Une société technologique à forte composante financière (et vice-versa) !
Dans cet entretien, Richard Weiss (X72), Président du Groupe GTI, revient sur le positionnement de son groupe à la croisée entre la technologie et le monde du financement.
Quels sont les métiers et le positionnement de Groupe GTI ?
Au cœur des métiers du Groupe GTI, on retrouve une très forte spécialisation à la croisée des fonds de financement et des traitements de données en grands volumes. Cette expertise est portée par deux entités distinctes.
GTI Asset Management, notre société de gestion agréée par l’AMF, est spécialisée dans la conception, la réalisation, et la gestion d’opérations de financement adossées à des actifs, ainsi que lorsque les circonstances s’y prêtent, la levée de fonds sélectifs.
Historiquement, GTI Asset Management, exploitant sa technicité importée des Etats-Unis, travaillait essentiellement pour des banques et de grandes sociétés à une époque où ces structures ne savaient pas réaliser ce type de financement très répandu Outre-Atlantique. Nous avons donc mis cette compétence à leur disposition afin qu’elles puissent bénéficier de ce financement très sécurisé. Progressivement, les banques ont développé une compétence en interne. Nous nous sommes donc diversifiés en proposant ce type d’opérations à des ETI et PME. GTI Asset Management traite tous types de fonds (fonds de prêts, créances commerciales, prêts hypothécaires, prêts personnels, prêts granulaires…) avec une expertise marquée sur les fonds granulaires, exigeant des traitements de données en grands volumes.
« Au cœur des métiers du Groupe GTI, on retrouve une très forte spécialisation à la croisée des fonds de financement et des traitements de données en grands volumes. »
Nous avons ainsi vocation à intervenir sur des opérations complexes qui s’inscrivent dans des environnements techniques et qui nécessitent une spécificité particulière. On se positionne comme un acteur de niche alors que les grandes institutions ont tendance à gérer des opérations plutôt standards. Nous avons aussi la particularité d’avoir fait le choix d’internaliser tous nos métiers, nos compétences, nos matériels et logiciels, et même certaines fonctions supports. L’ensemble de nos systèmes sont « propriétaires » afin de pouvoir réaliser en interne nos calculs, pouvoir simuler les flux, négocier avec les agences de notation, optimiser le passif… Nous avons géré un fonds avec plus de 300 000 créances que nous suivions quotidiennement de manière individuelle et très rigoureuse.
La seconde entité du groupe, Credatech, propose, quant à elle, des services aux dépositaires de fonds granulaires : le contrôle de cohérence et l’assistance à la vérification de l’existence des créances.
À quels besoins et problématiques répondez-vous ?
Nous apportons une réponse à la raréfaction des financements bancaires et à un accroissement des coûts de financement. Nous ciblons en priorité des entreprises qui n’ont pas facilement accès au marché de la dette, mais qui disposent d’actifs auxquels une dette peut être adossée. Il peut notamment s’agir d’une grande entreprise très endettée face à laquelle les banques vont avoir des réticences à augmenter leurs engagements. Au début des années 2000, nous avons ainsi monté des opérations de titrisation pour CMA-CGM ou encore Alstom pour qui nous avions financé les créances résultant des ventes de TGV à la SNCF.
« Aujourd’hui, nous nous intéressons également aux Fintechs qui ont de multiples besoins de financement : pour se développer elles-mêmes, mais aussi pour développer le support de leur activité. »
Aujourd’hui, nous nous intéressons également aux Fintechs qui ont de multiples besoins de financement : pour se développer elles-mêmes, mais aussi pour développer le support de leur activité. C’est, notamment, le cas des Fintechs qui proposent des financements avec un parcours simple ou qui proposent des services de BNPL (buy now pay later)… Dès qu’il y a un flux avec de nombreuses lignes, il y a, en effet, du potentiel pour monter des opérations adossées à des actifs plus complexes. D’autant que les banques sont peu friandes de ces opérations regroupant de très nombreuses lignes, avec des échanges multiples et un encours relativement faible. C’est aussi un segment qui nécessite une pédagogie intense et un accompagnement stable.
L’innovation et les nouvelles technologies jouent un rôle important dans votre modèle. Qu’en est-il ?
La technologie est créatrice d’opportunités. Elle est au cœur des modèles que les entrepreneurs développent aujourd’hui afin de concurrencer les banques sur le segment du financement ou du service. Pour développer ces canaux alternatifs, ils ont eux-mêmes besoin de financement pour le support de leur activité.
Sur un plan plus opérationnel, la technologie nous permet de mieux gérer nos propres opérations. Pour sécuriser un prêt à un tiers, il est capital d’avoir des informations sur ce tiers, ses finances, sa façon de travailler. C’est d’ailleurs pourquoi, depuis plus d’un quart de siècle, nous militons pour que les fonds puissent prêter et avoir accès au fichier des incidents de la Banque de France qui recense les incidents de paiement des entreprises. Aujourd’hui, les nouvelles technologies ont permis le développement de l’Open Banking qui justement contribue à la diffusion de ces informations.
« Nous nous considérons comme une société technologique avec une forte composante financière. »
Au-delà, nous nous considérons comme une société technologique avec une forte composante financière. Par exemple, quand nous montons une opération de financement tranchée sur des pools de 50 ou 100 000 prêts immobiliers, nous réalisons nous-mêmes tous les calculs et simulations en utilisant nos propres modèles. Concrètement, notre activité va au-delà de la gestion de fonds, car nous prenons en charge toute la chaîne de valeur depuis le conseil initial jusqu’à la gestion, en passant par le montage d’une opération. De manière générale, les grandes banques vont couvrir le volet « noble », qui consiste à concevoir le montage et lever les fonds, et vont reléguer le volet gestion à leurs filiales dédiées à cette activité de gestion de fonds. Nous avons pris le contre-pied de ce schéma pour internaliser ces deux dimensions.
Parce que notre société a été créée ex-nihilo, nous ne sommes pas tributaires d’un système informatique très lourd. Nous avons notre propre système informatique et notre propre technologie que nous pouvons appliquer aux différentes normes et sujets. Par exemple, nous avons développé notre propre outil pour automatiser le travail autour du KYC ainsi que les procédures de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.
Aujourd’hui, quelles pistes explorez-vous pour faire évoluer vos services et solutions ?
Depuis le début de notre activité, la technologie a toujours été un levier de développement. La nécessité d’innover, notamment sur le plan technologique, nous a poussés à diversifier notre activité, à couvrir de nouveaux besoins et à nous adresser à des clients différents.
Dans cette démarche d’innovation, nous travaillons avec des sociétés « traditionnelles » mais aussi avec les Fintechs à qui nous apportons conseil, qualité de service et rapidité d’exécution. Ces sociétés ont le double défi de se financer elles-mêmes et de financer le support de leur activité (par exemple les prêts mis en place). Nous avons donc élargi nos services en nous intégrant verticalement et nous examinons d’autres services tels les créances commerciales hors affacturage ou encore le conseil en matière de structuration des fonds.
Et pour conclure, quelles pistes de réflexion pourriez-vous partager avec nos lecteurs ?
Les Fintechs sont au cœur des métiers bancaires, qu’elles contribuent à moderniser ; celles qui opèrent sur le segment du financement leur font concurrence directe parfois en sous-pondérant les contraintes légales et règlementaires liées à leur activité. Mais pour assurer leur développement, elles doivent veiller à respecter la règlementation applicable. La titrisation et les financements adossés en général sont le canal de financement parallèle et avec l’augmentation des taux d’intérêt, ces techniques sont appelées à se développer et tout particulièrement pour financer l’activité des Fintechs. Il y a un important travail de pédagogie qui doit être mené pour sensibiliser les jeunes entrepreneurs à cette réalité. Et sur ces questions et enjeux structurants, nous avons la capacité d’accompagner l’ensemble des parties prenantes afin de trouver la solution la plus pertinente.