Une réalisation majeure : la cimenterie de But Son

Dossier : VIÊT-NAMMagazine N°525 Mai 1997Par : Lucien SAJUS (55), directeur délégué général et Michel MAKRIS, directeur de la Division Ciment - TECHNIP

L’in­dus­trie cimen­tière est au pre­mier rang du déve­lop­pe­ment de pays émer­gents comme le Viêt-nam. En effet, elle est étroi­te­ment liée à la moder­ni­sa­tion et l’ex­pan­sion de la base indus­trielle et à la recons­truc­tion des infra­struc­tures phy­siques. La consom­ma­tion de ciment est un indi­ca­teur signi­fi­ca­tif de la croissance.

Par ailleurs, le ciment est un pro­duit résul­tant de la com­bi­nai­son chi­mique à haute tem­pé­ra­ture de cal­caire avec les com­po­sés sili­co-alu­mi­neux conte­nus dans les miné­raux argi­leux. Il s’a­git d’une indus­trie lourde qui fabrique en grande quan­ti­té un pro­duit pon­dé­reux, bon mar­ché dont les frais de trans­port de sur­croît ne peuvent être éle­vés d’où la néces­si­té de construire des uni­tés de pro­duc­tion près des lieux de consommation.

Points derepère

La consom­ma­tion annuelle viet­na­mienne de ciment en 1996 se situe autour de 7,5 mil­lions de tonnes dont 2 mil­lions sont impor­tés. Cela cor­res­pond à une consom­ma­tion moyenne par habi­tant de 100 kg, à com­pa­rer aux 1 100 kg de la Corée, aux 1 300 kg de Tai­wan et aux 600 kg du Japon. Les pers­pec­tives d’é­vo­lu­tion de ce pays conduisent à une consom­ma­tion de l’ordre de 15 mil­lions de tonnes à l’ho­ri­zon 2005. Ceci a ame­né le gou­ver­ne­ment viet­na­mien à pla­ni­fier la réa­li­sa­tion d’une dou­zaine de pro­jets por­tant prin­ci­pa­le­ment sur la construc­tion de nou­velles uni­tés de production.

L’en­semble de l’in­dus­trie cimen­tière est gérée par une socié­té natio­nale, VNCC, qui a la res­pon­sa­bi­li­té de la pro­duc­tion, la dis­tri­bu­tion, la vente du ciment et le déve­lop­pe­ment de l’in­dus­trie cimen­tière. Cette socié­té natio­nale est rat­ta­chée au minis­tère de la Construc­tion (MOC) qui super­vise l’en­semble des pro­jets indus­triels du Viêt-nam. L’obs­tacle prin­ci­pal pour la réa­li­sa­tion de ces pro­jets étant leur finan­ce­ment, la porte a été ouverte à des inves­tis­seurs étrangers.

À ce jour, sur les 7 pro­jets en cours de réa­li­sa­tion 4 sont des Joint Ven­tures avec des pro­duc­teurs étran­gers, dans les­quelles l’ap­port en capi­tal de VNCC repré­sente 40 % (gise­ments de matières pre­mières, ter­rains, etc.). Les trois autres pro­jets sont des inves­tis­se­ments directs de VNCC pour les­quels un finan­ce­ment de la part impor­tée est orga­ni­sé par le four­nis­seur. C’est le cas pour la cimen­te­rie de But Son que réa­lise actuel­le­ment Technip.

Le projet de But Son

Le contrat, mis en vigueur en novembre 1994, porte sur la réa­li­sa­tion com­plète d’une cimen­te­rie de 4 000 t/j cor­res­pon­dant à une capa­ci­té annuelle de 1,4 mil­lion de tonnes de ciment. Le domaine de réa­li­sa­tion s’é­tend de la pré­pa­ra­tion des matières pre­mières aux expé­di­tions de ciment par route (sacs) et che­min de fer (vrac).

Le site de But Son est situé à 60 km au sud d’Ha­noi, dans la pro­vince de Nam Ha.

Le tableau sui­vant résume les chiffres carac­té­ris­tiques de cette réa­li­sa­tion. Les pres­ta­tions d’in­gé­nie­rie sont les pres­ta­tions nor­males d’un contrat clés en main. Une part signi­fi­ca­tive de celles-ci a été réa­li­sée au tra­vers de la filiale malaise de Tech­nip, TPG‑M, ce qui a amé­lio­ré notre com­pé­ti­ti­vi­té internationale.

Par ailleurs, il est impor­tant de noter que Tech­nip, dans le cadre de sa divi­sion spé­cia­li­sée en cimen­te­ries, Tech­nip-Cle, délivre ses propres tech­no­lo­gies pour ce qui concerne le coeur du pro­cé­dé de fabri­ca­tion. C’est en par­ti­cu­lier le cas pour le pro­cé­dé de cuis­son du pro­duit. Celui-ci per­met d’u­ti­li­ser, entre autres, des com­bus­tibles solides à forte teneur en cendres comme l’an­thra­cite viet­na­mien qui sera le com­bus­tible prin­ci­pal de la cimenterie.

Il a ren­du pos­sible une valo­ri­sa­tion com­plé­men­taire de res­sources locales. C’est éga­le­ment le cas pour le pro­cé­dé de broyage du ciment qui sera équi­pé d’une tech­no­lo­gie per­met­tant la réduc­tion de la consom­ma­tion élec­trique de l’ins­tal­la­tion. Ces tech­no­lo­gies répondent au sou­ci per­ma­nent de nos inter­lo­cu­teurs viet­na­miens de dis­po­ser d’u­ni­tés per­for­mantes, tant au plan des carac­té­ris­tiques que de la qua­li­té du pro­duit fini.

L’en­semble de la construc­tion est pris en charge par VNCC sous la super­vi­sion de Technip.

À noter enfin un taux de 25 % de fabri­ca­tion locale por­tant sur un cer­tain nombre d’é­qui­pe­ments à par­tir de plans et de maté­riaux déli­vrés par Tech­nip. Cette pra­tique a per­mis d’op­ti­mi­ser le finan­ce­ment du pro­jet. Elle offre éga­le­ment l’a­van­tage de faire par­ti­ci­per des par­te­naires locaux à la réa­li­sa­tion de l’u­ni­té, ce qui consti­tue une garan­tie pour l’ex­ploi­tant en termes de main­te­nance des installations.

Prin­ci­pales carac­té­ris­tiques de la cimen­te­rie de But Son

  • Capa­ci­té : 4 000 t/j, soit une pro­duc­tion annuelle de 1,4 mil­lion de tonnes sui­vant tech­no­lo­gie Tech­nip-Cle pour les uni­tés de cuis­son et broyage.
  • Contrat CIF Hai­phong pour les matériels.
  • Délai de réa­li­sa­tion : 32 mois.
  • 29 000 t de maté­riels et équi­pe­ments dont :

- 8 200 t de tôles et char­pentes pour fabri­ca­tion locale, – 8 800 t de fer à béton, – 80 000 m3 de béton.

  • Assis­tance technique :

- 250 h/mois pour la super­vi­sion de la construc­tion et de la mise en ser­vice, – 36 h/mois d’as­sis­tance durant la garan­tie méca­nique, – for­ma­tion de 22 repré­sen­tants du client à assu­rer dans une cimen­te­rie en Europe et chez les four­nis­seurs principaux.

  • 250 000 heures d’é­tudes dont 100 000 heures sous-traitées.

De la prospection à la signature du contrat

Pour le ciment, la reprise de contact avec le Viêt-nam par Tech­nip a coïn­ci­dé avec le déblo­cage des rela­tions fran­co-viet­na­miennes. Elle a débu­té avec la réa­li­sa­tion pour un cimen­tier fran­çais d’une étude de fai­sa­bi­li­té por­tant sur une uni­té de capa­ci­té équi­va­lente, puis la par­ti­ci­pa­tion à une pre­mière com­pé­ti­tion inter­na­tio­nale por­tant sur la cimen­te­rie de Trang Kenh pour le compte de la socié­té mixte Ching Fong Hai­phong Cement. Il en est résul­té une connais­sance du pays, de son sec­teur cimen­tier et la prise en compte de capa­ci­tés de l’in­dus­trie locale.

La cimen­te­rie de But Son a fait l’ob­jet d’un appel d’offres inter­na­tio­nal qui s’est dérou­lé sur une période de six mois envi­ron, ce qui consti­tue un pro­ces­sus de déci­sion rela­ti­ve­ment court.

Le mon­tant du contrat pour Tech­nip est de 600 mil­lions de francs pour un mon­tant glo­bal d’in­ves­tis­se­ment de 1 200 mil­lions de francs environ.

Un point remar­quable réside dans le mon­tage finan­cier que Tech­nip a pro­po­sé pour réa­li­ser ce pro­jet. En effet, le finan­ce­ment fran­çais dis­po­nible était pla­fon­né à 60 % des besoins. Le par­te­na­riat avec une socié­té de com­merce japo­naise qui sou­hai­tait inves­tir sur le Viêt-nam a per­mis de mettre en place un com­plé­ment de prêt et ain­si de finan­cer la tota­li­té du projet.

La réalisation du projet

À ce jour les ouvrages majeurs de génie civil sont ache­vés et les opé­ra­tions de mon­tage méca­nique des équi­pe­ments ont débuté.

Construction de la cimenterie de But Son, au Viêt-nam
Ligne de cuis­son en cours de mon­tage.  © TECHNIP

L’en­semble de la construc­tion est réa­li­sé par un grou­pe­ment d’en­tre­prises natio­nales dépen­dant du minis­tère de la Construc­tion et qui sont affec­tées cha­cune à une par­tie du chan­tier. Ces entre­prises ont déjà été impli­quées dans la construc­tion d’en­sembles similaires.

À ce jour, les prin­ci­pales dif­fi­cul­tés résident dans le manque d’ex­pé­rience en métho­do­lo­gie de ces entre­prises résul­tant d’une absence de pro­cé­dure de contrôle qua­li­té. Cela se tra­duit par un ren­for­ce­ment de nos moyens de super­vi­sion afin d’as­su­rer un enca­dre­ment posi­tif de la construction.

En conclu­sion, il appa­raît, au tra­vers de cette expé­rience, que les condi­tions prin­ci­pales pour la réa­li­sa­tion d’en­sembles indus­triels sont dis­po­nibles. Une cer­taine ima­gi­na­tion est néces­saire en ce qui concerne le finan­ce­ment des projets.

Enfin, le manque d’ex­pé­rience des entre­prises locales néces­si­te­ra encore pen­dant quelque temps une contri­bu­tion signi­fi­ca­tive de l’en­tre­pre­neur en termes de trans­fert de savoir-faire.

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