Une usine de fabrication d’aimants 100 % Made-In-France
En développant l’activité de recyclage des aimants, MagREEsource ambitionne de relancer l’industrie de fabrication des aimants en France. Erick Petit, président de l’entreprise, nous en dit plus.
Au cœur de votre activité, on retrouve la question du recyclage et de la valorisation des aimants en fin de vie. Pourquoi ?
Dans le cadre de la transition vers un monde plus décarboné et électrifié, nous allons avoir besoin de plus en plus d’aimants qui sont utilisés partout : les transports (les véhicules électriques, l’aérien et le ferroviaire, le maritime…) ; les éoliennes ; le monde de la défense ; des applications liées à la robotique ou à l’électronique… ; et même la cosmétique ou le luxe ! Par ailleurs, l’industrie de l’aimant est aujourd’hui à la croisée de plusieurs enjeux : les tensions et la pénurie des ressources minières à court terme, le contrôle de la Supply Chain des terres rares par les Chinois… Face à cette réalité et avec moins de 1 % d’aimants actuellement recyclés, les ressources secondaires et le recyclage permettent non seulement de répondre à cette hausse annoncée des besoins, mais va aussi contribuer à reconstruire une filière autonome de fabrication des aimants en France et en Europe.
À partir de là, quel est le positionnement de votre start-up ?
Spin-off du CNRS, MagREEsource veut se positionner comme un fabricant d’aimants, verticalement intégré du recyclage jusqu’à la fabrication aimants finis, à l’identique de ceux obtenus avec de la matière vierge.
Après une première levée de fond en 2022 de 5 millions d’euros, qui nous a permis de « sortir » du CNRS pour un premier site industriel de 50 tonnes de capacité annuelle, nous sommes déjà sur un deuxième tour de table fin 2023 pour accélérer notre développement technologique vers des aimants pour éolienne, avant un troisième tour qui servira à construire une MagFactory fin 2027, la première usine durable d’aimants en Europe à plus de 500 tonnes de capacité et 150 mplois créés.
Quelle est la technologie que vous avez développée pour valoriser ces aimants en fin de vie ?
La technologie est basée sur une propriété très particulière des alliages à base de terres rares : la décrépitation à l’hydrogène. L’hydrogène, en présence d’alliage de terres rares, va rentrer dans la matière au niveau des joints de grain et de la microstructure et va la faire gonfler jusqu’à ce qu’elle éclate complètement ce qui permet d’obtenir une poudre. Par compaction puis frittage, nous sommes alors en mesure de produire de nouveaux aimants.
Cette propriété avait été mise en avant par le Dr Daniel Fruchart, notre conseiller scientifique et qui fut Directeur de recherche émérite au CNRS. Le Dr S.Rivoirard, cofondatrice de MagREEsource a amélioré le concept pour en faire une vraie technologie de recyclage et obtenir une poudre avec les meilleures caractéristiques magnétiques possibles. Par ailleurs, nous cherchons à développer les technologies de mise en forme pour diverses applications et par exemple avec de la fabrication additive pour des « micro-magnets », ce qui fait gagner matière engagée et réactivité. Nous avons déposé plusieurs brevets sur ces sujets.
Votre activité permet clairement de répondre à plusieurs enjeux stratégiques : la transition énergétique et le besoin en métaux critiques et la souveraineté de notre pays. Qu’en est-il ?
Sans aimant, nous ne fabriquerons pas de voitures électriques ou d’éoliennes, pour ne citer que ces exemples qui sont impactés directement par notre transition énergétique ! Être verticalement intégré, depuis le recyclage jusqu’aux aimants finis, nous permet de garantir à nos clients la souveraineté industrielle – on peut continuer à produire même en cas de pénurie ou d’accident géopolitique – et avec le moins d’impacts possible – nous réduisons de 91 % les émissions carbone comparé aux mêmes aimants fabriqués en Chine par extraction minière. De plus le recyclage permet également de minimiser la pression sur les ressources primaires.
Notre projet s’inscrit dans le mouvement de fond d’une réindustrialisation, durable, attractive, en France basée sur la technologie et qui prend en compte les impacts environnementaux et sociaux de son activité.
Quelles sont les prochaines étapes pour votre entreprise ?
Nous avons déjà des pré-commandes, le positionnement de MagREEsource est un clair avantage pour les donneurs d’ordre qui recherchent aussi de l’expertise et du support pour accompagner leur propre transition. Sur le plan technologique, il s’agit maintenant de démontrer rapidement la validité de notre modèle et son efficience économique. En parallèle, nous poursuivons nos efforts en matière de R&D vers l’éolien, le médical ou l’électronique. Enfin, nous avons aussi un enjeu de communication pour emmener toutes les parties prenantes vers notre modèle circulaire afin de construire un écosystème générateur de valeur pour tous !