Étymologie :
À propos d’urbanisme et mobilité
L’urbanisme, c’est l’art d’adapter la ville aux besoins de ses habitants, à propos de mobilité notamment. En latin, la ville se disait urbs, urbis, d’où urbanus, déjà dans les deux sens de urbain : « de la ville » comme pour le tissu urbain, ou bien « poli, de bon ton », les habitants des villes étant supposés plus raffinés que ceux des campagnes. On avait aussi suburbanus « suburbain », et suburbanum, préfigurant le faubourg ou la banlieue. Plus récemment sont apparus les termes urbanisme, urbanisation, urbanistique…
Villa, village et ville
D’où vient alors le mot ville ? Du latin villa, qui désignait une vaste maison de maître, entourée d’un domaine agricole, en dehors de la ville justement. Mais lorsque l’habitat se développait autour d’une villa romaine, il se formait un petit groupe de maisons, un village (du bas latin villagium, dérivé de villa), ou même une plus grande agglomération, toujours nommée en bas latin, villa, et ce mot l’a finalement emporté sur urbs pour devenir la ville en français. À l’origine, la ville était à la campagne !
D’ailleurs une petite maison avec jardin hors de la ville, c’est resté de nos jours une villa, qui rappelle la « maison de campagne » des riches Romains, en latin villa urbana, apparue vers le iie siècle. Cela se voit dans le nom même de Villeurbanne, nommée Villa Urbana vers 1225, qui a donc été une villa d’agrément rattrapée ensuite par la conurbation lyonnaise.
En résumé, la villa romaine a laissé son nom à plus petit qu’elle, la villa, et à plus grand qu’elle, la ville !
Enfin en latin, l’adjectif villanus désignait l’habitant d’une villa (au sens latin), donc de la campagne, d’où le nom du paysan en ancien français, le vilain, mot qui a pris un tout autre sens aujourd’hui : un vilain est tout sauf urbain.
Et si l’on remonte dans l’étymologie, on s’aperçoit que la dualité urbs/villa vient de loin.
Urbs et Rome
En latin, urbs désignait une ville entourée d’une enceinte, et en premier lieu la ville de Rome, urbs Romana : urbs, c’est Rome dans la bénédiction papale urbi et orbi « à la ville et au monde ». Le mot urbs se relie en effet à une racine indo-européenne signifiant « délimiter un périmètre circulaire, enclore ». Lors de la fondation d’une ville, l’emplacement de l’enceinte était tracé au sol avec une charrue, dont le manche se nomme en latin urbum. Ainsi à la fondation de Rome en 753 avant J.-C., c’est Romulus qui a tracé le sillon sacré, le pomoerium (de post muros) délimitant la ville intra-muros.
Si urbs renvoie à une grande ville, à une capitale, et même à une origine sacrée, villa, comme on va le voir, est d’extraction beaucoup plus modeste.
Villa et les quartiers
En latin, villa est dérivé avec changement de suffixe de vicus, qui désigne d’abord le quartier d’une ville, ou l’une de ses rues, d’où vicinus « voisin », vicinum « voisinage », d’où aussi en français le chemin vicinal. Ce mot vicus se relie à une racine indo-européenne *weik- exprimant une unité sociale située juste au-dessus d’une famille ou d’une maison, comme une villa romaine et ses dépendances, un village, un pâté de maisons…
Épilogue
En définitive, si le mot urbs fait penser à la capitale du monde romain, le mot villa concerne plutôt la vie des quartiers et des campagnes. Un message pour l’urbaniste qui doit concilier une vision futuriste de la ville dans le monde, et les préoccupations immédiates de ses habitants, qui aimeraient bien retrouver la campagne à la ville.