démarche, quels sont vos principaux enjeux ?
Jellynov propose une solution à la frontière entre le dispositif médical, car notre solution a une action mécanique sur l’estomac et le complément alimentaire grâce à notre composition. Ce positionnement « hybride » nous ouvre en théorie plus de portes, mais rend complexe la levée de fonds, faute de répondre aux critères classiques de la MedTech ou de la FoodTech. Si le projet vous intéresse, n’hésitez pas à nous contacter.
Pour accompagner votre développement, quels sont les talents et profils que vous recherchez ?
Aujourd’hui, Jellynov s’appuie sur une équipe à taille humaine qui concentre toutes les compétences et expertises dont nous avons besoin. En prévision des prochaines étapes et du développement de l’entreprise, nous recherchons notamment un ingénieur process pour développer et renforcer les volets industrialisation, et un expert qualité et réglementaire. En outre, nous sommes toujours à la recherche de retours sur notre concept et notre solution pour s’améliorer. Là encore, n’hésitez pas à nous contacter si vous voulez participer à des tests utilisateurs.
Et sur un plan plus personnel dans la société, quels sont vos défis ? Comment capitalisez-vous sur votre formation à polytechnique ?
Mes enjeux sont directement liés à ceux de Jellynov ! Notre priorité est aujourd’hui de démontrer les performances en clinique de notre produit et de préparer le passage à l’échelle industrielle. Cela demande une forte capacité d’adaptation et de la flexibilité afin d’atteindre nos objectifs.
Et dans cette démarche, je peux, en effet, capitaliser sur les acquis de la formation que j’ai suivie à l’école et qui m’a permis de développer un fort sens de l’analyse et de la synthèse, la capacité à appréhender divers sujets et thématiques, mais aussi à trouver des alternatives et des solutions pragmatiques face aux difficultés.
Pour plus d’informations : p.chone@jellynov.com