Une source inépuisable de croissance
L’innovation n’a jamais été autant soutenue que durant ces dix derniers mois. Jamais les attentes des entreprises n’ont été aussi fortes. La tourmente financière et économique ne doit pas servir de prétexte à un ralentissement du soutien de l’innovation qui représente un vrai investissement pour l’avenir.
L’idée, encore admise à la fin du siècle dernier, selon laquelle, pour préserver leur croissance, les pays développés se concentreraient sur des activités reposant sur l’économie de la connaissance, dotée d’une forte valeur ajoutée, tandis que les pays en développement se spécialiseraient dans la production de masse avec une main-d’oeuvre bon marché et peu qualifiée, n’a pas longtemps résisté aux réalités. Vision trop confortable de la division internationale du travail, relevant d’un optimisme excessif.
Tirant un bénéfice maximum de l’accélération du processus de mondialisation, les pays émergents connaissent aujourd’hui, et en dépit de la crise actuelle, des taux de croissance spectaculaires, sans commune mesure avec ceux de l’Europe ou des États-Unis. Nous serions, du reste, bien inspirés de les appeler plutôt pays émergés.
Repères
La vraie nouveauté vient des investissements considérables réalisés par les nouvelles économies des pays émergents en matière d’éducation, de recherche-développement et d’innovation. Et ces efforts portent leurs fruits. En d’autres termes, nos » vieux » pays sont désormais concurrencés frontalement sur le terrain du savoir dont ils s’étaient imprudemment approprié l’exclusivité. Plus grave : ainsi que l’a indiqué la Commission européenne, notre continent a accumulé un certain retard, malgré les objectifs ambitieux fixés par la stratégie de Lisbonne en matière d’innovation. Souhaitons que le processus de Ljubljana initié au début de cette année donne un nouvel élan à la construction de l’Espace européen de la recherche d’ici à 2020. Le contexte est favorable.
Un fort volontarisme
La France n’est pas la moins bonne élève, se situant légèrement au-dessus de la moyenne des autres pays de l’Union, mais le risque d’un recul est réel. Peut-elle éviter ce décrochage ? À l’évidence oui, car elle ne manque pas d’atouts.
D’autres atouts
La France a la chance d’être un pays entrepreneurial où la création d’entreprises n’a jamais atteint un niveau aussi élevé, où la réussite individuelle est jugée beaucoup moins suspecte que par le passé. C’est un bon signe de vitalité.
Et, en premier lieu, l’expression d’un fort volontarisme politique, dans un contexte de raréfaction de la ressource budgétaire. L’État, via l’entreprise publique Oseo, a mobilisé des moyens financiers sans précédent en 2008 pour soutenir l’innovation et la croissance des PME et faire émerger un plus grand nombre d’entreprises moyennes. L’effort consenti doit être pérennisé dans la durée, car une dynamique a été enclenchée et rien ne serait plus dommageable que de l’interrompre.
Enfin, ce qui n’est pas le moindre des avantages, plus personne ne met en doute le rôle de l’innovation comme moteur de croissance et de progrès. Le sujet fait l’unanimité dans la classe politique et les élites économiques et intellectuelles.
Dès lors, comment expliquer notre retard, sinon par la subsistance de freins psychologiques importants dont la levée nécessite une véritable révolution des esprits sur la manière dont nous percevons le monde d’aujourd’hui ? Le moment n’est-il pas venu de réaliser que nous sommes dans la mondialisation et non face à elle, qu’il est illusoire et dangereux de vouloir lui résister, que notre prospérité économique ne peut passer que par l’innovation ?
Des milliers d’emplois créés
L’innovation est une source inépuisable de croissance. Elle se mesure aussi en dizaines de milliers d’emplois créés, dans des secteurs nouveaux, dont on n’avait pas idée quelques années plus tôt, grâce à des entreprises, en particulier, celles de taille intermédiaire, dont nous devons favoriser l’émergence et l’implantation durable sur notre territoire, sans risquer qu’elles ne soient rachetées précocement par des groupes étrangers.
Une nouvelle frontière
L’innovation est notre nouvel horizon, notre nouveau monde. Elle dessine, façonne et modifie notre vie quotidienne, ses applications ne connaissent aucune limite. C’est notre nouvelle frontière comme l’était la science pour les États-Unis au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Une multitude d’acteurs
La capacité de R & D et d’innovation déborde de plus en plus largement le cadre strict de l’entreprise. Les projets collaboratifs s’imposent donc comme le modèle le plus efficace, qui associe et qui connecte une multitude d’acteurs : universités, chercheurs, laboratoires, incubateurs, start-ups, joint ventures, pôles de compétitivité, grands groupes.
Nous n’avons pas le choix et il n’est que temps d’intégrer ce changement radical de perspective qui doit nous inciter à vivre l’innovation, non comme une contrainte subie, mais comme une superbe opportunité à saisir.
C’est aujourd’hui que tout se joue. Faute de quoi, notre pays se priverait de ses meilleurs cerveaux et de ses meilleurs talents qu’il n’aurait su ni retenir, ni attirer.
Saisissons avec enthousiasme la chance qui nous est offerte. Peu d’investissements comme ceux réalisés dans la R & D ou l’innovation sont aussi porteurs d’avenir et de richesses. Ils sont d’ailleurs inséparables bien que de nature différente. La R & D transforme l’argent public ou privé en connaissance ou en idée ; tandis que l’innovation convertit l’idée en argent. Mais elles vont toutes les deux dans le même sens, celui de la croissance économique et de la création d’emplois.
Il faut une véritable révolution des esprits sur la manière dont nous percevons le monde d’aujourd’hui
La France est entrée dans une économie ouverte où le modèle n’est plus la multiplication des projets de R & D coûteux progressivement sélectionnés au sein de la même entreprise avant d’arriver sur le marché. Désormais, et c’est une chance, la frontière de l’entreprise est devenue poreuse et les projets sont choisis à la suite d’échanges extérieurs, entrants et sortants, avec possibilité d’accès à de nouveaux marchés.
Il reste que les freins sont nombreux. Notre rôle est de contribuer à les lever pour soutenir les PME dans cette démarche de collaboration, en les aidant, par exemple, à connaître et à accéder à de nouveaux marchés, à maîtriser les processus d’intelligence économique et de propriété intellectuelle et à identifier les compétences complémentaires qui leur seraient utiles.
Nous n’avons d’ailleurs jamais autant soutenu l’innovation que durant ces dix derniers mois. Jamais les attentes des entreprises n’ont été aussi fortes. La tourmente financière et économique ne doit pas servir de prétexte à un ralentissement du soutien de l’innovation qui représente un vrai investissement pour l’avenir.
Je saisis l’occasion qui m’est donnée de m’exprimer dans cette revue pour inviter mes camarades de l’X, et en particulier les plus jeunes d’entre eux, à se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Elle en vaut la peine.
OSEO
À travers ses trois métiers complémentaires que sont le soutien de l’innovation, la garantie des financements bancaires et des organismes de fonds propres et le cofinancement des investissements aux côtés des banques, Oseo favorise le déclenchement des initiatives en s’attachant à ce que ses interventions produisent le maximum d’effet d’entraînement. Il ne se substitue pas au marché, il comble ses imperfections, notamment, en prenant une part du risque lié aux projets innovants des entreprises.