Une fidélité gaulliste à l’épreuve du pouvoir
Rarement l’expression « aux premières loges » n’a été aussi juste que dans le cas de Jean Méo qui nous livre ici le récit de cinquante années passées au cœur du pouvoir de la Ve République.
Polytechnicien, ingénieur des Mines, il commence sa carrière dans les mines du Nord à la sortie de la guerre. Conseiller des quatre derniers ministres des Finances de la IVe République, il rejoint de Gaulle dès le 4 juin 1958 : à Matignon puis à l’Élysée, il vit dans son intimité et participe comme conseiller économique à chaque étape de son combat pour reconstruire la France, lui redonner son rang dans le monde.
Recruté par Pierre Guillaumat pour édifier une industrie pétrolière garantissant l’indépendance énergétique de la France, il est à ses côtés, à l’origine du groupe Elf, tout en restant dans la proximité du Général puis de Georges Pompidou. C’est ce dernier qui lui demande de prendre les rênes de France Soir à la mort de Pierre Lazareff, puis ensuite du groupe Havas.
Congédié par Giscard, il rejoint le RPR de Chirac comme secrétaire général adjoint. Élu député européen et conseiller de Paris, il est, aux côtés de Chirac, de toutes les batailles électorales avec les joies et les ombres que comporte le milieu politique. Enfin, Chirac élu, il est appelé comme secrétaire général de la Fondation Charles de Gaulle, portant haut, pour les générations futures, les valeurs que ce dernier lui avait léguées et qui se retrouvent dans l’Historial des Invalides ou le Mémorial de Colombey.
Lire le récit des mémoires de Jean Méo, c’est se retrouver dans l’intimité d’un « grand commis de l’État ». Grâce à sa mémoire sans faille, à son regard incisif « d’insider », à son sens du récit, de l’anecdote significative, à son écriture classique, précise, légère, et vivante, c’est participer en direct à ce que fut l’exercice du pouvoir dans la France de la seconde moitié du vingtième siècle.
Lire ces mémoires, c’est aussi retenir une leçon qui paraîtra à tous ses lecteurs terriblement d’actualité : servir l’État c’est répondre aux besoins avérés de la nation et des citoyens, mais certainement pas consentir aux exigences erratiques de l’opinion ni servir ses propres intérêts : Jean Méo et d’autres comme lui peuvent et doivent continuer à inspirer tous ceux dont l’ambition est de se dévouer à l’intérêt général.