W.A. Mozart : Œuvres pour piano
Les concertos pour piano de Mozart sont une des réussites incontestées du catalogue des enregistrements de Daniel Barenboïm. Dirigeant du piano l’English Chamber Orchestra, il enregistra très jeune, entre 1966 et 1975, une intégrale des vingt-sept Concertos considérée comme une référence depuis quarante ans (10 CD EMI).
Il les réenregistra vingt ans plus tard à la tête de l’Orchestre philharmonique de Berlin, simultanément avec ces films qui nous sont rendus en DVD et en Blu-Ray. Il faut se réjouir de pouvoir enfin voir ces merveilles du disque.
Mozart a donné ses lettres de noblesse au genre du concerto pour piano, créant la transition entre les concertos pour clavecin développés par Bach (initialement en imitation de concertos de Vivaldi) et les véritables concertos pour piano.
Ouvrant la voie à ses successeurs Beethoven, Brahms, Tchaïkovski, Schumann, Rachmaninov, etc., Mozart en a composé vingt-sept, dont les huit derniers, ceux de la grande maturité du compositeur, sont publiés ici en un disque Blu-Ray de quatre heures trente.
Manquent malheureusement les grands numéros 17, 18 et 19. Mais ces huit concertos sont des merveilles. Si vous les découvrez, écoutez les mouvements lents du 20e (avec l’orage tumultueux au milieu), du 21e (connu dans les années 1960 comme la bande sonore du film Elvira Madigan) ou du 23e (repris dans L’Incompris de Comencini).
Ces concertos sont enregistrés dans le très beau cadre de la villa Siemens, dans trois salles différentes, avec des réalisateurs (le grand Jean-Pierre Ponnelle pour le Concerto n° 21) et des placements de caméras différents pour chaque concerto, évitant ainsi la monotonie.
Barenboïm dirige du clavier, se levant lorsqu’il le peut. Son piano, qui n’est que légèrement ouvert, permet à l’orchestre de le voir. Les cadences, ces moments solistes du pianiste, souvent à la fin du premier mouvement, laissées libres par le compositeur, sont de Barenboïm lui-même. Elles sont parfaitement dans le ton, dans le style, reprenant les thèmes du mouvement.
Concert public
Dans le concert public donné à Prague en 2006, Barenboïm retrouve le Philharmonique de Berlin. Il joue le 22e Concerto, déjà enregistré vingt ans plus tôt dans le coffret commenté ci-dessus. Les deux interprétations sont très intéressantes à comparer, son jeu est peut-être encore plus libre en public.
Comme dans l’enregistrement des années 1980, l’orchestre de Berlin est réduit (quatre contrebasses et six violoncelles tout de même), mais jamais maigrelet. Le positionnement des cordes graves derrière les premiers violons permet un équilibre et un son superbe.
Ce concert est complété par deux symphonies de la maturité, la 35e Haffner, du nom du maire de Salzbourg, et la 36e Linz, et d’un concerto pour cor où le premier cor de l’orchestre, le Tchèque Radek Baborak, joue le rôle de soliste devant « son » public, avec une magnifique sonorité de velours, jamais agressive.
Très beau concert « européen » de la Philharmonie de Berlin, comme tous les 1er Mai (trouvez aussi le concert Brahms à Athènes, avec Simon Rattle, et Barenboïm au piano, Euroarts également).
L’autre recueil de Sonates
Les connaisseurs aiment Barenboïm dans Mozart, non seulement les Concertos mais également les Sonates.
Les dix-huit sonates de Mozart sont bien plus rarement entendues au concert que le fameux recueil des trente-deux sonates de Beethoven, d’une génération plus jeune. Enregistrées comme les Concertos dans de beaux salons bien décorés, à la fin des années 1980, elles sont présentées par ordre chronologique sur trois DVD.
Barenboïm, très habillé pour ces captations, joue dans un style qui ressemble beaucoup à ses enregistrements, plus connus, de sonates de Beethoven : une grande clarté malgré une pédale soutenue, un grand classicisme malgré une émouvante poésie, et surtout un son et un toucher fabuleux.
Retrouvez tout cela également dans son récent enregistrement de Beethoven, filmé par Andy Sommer (5 DVD EMI), un indispensable de toute DVDthèque.
Regardez ces sonates une par une (il y en a pour cinq heures de pur plaisir, avec un son magnifique), et redécouvrez ces pièces, parfois rabâchées par les débutants, ici transcendées : Par exemple une K. 331 exceptionnelle, avec son premier mouvement et ses quinze minutes de variations parfaitement différenciées, la Marche turque ici idéale. Ou alors la Sonate facile K. 545, avec un second mouvement d’une lenteur rare, exhalant ici une poésie incroyable.
N’allez pas chercher ailleurs votre piano de Mozart !