Green-Acres : une plateforme pour les achats immobiliers lointains

Dossier : TrajectoiresMagazine N°744 Avril 2019
Par Hervé KABLA (X84)
Benoît Galy (97) a créé et dirige Green-Acres, un site d’annonces immobilières qui facilite l’achat d’un bien immobilier éloigné de son lieu de résidence principale.

Benoît Galy (97) fondateur de Green-Acres
Benoît Galy (97) fon­da­teur de Green-Acres

Que permet Green-Acres ?

Green-Acres est un por­tail d’annonces immo­bi­lières per­met­tant de trou­ver une mai­son à ache­ter loin de son lieu d’habitation habi­tuelle. Vous cher­chez une rési­dence secon­daire en Dor­dogne ? Une mai­son pour prendre votre retraite en Algarve dans le sud du Por­tu­gal ? Green-Acres est le por­tail de référence.

Comment t’est venue l’idée ?

J’ai tes­té plu­sieurs idées, et notam­ment, j’ai pris une semaine de vacances pour vendre des annonces à des agents immo­bi­liers, sur la base d’un petit site pré­exis­tant que j’ai ensuite rache­té. Les pre­miers jours, ça ne mar­chait pas : « Je suis agent immo­bi­lier, je dif­fuse mes annonces sur SeLoger.com, sur mon site, je suis sur le site de la FNAIM, je suis agence Orpi et je dif­fuse sur Pro­vence Cévennes immo­bi­lier. Je ne vois vrai­ment pas ce que je vien­drais faire chez vous. » C’est alors que j’ai com­men­cé à foca­li­ser le dis­cours sur la clien­tèle inter­na­tio­nale. J’ai pris le site Rya­nair et j’ai appe­lé les agences dans les villes des­ser­vies depuis Londres et les retours sont deve­nus inté­res­sés : « Ah oui, les Anglais, je ne sais pas com­ment les toucher. »

Quel est le parcours des fondateurs ?

Après l’X et Télé­com Paris­Tech, j’ai pas­sé deux ans chez France Télé­com R & D dans une start-up interne qui avait voca­tion à s’émanciper du groupe. La crise de l’an 2000 étant pas­sée par là, l’inertie propre au grand groupe a pris le des­sus sur l’esprit de com­man­do et nous sommes rede­ve­nus un simple labo­ra­toire de recherche. Aspi­rant à plus de créa­ti­vi­té, j’ai déci­dé de me lan­cer à mon compte.

Qui sont les concurrents ?

SeLo­ger venait de lever 60 M€ ; j’ai lan­cé la socié­té avec 22 000 € de capi­tal social. Armé de mon télé­phone et d’un por­table, je pas­sais cinq cents coups de fil par semaine, cinq coups de fil en moyenne pour pas­ser la secré­taire et avoir une réponse, sur cent réponses quatre-vingt-dix non, huit peut-être rap­pe­lez, deux qui fai­saient l’essai, un qui deve­nait client…, avec un client qui s’abonnait par semaine, j’avais cal­cu­lé qu’au bout d’un an je gagne­rais autant qu’en étant cher­cheur chez France Télécom.

Quelles ont été les étapes clés depuis la création ?

Les appels la jour­née, la pro­gram­ma­tion le soir. Au bout de cinq ans, je fai­sais depuis ma chambre 1 M€ de chiffres d’affaires annuel.
À être très bon seul, j’ai mis du temps à recru­ter et à délé­guer. Avec l’équipe tech­nique, nous avons mis du mana­ge­ment par­ti­ci­pa­tif en appli­quant à la lettre les prin­cipes de déve­lop­pe­ment Agile/Scrum, puis nous avons éten­du ces pro­ces­sus déci­sion­naires à toute l’entreprise avec l’holacratie. Aujourd’hui, nous sommes quinze pour un chiffre d’affaires de 5 M€ et 35 % de croissance.

Comment devient-on leader européen ?

Il a fal­lu être forts sur nos points forts et foca­li­sés sur notre niche de mar­ché que nous avons éten­due : au départ « Les Anglais en Dor­dogne », aujourd’hui vingt langues et seize pays. Notre maî­trise des enjeux tech­niques liés à l’international nous pro­tège des gros acteurs du sec­teur. Faire un site qui s’affiche en hébreu ou en arabe néces­site dans la durée d’avoir une ver­sion qui s’affiche pro­pre­ment de droite à gauche sur toutes les tailles d’écran. À chaque chan­ge­ment, il faut s’assurer que tout fonc­tionne en France en fran­çais, mais aus­si pour des annonces au Por­tu­gal en hébreu ou en russe. Et il nous reste beau­coup à faire sur notre spé­cia­li­té : ce n’est pas la même chose d’aller visi­ter un bien immo­bi­lier en ren­trant du tra­vail que d’acheter un bien à Lisbonne.

Qu’est-ce que le Brexit change dans ton activité ?

C’est pour nous un vrai sujet. Nous fai­sons 30 % de crois­sance annuelle au glo­bal alors que nous sommes à 0 % de crois­sance sur ce seg­ment sur lequel nous sommes histo­riquement lea­ders : les Anglais com­pensent la baisse de la livre en ache­tant dans des pays peu chers. Je m’attends à un vrai faux Brexit. Mais comme le dit Yuval Noah Hara­ri : « Il ne faut jamais sous-esti­mer la bêtise humaine. »

Comment les nouvelles technologies impactent ton métier ?

Le métier d’agent immo­bi­lier a encore peu été impac­té par l’ubérisation. Je suis impres­sion­né par le temps per­du en visites inutiles. Et pour­tant, la socié­té qui a levé le plus de fonds ces der­niers temps est Mee­ro, qui uti­lise l’intelligence arti­fi­cielle pour auto­ma­ti­que­ment trans­for­mer les pho­tos d’une mai­son triste, en coin de para­dis. Cela génère certes des clics et des contacts, mais aus­si beau­coup de visites inutiles.

Je pense que nous devons au contraire uti­li­ser des tech­no­lo­gies comme la vidéo 360 (à ne pas confondre avec la pho­to à 360 degrés) pour divi­ser par 3 ou 4 le nombre de visites. La visite ter­rain ne devrait à terme ser­vir qu’à véri­fier l’information en ligne avant de signer, pas à faire la pré­sé­lec­tion. Cela devrait impac­ter lour­de­ment la pro­fes­sion en termes d’emploi. Un agent immo­bi­lier, c’est avant tout un com­mer­cial ter­rain qui fait des visites. Il faut se pré­pa­rer à ce qu’en dix ou vingt ans le sec­teur passe de 20 000 agents immo­bi­liers à 5 000… Il a fal­lu dix ans à la pro­fes­sion pour adop­ter l’appareil pho­to. La Ricoh The­ta per­met de faire des vidéos 360 pour 400 € sur Amazon.

En ces temps de montée des extrêmes droites européennes, comment réagit ton secteur ?

De manière plus glo­bale, pour un site qui vit du dia­logue des cultures et des échanges inter­na­tio­naux, la mon­tée des natio­na­lismes n’est pas une bonne nou­velle. Mais, il faut faire atten­tion au bruit média­tique. Si l’Europe est atta­quée de l’intérieur et de l’extérieur, c’est qu’elle com­mence vrai­ment à exis­ter et à être forte. Ce n’est plus un petit pro­jet idéa­liste, fra­gile et sym­pa­thique, mais une enti­té capable de dic­ter sa loi aux GAFA. C’est l’ingénieur télé­com qui reprend le des­sus sur ces ques­tions : quelle par­tie relève du bruit ? quelle par­tie relève du signal ? À court terme, le Brexit n’a eu aucun impact sur notre tra­fic. Le dum­ping du gou­ver­ne­ment bri­tan­nique sur la livre ster­ling a stop­pé net notre crois­sance sur ce segment.

Les X et l’immobilier, une histoire d’amour… ou non ?

Para­doxa­le­ment, mon métier n’est pas tant l’immobilier, qui est le métier de mes clients agents immo­bi­liers. Le métier de Green-Acres, c’est celui dit de « l’économie de la pla­te­forme », autre­ment dit, le déve­lop­pe­ment d’outils per­met­tant de moder­ni­ser la mise en rela­tion. L’économie de la pla­te­forme est pro­pice à l’implication d’X : peu de capi­taux sont néces­saires, les enjeux tech­niques sont nom­breux et com­plexes, et les tech­no­lo­gies chan­geant rapi­de­ment, le der­nier arri­vé béné­fi­cie d’une prime d’agilité pour lut­ter contre les bar­rières à l’entrée. Avec quelques cama­rades entre­pre­neurs nous avons mon­té un groupe de tra­vail pour nous sou­te­nir les uns les autres et nous chal­len­ger dans nos idées autour de la disruption.

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